La secrétaire d'Etat à la ville, Fadela Amara, a marqué son absence dans la crise de Villiers-Le-Bel. Un silence qui suscite la colère de plusieurs parties. Depuis le début de la crise de Villiers-Le-Bel, banlieue parisienne qui a été le théâtre de violents affrontements armés entre les forces de police et les jeunes du quartier, nombreux étaient ceux qui s'attendaient à ce que le gouvernement de François Fillon déploie, pour une fois, la palette de solutions dont il dispose pour dégoupiller la crise : d'abord la sécurité pour une reprise en main et asseoir l'autorité d'une police vécue, pour reprendre le mot du leader socialiste Henri Emmanuelli «comme une force d'occupation», ensuite la médiation sociale pour ouvrir et lancer des chantiers de dialogue. Et tout le monde s'attendait à ce que la secrétaire d'Etat à la ville Fadela Amara puisse entrer en action. N'a-t-elle pas été choisie à ce poste, dans le cadre de l'ouverture ethnique et politique, en fonction de ses qualités de comprendre et de traiter la mal vie des quartiers difficiles ? N'a-t-elle pas épaté la galerie et de nombreux Conseils des ministres par son «parler-branché-banlieue» pour bien signifier sa totale maitrises des enjeux sémantiques et son indiscutable compatibilité avec l'air du temps ? Or, depuis le début de la crise, les questions fusent de partout : A quoi cela sert d'avoir une Fadela Amara dans son équipe gouvernementale pour ensuite la ranger au musée des objets momifiés alors que la banlieue menace de reprendre feu ? Les attaques sur le sujet furent impitoyables. En témoigne, à titre d'exemple, les mots cinglants utilisés par Anne Souyris, porte-parole des Verts : «A part une politique de communications se résumant à un «Fadela tour» et une démonstration policière surgénératrice de violences, les politiques de M. Sarkozy et consort sont tout simplement des politiques «zéro proposition». Attaquée de plein fouet, Fadela Amara a eu recours à tous les subterfuges pour justifier sa remarquable absence sur cette crise. Après l'avoir joué, hautaine, distante, originale, sur le ton : «Je n'aime pas instrumentaliser le chagrin et tout ça. Je crois qu'il faut faire attention à la manière dont on traite les choses», elle s'est vite ravisée pour botter en touche et dire presque que les enjeux de cette crise sont étrangers au domaine de sa compétence : «Il ne faut pas tout mélanger. Ce qui s'est passé à Villiers-le-Bel, après la mort dramatique des deux adolescents, relève d'abord de l'ordre public et non pas de la politique de la ville» avant de préciser tout de même son propre diagnostic : «On entend l'exclusion, le malaise social, mais ce n'est pas parce qu'on est pauvre, exclu, discriminé qu'on peut saccager. Ceux qui disent cela sont irresponsables». Pour minimiser les conséquences éventuelles de cet assourdissant silence, l'entourage de Fadela Amara a murmuré aux oreilles des journalistes une explication d'ordre personnel. La secrétaire d'Etat à la ville a vécu une expérience similaire traumatisante lorsqu'à 14 ans, elle avait perdu son petit frère Malik âgé de 5 ans renversé par une voiture. Le journal «Le Parisien» précise : «Elle a souvent raconté que, sur les lieux de l'accident, les policiers s'étaient montrés plus attentionnés avec le chauffard qu'avec elle-même et sa famille». Dans ses rares interventions, Fadela Amara fait à peine allusion au dispositif «anti-glandouille» appelé sobrement «plan respect et égalité des chances», appelé pompeusement dans certains milieux «plan Marshal pour les banlieues», qui doit être présenté à Nicolas Sarkozy le 22 janvier prochain. A tous ceux qui s'interrogent sur l'opportunité de dévoiler de telles propositions dans ce contexte de crise des banlieues, le Premier ministre François Fillon décrète avec un sens de la formule ramassée que «ce ne sont pas les délinquants qui tirent sur la police qui feront l'agenda de la République». La légende parisienne non confirmée voudrait que le président Sarkozy ait passé un mémorable savon aux deux femmes ministres en charge directement de cette crise, Michelle Alliot-Marie à l'Intérieur et Fadela Amara à la ville, leur faisant des reproches d'être complètement transparentes, d'avoir un retard à l'allumage et une gestion hasardeuse des débuts de cette crise. Bref, un manque total de réactivité. L'Elysée ne dément même plus quand une «source proche du gouvernement» affirme aux agences que «Le président est furieux de la façon dont la crise a été gérée, notamment par le ton de l'intervention de Michèle Alliot-Marie mardi devant l'Assemblée et par l'absence de Fadela Amara». C'est dire l'ambiance tendue qui doit régner au sein du gouvernement de François Fillon.