La montée en flèche des prix du foncier influence considérablement l'offre en matière d'immobilier. Entre-temps, le moyen standing fait défaut et la classe moyenne se rabat sur les logements économiques et sociaux. Le marché de l'immobilier semble se tasser. Depuis le temps que les investissements, et avec eux les prix aussi, vont crescendo, l'accès à la propriété est devenu une opération périlleuse à laquelle l'employé à moyen ou faible revenu, ne s'aventure plus qu'après moult réflexions. Notons que les connaisseurs en la matière, de même, deviennent moins aptes à acquérir un logement, puisqu'une personne avertie cherche non seulement la disponibilité mais aussi la qualité. Qualité qui se fait d'ailleurs assez difficile à trouver, ce qui intrigue aujourd'hui les Marocains. Suffit-il d'avoir des revenus «suffisants» ? Et encore, même ce point de revenus «suffisants» est relatif. En ce sens, que mis à part le type économique et le haut de gamme, les clients tentés par l'immobilier ne trouvent plus grand choix. « Le logement économique ou social a dépassé le seuil des 200.000 DH initiaux. À présent, il avoisine les 300.000 DH, car qu'on veuille l'admettre ou pas, le noir est pratique courante. Le reste se vend, pour la majorité, à partir de 800.000 DH. C'est se demander où est la place du moyen standing dans une conjoncture pareille », indique un cadre bancaire qui a requis l'anonymat. Dans ce contexte, la flambée qui caractérise de plus en plus le secteur, est imputable, essentiellement, à la spéculation, d'une part, mais aussi à la rareté du foncier disponible. Le peu de terrains encore disponibles en plein centre- ville étant gardé par les promoteurs immobiliers, pour des temps de disette peut-être. Autre aspect, mais non moindre, concerne le point relatif à l'inadéquation flagrante entre l'offre et la demande. Car alors que pour ce qui est de l'offre, on trouve soit du logement de type économique, soit du haut standing, avec un grand vide en matière de moyen standing. Au mieux, c'est la branche de «l'économique amélioré» qui est développée, mais qui reste aussi hors de portée pour un grand nombre de foyers. S'agissant de la demande, par contre, le moyen standing se fait la perle rare des Marocains, qui ne trouvent pas d'offre adaptée à leurs critères, et sont obligés de fait de pencher pour l'économique. «Effectivement, le moyen standing n'est plus aussi courant. Mais notez que les prix des terrains coûtent de plus en plus cher. Les constructions, qu'il s'agisse de logement économique ou de haut de gamme, coûtent la même chose, c'est la finition qui fait la distinction. L'Etat devrait réfléchir à la solution mise en place en Egypte. Je parle de la vente des terrains lui appartenant aux promoteurs, mais pour qu'il y ait pas monopole, cela devrait se faire dans le cadre d'appels d'offre avec des conditions très serrées et obligation de mise en valeur. Cela tirera sûrement les prix des terrains à la baisse», déclare Miloud Chaâbi, président de la Fédération nationale des promoteurs Immobiliers (FNPI). Par ailleurs, «la demande sur le logement économique monte en flèche et donne lieu, d'une part, à un prix dépassant largement celui déclaré, à savoir les 200.000 DH, et par conséquent se trouve éliminée une bonne partie des profils pour lesquels ce produit économique a été initialement tracé», indique un professionnel du secteur. Une deuxième résultante de cette concentration de l'offre sur le logement économique que l'on peut par ailleurs constater, c'est que les grands promoteurs immobiliers se retrouvent avec carnets de commandes pleins, pour des livraisons d'ici 4 ou 5 ans. Un grand problème se pose aujourd'hui, et handicape le marché immobilier. Il s'agit de «la partie non déclarée du prix de l'acquisition, elle commence à se faire monnaie courante. Alors qu'elle se situait dans un niveau de 10 à 15 ou au maximum 20% auparavant, la pratique à ce jour connaît des sommes qui peuvent atteindre même 50% de la partie déclarée», ajoute ce cadre bancaire. Pour sa part, Taoufik Hejira, ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, explique que «la promotion immobilière a, aujourd'hui, une visibilité sur les trois prochaines décennies, à condition de chercher les bonnes niches d'intérêt à fort potentiel et forte demande. A ce jour, deux segments sont absents du marché, le logement des très pauvres, et celui pour la classe moyenne. Maintenant, le fait de diversifier les produits et de sortir de la logique d'un seul produit qui est celui subventionné par l'Etat permettra de remédier à cela. La classe moyenne qui ne trouve plus de réponse à sa demande se rabat automatiquement sur le logement économique».