Après neuf mois d'examen en profondeur du groupe Renault, son Pdg Carlos Ghosn a dévoilé publiquement, jeudi dernier, la stratégie triennale de la marque. Un plan ambitieux qui prévoit de positionner Renault en tant que constructeur généraliste européen le plus rentable. Après plusieurs semaines d'attente, le suspense a pris fin chez les 130.000 employés de Renault qui avaient retenu leur souffle. Car à 8h45 du jeudi 9 février, leur Pdg, Carlos Ghosn, a enfin dévoilé le plan stratégique triennal de la firme au losange. Baptisée «Renault Contrat 2009», cette ambitieuse feuille de route a pour principal objectif de positionner durablement Renault comme étant le constructeur généraliste européen le plus rentable. «Avec une vision stratégique claire et des objectifs prioritaires, précis et mesurables, j'ai la conviction que Renault deviendra, dans le cadre de l'Alliance, une grande entreprise automobile mondiale, performante dans la durée», a déclaré M. Ghosn. Devant un parterre de journalistes et d'analystes financiers venus des quatre coins du monde, ainsi que plusieurs cadres de l'entreprise, M. Ghosn n'a donc pas failli à sa réputation de grand orateur et de preneur de décisions pertinentes. Ambitieux, le «Renault Contrat 2009» l'est parce qu'il vise avant tout une augmentation sensible des ventes de Renault en «évitant la restructuration». Donc, pas de fermeture d'usine, ni de projet de réduction d'effectifs. Pour ce brillant et charismatique patron (qui reste également le président de Nissan), «c'est une nouvelle page forte de l'histoire de Renault qui s'écrit, fondée sur la capacité à mobiliser des femmes et des hommes de l'entreprise». Mais concrètement, que prévoit ce plan stratégique ? Il est d'abord question d'atteindre 6% de marge opérationnelle en 2009. Une telle croissance sera le premier critère pour mesurer la performance de l'entreprise. Dans la foulée, M. Ghosn annonce un bilan 2005 et des résultats financiers plutôt «dégradés», marqués par une marge opérationnelle de 3,2%, contre 5,2% en 2004. Cela, malgré des ventes (2,533 millions de véhicules) et un chiffre d'affaires, tous deux en légère hausse. «Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'une marge opérationnelle de 3,2%, qui reste inférieure à la moyenne des constructeurs mondiaux qui est de 3,6%», a-t-il dit. Ensuite et pour booster les ventes, ce plan prévoit une accélération, sans précédent, du nombre de nouveautés à lancer d'ici 2009. Au total, ce sont 26 nouveaux modèles qui seront présentés dans les trois années qui viennent ! Il s'agit là de la plus inédite des offensives «produit» dans l'histoire de Renault. Pourtant, la marque ne prévoit aucune nouveauté cette année, si ce n'est le restylage du grand monospace Espace et des fourgons utilitaires Trafic et Master. Cela en marge de la poursuite des lancements de la Clio III et de la Mégane restylée sur d'autres marchés. En fait, cette offensive «produit» se traduira par le renforcement et l'élargissement de la gamme du losange selon plusieurs axes. Il s'agit du renouvellement des modèles piliers de la marque (famille Mégane, Twingo, Kangoo) ; de l'entrée sur de nouveaux créneaux (SUV et 4x4) ; du retour dans le haut de gamme avec cinq véhicules lancés d'ici 2009. A côté de cela, il y a les véhicules conçus pour le développement mondial, et notamment le programme «Logan». Le plan en question prévoit ainsi deux nouvelles versions break 5 et 7 places de la Logan, qui seront lancées au deuxième semestre 2006 pour élargir la gamme de cette voiture mondiale. Mais le plus surprenant, c'est de voir Carlos Ghosn mettre la main sur la plaie et reconnaître une voiture en perte de vitesse par rapport à ses rivales. L'allusion est ici faite à la Laguna, que ledit plan ambitionne de repositionner aux avant-postes. «La future Laguna, lancée en 2007, sera parmi les trois meilleures de son segment en qualité de produit et de service (…) Les progrès réalisés sur ce produit seront appliqués avec la même exigence à l'ensemble de la gamme, partout dans le monde», annonce un communiqué de la marque, relatif au «Renault Contrat 2009». Pour réussir cette démarche qualité et les objectifs dudit plan, Renault prévoit de poursuivre l'amélioration de sa compétitivité par un programme de réduction des coûts et d'optimisation des investissements en bénéficiant des synergies développées avec Nissan, dans le cadre de l'Alliance. Il est question notamment de réduire : les coûts d'achat de 14% sur 3 ans, les coûts de fabrication de 12% et les frais généraux à moins de 4% en 2009. Parallèlement à cela, les capacités de production devraient passer de 60% en 2005 à 75% en 2009. En d'autres termes, toutes les usines du losange fonctionneront à un rythme de 5.000 heures par an, soit plus que le standard habituel dans l'industrie automobile, qui varie entre 3.760 et 4.000 heures. Interpellé par un journaliste sur la présence de Renault en Formule 1, M. Ghosn a déclaré : «tant que c'est un bon investissement pour Renault, nous restons. Pour l'instant, c'est un bon investissement. On regardera année après année : 2007, puis 2008, puis 2009». Au final et selon M. Ghosn, le volume des ventes que Renault réalise hors d'Europe passerait ainsi de 27% à 37% en 2009, soit une progression de 80% en volumes. Cet enrichissement de l'offre se traduira donc par une croissance des ventes de 800.000 véhicules entre 2005 et 2009, tandis que (selon ledit plan) l'âge moyen des produits sera ramené de 3,8 ans en 2005 à 2,2 ans en 2009.