De tous les candidats qui briquent l'Elysée, Nicolas Sarkozy est le seul à avoir profité de sa longue carrière de ministre de l'Intérieur pour parcourir les capitales du Maghreb. Quel type de relations les candidats favoris à cette présidentielle française entretiennent-il avec les pays du Maghreb ? À quelle démarche future de président augure leur posture actuelle de candidat à l'égard du Sujet ? Si cette préoccupation ne figure pas au fronton animé des débats de cette campagne, elle se retrouve dans tous les esprits, tapie dans l'ombre des intérêts stratégiques des uns et des autres, le Maghreb étant un espace vital pour la France et sa précieuse porte vers l'Afrique. Les points de débats actuels de cette relation franco-maghrébine ne manquent pas. Parmi les sujets maghrébins les plus urgents sur lesquels le prochain président ou la prochaine présidente française aura à se déterminer, se trouve le plan marocain d'autonomie du Sahara qui commence à agiter le landernau international, le débat sur le fameux traité d'amitié entre la France et l'Algérie, la montée en puissance du réseau Al Qaïda en Afrique de nord…etc. De tous les candidats qui briquent l'Elysée, Nicolas Sarkozy est le seul à avoir profité de sa longue carrière de ministre de l'Intérieur pour parcourir les capitales du Maghreb même si les discutions avec ses homologues se limitaient souvent à des questions liées à l'immigration clandestine, au terrorisme, au grand banditisme et au trafic de drogue. Il est aussi celui qui avait clairement annoncé le style d'approche qu'il compte mettre en œuvre pour traiter ces questions. Dans ce qui apparaît comme une prise de distance avec le style Chirac en la matière, Nicolas Sarkozy s'est fait un plaisir de dévoiler sa démarche et sa conception des affaires étrangères de la France dans un discours de politique internationale prononcé le 28 février dernier :« Il nous faut les débarrasser des réseaux d'un autre temps, des émissaires officieux qui n'ont d'autre mandat que celui qu'ils s'inventent (…) Il faut définitivement tourner la page des complaisances, des secrets et des ambiguïtés, notamment avec nos partenaires africains et arabes (…) Nous ne devons pas non plus nous contenter de la seule personnalisation de nos relations». Sans doute échaudée par la douloureuse expérience libanaise quand, à la recherche précipitée d'une stature internationale, elle s'est maladroitement mêlée les pieds dans les sables mouvants du Hezbollah, la socialiste Ségolène Royal est restée publiquement muette sur la nature des relations qu'elle compte installer avec les capitales du Maghreb une fois élue. L'observateur attentif est astreint à la consultation de la littérature du Parti Socialiste sur ces questions pour repérer quelques indications enfouies entre l'héritage mitterrandien et les choix «réalistes» de Lionel Jospin. Et surtout à scruter la composition des équipes de collaborateurs pour tenter de deviner vers quelle direction la balance des convictions et de choix politiques va pencher. Une fois choisie par le parti socialiste pour porter ses couleurs, Ségolène Royal avait reçu de nombreuses invitations à venir fouler officiellement la terre maghrébine. Invitation de découvertes et de prises de contact. Elle les avait délicatement refusé de peur, suggère-t-on, de devoir prendre position aujourd'hui dans les dédales tendues de l'axe Rabat/Alger. Les deux autres candidats du quarteron de tête de cette présidentielle que sont le centriste Français Bayrou et le leader de l'extrême droite Jean Marie Le Pen ont l'avantage des positions clarifiées. Le premier, encore incrédule devant cette vague d'opinions favorables qui le porte aux cimes des sondages, ne semble pas avoir réellement réfléchi à la position à prendre pour appréhender l'ensemble maghrébin. Ses sorties en matière de politique internationale sont centrées sur la manière de remettre la France au cœur de l'Europe alors que le «Non»français à la constitution européenne l'en a structurellement exclue. Le second Jean Marie Le Pen affiche des idées arrêtées sur le sujet . Pour lui, l'espace maghrébin se présente comme un endroit vers lequel doivent être refoulés sans ménagements les immigrés clandestins, sources de tous les maux de la société française. Un exercice de virilité longtemps fantasmé par l'extrême droite, au cœur de son commerce et de son identité électorale.