Saâd Houssaïni est présenté comme étant le deuxième homme dans la hiérarchie du GICM. Son arrestation porte un coup fatal à cette organisation décimée ainsi au Maroc. Parcours d'un «Mejjati-bis». Les étudiants de la Faculté des sciences de l'Université Moulay Ismaïl à Meknès, au début des années 1990, ne se doutaient nullement que l'un des leurs allait devenir l'un des terroristes les plus recherchés non pas uniquement par les services de sécurité marocains, mais aussi un peu partout à travers le monde. Saâd Houssaïni, qui fête ses 38 ans ce samedi, coulait des jours studieux entre le domicile familial à «Aïn Maâza», principal incubateur de terroristes à Meknès, et l'université où il suivait un cursus en physique-chimie. Ses efforts paient et il part suivre des études approfondies en chimie à Barcelone. C'est à cette époque-là qu'il commence à perdre le Nord. Les milieux islamistes qu'il commence à fréquenter le détournent de ses brillantes études. Il finit par débarquer, clandestinement, en Turquie avant de passer en Afghanistan via le Pakistan. C'est d'ailleurs à Istanbul qu'il fera la connaissance d'autres membres de la direction du GICM (Groupe islamique combattant marocain) et dont le célèbre Karim Outah. En Afghanistan, Saâd Houssaïni s'installe dans un camp de Kaboul où il s'improvise enseignant d'arabe pour les enfants à ses heures perdues. Il y fait surtout la connaissance de plusieurs «Afghans marocains» et sympathise avec Boujemaâ Moustaïd dont il épousera la fille, Sara. Houssaïni perfectionne surtout ses connaissances en fabrication d'explosifs et prend bon nombre de pseudonymes comme c'est la mode chez les salafistes. En octobre 2001, il quitte l'Afghanistan qui croule sous les bombes américaines pour regagner le Maroc. De par son expérience et son parcours universitaire, Saâd Houssaïni peut être comparé à Karim Mejjati, relève un responsable au ministère de l'Intérieur. Mais pas uniquement. Recherché depuis juillet 2002 au Maroc, puis par les services espagnols, il n'a jamais quitté, pendant cinq ans, Casablanca et sa région. Constamment sur ses gardes, il avait le sens du déguisement et se débrouillait pour se soustraire aux «yeux» des services de sécurité. Jusqu'au 8 mars dernier quand il se fait surprendre dans un cybercafé près de Sidi Maârouf au moment où il attendait un individu qui lui y avait fixé rendez-vous. «Ne croyez surtout pas que son arrestation est due au hasard. Nous avons réussi à le faire sortir de sa tanière et nous disposons des techniques les plus sophistiquées actuellement», note un responsable au ministère de l'Intérieur. Que faisait Saâd Houssaïni pendant tout ce temps-là, lui qui avait évité d'assister, l'été 2006, aux funérailles de son père ? L'instruction en cours le démontrera, mais son nom était souvent évoqué lors des procès qui se déroulaient depuis les attentats de mai 2003. Ce même nom qui a fini par s'imposer, avec celui de Mohamed Guerbouzi, quand on parle du GICM, des attentats de Casablanca ou encore de Madrid en mars 2004. Les enquêteurs sont toutefois parvenus à reconstituer son emploi du temps lors des derniers mois. Houssaïni, crédité de fortes relations avec Al-Qaïda, a entamé une mue à l'image de celle du GSPC. En octobre dernier, affirment des sources sécuritaires, il avait constitué une cellule spécialisée dans le recrutement de kamikazes pour le Jihad en Irak. Lui-même prévoyait de rejoindre les rangs des héritiers de Abou Moussaâb Zarqawi, ajoutent les mêmes sources, après avoir promis pas moins d'une vingtaine de kamikazes. Mardi, dans la matinée, les autorités marocaines sont alertées de l'arrestation en Irak d'un kamikaze marocain qui venait de transiter par la Syrie. Le nom de Houssaïni est cité de nouveau. Quelques jours auparavant, la police arrêtait un ingénieur en chimie, l'un des responsables et principal actionnaire d'une société de Mohammédia spécialisée dans l'agroalimentaire. Les services de sécurité et les enquêteurs avancent toutefois que ni Saâd Houssaïni ni le GICM n'avaient quelque lien avec la cellule de Abdelfettah Raydi, démantelée après l'attentat du 11 mars dernier et comprenant une trentaine de membres. Mardi dernier, il est resté de marbre face aux questions du magistrat chargé de l'instruction des affaires terroristes à la Cour d'appel de Rabat. Le juge lui a fixé la date du 4 avril prochain pour la reprise de l'instruction. Saâd Houssaïni, Mustapha, Nabil ou encore Abou Zayd, laisse derrière lui un enfant de cinq ans, un beau-père en prison pour terrorisme et sûrement des «disciples» désemparés. Ce 8 mars au quartier «Haddiouiya», son GSM lui a joué un mauvais tour. Le pire de tous. Guerbouzi, le Maroc ne désespère pas Londres a, à maintes reprises, opposé une fin de non-recevoir aux demandes marocaines visant l'extradition de Mohamed Guerbouzi, patron du GICM. Libre de ses mouvements en Grande-Bretagne, Londres estime que les preuves et données fournies par le Maroc ne sont pas suffisantes pour légitimer une extradition. Selon un haut responsable de l'Intérieur, le Maroc poursuit toujours cette piste et la chose reste "envisageable" puisque d'autres antécédents l'ont démontré. Le moindre faux-pas et c'est Guerbouzi qui risque de se retrouver face à Me Abdelkader Chentouf dans les locaux de la Cour d'appel de Rabat. Abou Hamza, le cheikh égyptien, avait longtemps résisté avant d'être rattrapé par la justice. Et la prison pour sept ans. Détail intéressant, le frère de Mohamed Guerbouzi se trouve être le mari de la fille de Ayman Zawahiri. Pas moins.