Nicolas Sarkozy joue une partition remplie de contradictions. Tout en affirmant que «le président n'a pas à s'impliquer dans les élections municipales», il voit dans ses ministres élus dès le premier tour un encouragement. Le silence était donc trop pesant et l'absence insupportable pour un Nicolas Sarkozy habitué à écumer les tréteaux électoraux avec hargne, à provoquer l'adversaire avec panache. Les choix, qui s'offraient, lui portaient chacun une douleur difficilement surmontable : ou encaisser en silence, dans une posture masochiste, le coup de la défaite et du désaveu, ou ruer dans les brancards en essayant de sauver les villes emblématique encore gagnables et limiter les dégâts. Nicolas Sarkozy ne choisit ni l'un ni l'autre. Il se contentât de sortir une tête entre les deux tours pour dire aux Français que le message qu'ils s'apprêtent à lui adresser à travers les urnes municipales n'a pas cette gravité nationale qu'une opposition aux abois tient absolument à lui accoler. Nicolas Sarkozy et après avoir, un temps, été tenté de donner à cette consultation une dimension nationale, opère une marche arrière manifeste : «Il ne s'agira pas dimanche prochain de décider de la politique de la Nation mais pour chacun de choisir la meilleure équipe pour gérer sa commune. (...) Ce seront les questions de la vie quotidienne, de la proximité, du voisinage qui seront posées». Nicolas Sarkozy joue par ailleurs une partition remplie de contradictions.Tout en affirmant que «le président de la République n'a pas à s'impliquer dans les élections municipales», il voit dans ses ministres élus dès le premier tour un «encouragement (…) Les électeurs leur ont fait confiance alors même qu'ils sont pleinement engagés dans des réformes difficiles». Le message de l'Elysée est le suivant :Que tous ceux qui veulent absolument voir dans le recul de la droite dans ces élections municipales un rejet de la politique de Nicolas Sarkozy ou une sanction personnelle du président de la république aillent réviser leurs classiques. Et que tous ceux qui voient dans le score réalisé par une gauche revigorée l'ombre d'un troisième tour d'une présidentielle inachevée tempèrent leur enthousiasme. Le président de la république n'et touché ni de près ni de loin par une possible débâcle de sa formation politique, l'UMP. Cette stratégie dont le but ultime est d'élever Nicolas Sarkozy au dessus de la mêlée municipale, vise en fait à protéger le locataire de l'Elysée des dommages collatéraux d'un calendrier électoral capricieux. Est-ce à dire que la nouvelle carte municipale que les Français s'apprêtent à dessiner dimanche prochain n'aura aucune résonance politique? Nicolas Sarkozy ne pousse l'autisme jusqu'à ces limites : «il appartiendra à chaque responsable politique et d'abord à moi-même de tirer les leçons de ces élections (…) le peuple alors aura parlé, je tiendrai naturellement compte de ce qu'il aura exprimé». L'opposition guette la moindre faille dans la carapace de Nicolas Sarkozy pour y introduire ses flèches. Ségolène Royal qui, parmi les premiers, avait levé l'étendard de la sanction politique, continue d'ajuster ses attaques : «Je voudrais dire aux électeurs centristes, à tous ceux qui pensent que Nicolas Sarkozy agit mal, préside mal, tire la France vers le bas, je voudrais dire à tous les électeurs de gauche (...) qu'ils viennent massivement voter dimanche prochain pour choisir de bons maires et en même temps pour sanctionner le pouvoir en place». Mais la grande frustration de Nicolas Sarkozy concerne le leader du MoDem François Bayrou. Après avoir investi une énergie monstre à affaiblir les centristes réticents à sa politique et allergique à sa personne, Nicolas Sarkozy voit ses efforts partir en fumée. Non seulement François Bayrou n'a pas disparu de la scène politique, mais il continue à jouer un rôle structurant de la carte politique française en se livrant à son sport favori : des alliances à géométrie variable. Nicolas Sarkozy sait mieux que quiconque que les attaques à répétitions de François Bayrou contre sa politique et son style sont pour beaucoup dans la dégringolade de son image et de sa crédibilité. Il a chargé son Premier ministre François Fillon de porter l'estocade : «On a tendu la main à François Bayrou, il ne veut pas la prendre. (...) Il en répondra lui-même devant ses électeurs». Un ton menaçant qui en dit long sur la détermination de la majorité présidentielle à faire chuter François Bayrou dans sa ville de Pau où il est en ballottage légèrement défavorable. Pau est une ville que le chef du MoDem qualifie comme «une ville qui n'a pas envie d'un maire qui soit une carpette ou une lavette».