Au lendemain des explosions qui ont fait au moins 23 morts dans une station balnéaire du Sinaï, la police privilégie la piste d'attentats-suicides. Les analystes, eux, écartent tout lien avec le réseau d'Al-Qaïda. La spirale du terrorisme au pays des Pharaons. De nouveaux attentats ont frappé, lundi 24 avril, la ville balnéaire de Dahab en l'Egypte. Un triple attentat qui a visé trois cibles. Primo, frapper le tourisme national et international puisque c'est la fête du printemps. Secondo, fragiliser l'économie égyptienne pour que le peuple se retourne contre le président Moubarak. Et tertio, intimider et faire douter l'armée qui soutient le pouvoir. Les autorités ont fait état de bombes télécommandées, alors qu'un responsable de la sécurité a parlé d'au-moins deux kamikazes. La presse gouvernementale a évoqué la piste du groupe Al-Tawhid wal Jihad, accusé dans les attentats de Taba et Charm el-Cheikh. Cette attaque terroriste, aux conséquences probablement désastreuses pour l'industrie touristique égyptienne, est la troisième perpétrée dans une ville côtière du Sinaï en l'espace de deux ans. Comme les précédentes, elle a eu lieu en pleine période de vacances pour les Egyptiens, entre la Pâque orthodoxe célébrée par les coptes et la fête de Chem al-Nessim qui marque le début du printemps. Les déflagrations ont été si puissantes que des plongeurs de la police s'employaient mardi à récupérer des restes de victimes en mer. «Quand j'ai entendu la première bombe, je me suis mise à courir. Quand la deuxième a retenti, nous courions encore, » a raconté Johanna Sarjas, une journaliste finlandaise en vacances. «C'était de la folie parce que nous ne savions pas d'où viendrait l'explosion suivante.» Le ministre égyptien de l'Intérieur, Habib el-Adly, a fait état de 23 morts, dont 20 Egyptiens et trois étrangers. Mais des responsables hospitaliers ont annoncé mardi qu'un Egyptien avait succombé à ses blessures, portant à 24 le nombre des morts. On recensait également plus de 60 blessés, parmi lesquels de nombreux étrangers. Les Frères musulmans d'Egypte ont condamné mardi ces attentats estimant que ces « actions criminelles » ne visaient qu'à la déstabilisation du pays. La déclaration des Frères musulmans survient au lendemain de la condamnation du triple attentat par le Hamas. Ces attentats, qui ont entraîné un retour massif de touristes vers Israël, dont la frontière est distante d'une centaine de kilomètres, sont intervenus au lendemain de la diffusion d'un nouveau message enregistré attribué à Oussama ben Laden , dans lequel il dénonce une «guerre des croisés sionistes contre l'islam». Rien pour l'heure ne permettait toutefois d'accuser Al-Qaïda. Le semaine dernière, le Caire avait annoncé l'arrestation d'une cellule terroriste de 22 hommes soupçonnée de préparer des attentats contre des zones touristiques. Ces personnes seraient membres d'«Al-Taefa al-Mansourah» (groupe de la victoire), organisation inconnue en Egypte. « Ces attaques ne peuvent avoir un lien avec Al-Qaïda car depuis les attentats de Taba et Charm el-Cheikh, aucune déclaration de Ben Laden et de son bras droit, l'Égyptien Ayman al-Zawahiri, n'a fait allusion aux attentats en Egypte», a estimé l'analyste Dhia Rachwane, du centre Al-Ahram. Pour Abdel Moneim Saïd d'Al-Ahram, « le discours de Ben Laden ne peut être lié aux attaques car il est trop proche dans le temps. Les terroristes n'auraient jamais eu le temps de planifier leurs attentats en deux jours ».