Le Premier ministre libanais, Fouad Sniora, s'est rendu dans la banlieue sud de Beyrouth, bastion chiite durement affecté par les bombardements israéliens. Cette visite était censée contrer l'influence croissante du Hezbollah qui s'est mis à indemniser les victimes de la guerre. En tournée dimanche dans la banlieue sud de Beyrouth, le Premier ministre libanais, Fouad Siniora, savait qu'il empiétait sur la « chasse gardée » du Hezbollah. Hier théâtre de violents bombardements israéliens, la banlieue sud de Beyrouth est, depuis quelques jours, le lieu d'enjeux politiques majeurs. Souvenez-vous, quelques heures à peine après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu , le leader du Hezbollah, Cheïkh Hassan Nasrallah, apparaissait à la télévision pour promettre d'aider les Libanais à reconstruire les foyers, financer les loyers et les achats de meubles. Les dollars ne tarderont pas à venir, déjà le Hezbollah s'est mis à distribuer jusqu'à 12.000 dollars par plaignant ayant perdu son domicile. Derrière cette manne, d'aucuns se mettaient à soupçonner «la main de l'Iran» . Téhéran, ravi de la «victoire de Dieu» sur l'ennemi Israël, n'aurait pas hésité à mettre la main à la poche pour indemniser une population éprouvée par 34 jours de guerre. Et ce n'est surtout pas le Premier ministre Siniora qui contredira cette réalité. Pas plus que les ministres arabes des Affaires étrangères, qui s'étaient réunis en urgence dimanche dernier au Caire pour discuter de la création d'un Fonds d'aide à la reconstruction du Liban. Par cette initiative, les chefs de la diplomatie des pays de la Ligue arabe auraient sans doute voulu retirer le tapis sous les pieds de l'Iran, qui transfère au Hezbollah des millions de dollars pour financer des compensations aux Libanais. Dans le même temps, Fouad Siniora, convaincu de l'impact médiatique de sa visite dans la banlieue sud de Beyrouth, s'est fait escorter par une armada de journalistes, de micros et de caméras. Lors de cette visite, le Premier ministre sunnite a multiplié les déclarations anti-israéliennes, qualifiant les bombardements israéliens sur la banlieue sud de Beyrouth de « crime contre l'humanité». Son compagnon, Elias Murr, ministre de la Défense, mettait en garde contre tout nouveau tir de roquette, invitant implicitement le Hezbollah à éviter toute nouvelle escalade avec l'armée israélienne. Une mise au point à peine voilée adressée au parti de Cheïkh Hassan Nasrallah, que l'Etat hébreu accuse d'être responsable du déclenchement de la guerre le 12 juillet dernier. Le Hezbollah est appelé à revoir à la baisse ses ambitions non seulement sur le plan militaire, sachant que, depuis quelques jours, il est contraint de faire du coude à coude avec l'armée libanaise qui s'est déployée dans le sud du Liban. La visite de Siniora dans la banlieue sud de Beyrouth vise à disputer sur le terrain même du Hezbollah le prestige dont il jouit auprès de la population chiite. Or voilà, comparé au Hezbollah, le gouvernement libanais a péché par un manque flagrant de réactivité. Le Hezbollah, sorti grandi de sa guerre contre Israël, n'a pas tardé à annoncer son plan d'aide à la reconstruction, alors que le gouvernement de Fouad Siniora est intervenu après coup. Un retard qui a déjà fait jaser dans la banlieue sud de Beyrouth, où il a été vivement critiqué. Les pays arabes sont à leur tour intervenus sur le tard, bien derrière l'Iran qui avait multiplié les signes de son engagement humanitaire en faveur du peuple libanais.