L'interrogatoire surprise du Premier ministre israélien, Ehoud Olmert, par la police, à propos des pots-de-vin qu'il aurait reçus d'un riche homme d'affaires américain, place le chef du gouvernement dans une position difficile à la veille d'échéances diplomatiques et militaires importantes. La décision du conseiller juridique du gouvernement israélien, Menny Mazuz, d'autoriser les enquêteurs de la police à interroger, vendredi dernier, le Premier ministre a provoqué un véritable séisme en Israël. Il ne s'agit pas en effet d'un supplément d'enquête sur les différentes affaires de corruption dans lesquelles le nom d'Ehoud Olmert a déjà été prononcé. Il s'agit d'un tout autre dossier sur lequel la censure israélienne a imposé un quasi black out. L'affaire est dans les tous cas assez grave pour que le chef du gouvernement décide d'annuler les interviews qu'il devait donner à la presse nationale et internationale à l'occasion de la célébration des soixante ans de l'Etat d'Israël. Selon certaines sources, Ehoud Olmert serait impliqué dans une affaire remontant à l'époque (1988-2003) où il était maire de Jérusalem. Sa collaboratrice de longue date, Shoula Zaken, assignée depuis des mois à résidence pour son rôle dans un scandale politico-financier impliquant la direction centrale des Impôts, aurait été interrogée à deux reprises par la police ces derniers jours. Elle pourrait avoir, en échange de la promesse d'un traitement privilégié de son dossier et de celui de son frère, livré à la police les preuves dont celle-ci manquait pour mettre en examen le Premier ministre. D'autres sources font état de pots-de-vin que Ehoud Olmert aurait reçus de l'un des amis, un riche homme d'affaires américain, peu de temps avant le malaise dont fut victime Ariel Sharon, le 4 janvier 2006. Ehoud Olmert était alors ministre des Finances et numéro 2 du gouvernement. Pour de nombreux analystes, Ehoud Olmert paraît de moins en moins capable de se maintenir à la tête du gouvernement, compte tenu de la gravité des nouvelles charges pesant contre lui. Celles-ci pourraient se révéler plus sérieuses que les rumeurs circulant à propos de son implication dans la privatisation de la Banque Léoumi. La classe politique, notamment l'opposition de droite, ne cache pas sa volonté de provoquer un débat d'urgence à la Knesset afin de présenter une motion de défiance contre Ehoud Olmert. Des députés travaillistes et plusieurs députés de Kadima envisageraient aussi la tenue d'élections législatives anticipées. L'affaire tombe au plus mauvais moment pour le Premier ministre qui s'apprête cette semaine à recevoir le président américain George W.Bush, de nombreux chefs de gouvernement, des ministres des Affaires étrangères et de personnalités venues commémorer le soixantième anniversaire de la création de l'Etat d'Israël. Car un départ du gouvernement d'Ehoud Olmert ne serait pas un départ comme les autres. Certes, nul n'est irremplaçable mais, dans ce cas précis, un changement de Premier ministre ou la tenue d'élections législatives remettraient en cause l'avancement des discussions israélo-palestiniennes en vue de la conclusion d'un accord avant le départ de la Maison-Blanche de George w. Bush, début janvier 2 009. Ce départ compromettrait également l'éventuelle conclusion d'une trêve entre Israël et les différentes factions palestiniennes opérant au sein de la bande de Gaza. Un projet de trêve a été mis au point avec le Hamas par le chef des services de sécurité égyptiens, le général Omar Soleïman, et doit être discuté la semaine prochaine par le Cabinet restreint de Sécurité israélien, très divisé. Enfin, un bouleversement politique majeur en Israël aurait des incidences négatives sur l'éventuel redémarrage, sous l'égide de la Turquie, des discussions entre la Syrie et Israël en vue de la signature d'un accord de paix contre la restitution à Damas du plateau du Golan.