En dépit de l'incertitude qui plane Les perspectives économiques se situent à un niveau d'incertitude élevé. C'est ce que l'on peut relever du rapport annuel sur la stabilité financière élaboré conjointement par Bank Al-Maghrib, l'ACAPS et l'AMMC. Se référant aux trois institutions, ces incertitudes restent en lien avec les tensions géopolitiques en Ukraine et la contreperformance prévue du secteur agricole. «Les perspectives économiques pour les années 2022 et 2023 sont considérablement affectées par les répercussions du conflit russo-ukrainien qui intervient à un moment où l'économie marocaine est encore fragilisée par les perturbations persistantes de la crise sanitaire et la mauvaise performance attendue du secteur agricole», indique le rapport à ce propos. Les anticipations faites dans ce sens tablent sur une croissance en nette décélération. Elle devrait ainsi s'établir à 1% en 2022 avant d'atteindre une accélération de 4% en 2023. «En regard de la situation qui se profile, le déficit budgétaire devrait atteindre 6,3% du PIB en 2022», peut-on relever dudit document. Cette prévision intervient sous l'hypothèse de la mobilisation des ressources découlant des mécanismes de financement spécifiques et des recettes de monopoles. Un allégement est attendu en 2023 et ce en raison de l'amélioration prévue des rentrées fiscales. Le déficit budgétaire s'établirait ainsi autour de 5,6% en 2023. Parallèlement, le ratio de la dette du Trésor sur le PIB devrait s'établir à 70,1% en 2022 et à 70,7% en 2023. «Cette dynamique haussière du ratio de la dette pourrait réduire les marges de manœuvre sur le plan budgétaire et accentuer davantage les vulnérabilités qui pèsent sur la stabilité financière», commentent les trois institutions dans leur récent rapport. S'agissant de l'inflation, le rapport anticipe un taux de 5,3% en 2022. Cette hausse résulterait de la hausse de sa composante sous-jacente et l'envolée des prix de l'énergie et des produits de base sur les marchés mondiaux et ce dans le sillage de la crise ukrainienne. En 2023, l'inflation décèlerait à 2%. Au-delà des prévisions, le rapport donne un aperçu sur l'évolution des principaux agrégats financiers au titre de l'exercice 2021. Tour d'horizon. Ménages : Un patrimoine de plus de 919 milliards de dirhams Bank Al-Maghrib, l'ACAPS et l'AMMC relèvent une progression stable du patrimoine financier des ménages. Il s'est accru de 5%, soit au même rythme qu'en 2020. On relève dans ce sens un montant global de 919,5 milliards de dirhams dont 754 milliards de dirhams sous forme de dépôts bancaires. L'année 2021 a été marquée par une hausse de 4,8% de la dette des ménages. Cette dernière a atteint 386 milliards de dirhams revenant ainsi à un niveau de progression d'avant-crise. Leurs créances en souffrance ont totalisé 38,8 milliards de dirhams, en augmentation de 9,3% contre 20,9% une année auparavant et représentant 10,1% du total des crédits accordés aux ménages contre 9,6% en 2020 et 7,6% en moyenne sur la période 2015-2019. «Les entreprises non financières (ENF) publiques et privées, quant à elles, ont vu leur dette financière (bancaire,obligataire et extérieure) décélérer de nouveau à 1,6% en 2021 contre 2,4% en 2020, représentant ainsi 69,3% du PIB», lit-on du rapport. Et de poursuivre que «ce ralentissement recouvre un repli de 2% de l'endettement des entreprises publiques dont la dette financière s'est inscrite en baisse depuis 2015 et une décélération de l'endettement financier des entreprises privées à un rythme de 3,2% en 2021, en lien notamment avec le ralentissement de sa composante bancaire». Notons que les créances en souffrance des ENF se sont accrues de 6,6% en 2021, à 61 milliards de dirhams, après un accroissement de 11,3% en 2020, maintenant ainsi leur taux de défaut à 11,3%. Banques et assurance : Une bonne dynamique en 2021 Par ailleurs, la résilience des banques marocaines s'est confirmée en 2021. Le secteur est parvenu à consolider sa situation financière redressant ainsi l'ensemble de ses indicateurs par rapport à l'exercice précédent. Les banques ont ainsi réalisé un résultat net cumulé en hausse de 76,4% après la contraction de 43,2% en 2020. Le rapport fait relever également un ralentissement de la sinistralité aussi bien pour les prêts accordés aux ménages que ceux destinés aux ENF. Ainsi, le portefeuille des créances en souffrance des banques a cumulé un montant de 85 milliards de dirhams, en atténuation par rapport à 2020 (6,7 % contre 14 %). S'agissant de la capitalisation, les ratios de solvabilité et de fonds propres de première catégorie des banques se situent, à fin 2021, à 15,8 % et 12%, sur base sociale (contre 15,7% et 11,4 respectivement en 2020) pour des minimas réglementaires de 12% et 9%. Une atténuation des tensions sur la liquidité des banques a également été observée au titre de l'exercice 2021. Un allégement porté par l'amélioration du niveau des réserves de changes. «Le recours des banques aux avances de la banque centrale a totalisé un montant de 83 milliards de dirhams en moyenne journalière, en baisse de près de 14 milliards de dirhams par rapport à l'année 2020», peut-on lire dans ce sens. Pour ce qui est des assurances, le secteur a affiché une bonne dynamique en 2021 atteignant ainsi un niveau de croissance de 9,9% contre 1% en 2020. Le résultat financier a rebondi de 64,7% profitant de la bonne performance du marché boursier tandis que la marge d'exploitation s'est repliée en raison notamment de l'augmentation de la sinistralité qui a retrouvé son niveau d'avant-crise. «Ces évolutions ont permis de faire progresser le résultat de 35% et hisser le taux de rendement des fonds propres (ROE) à 9,5%, un niveau proche de celui enregistré avant le déclenchement de la crise sanitaire», explique le rapport. Marché de capitaux : La valorisation à un niveau élevé malgré tout Du côté du marché de capitaux, l'indice de performance du marché boursier MASI a enregistré une hausse importante de 18,35% dépassant son niveau maximal d'avant-crise. Par ailleurs, la valorisation globale du marché à fin 2021 s'inscrit en net recul après une année 2020 exceptionnelle, mais reste à un niveau élevé. Le ratio de liquidité du marché enregistre, quant à lui, une amélioration estimée à 9,9% contre 8,8% en 2020. Pour ce qui est des émissions de titres de capital sur le marché boursier, elles demeurent limitées selon ledit rapport. Le volume atteint se chiffre à 3 milliards de dirhams, soit un niveau comparable à 2020. Il est à noter que les sociétés de Bourse ont disposé en 2021 d'une bonne assise financière, en amélioration de 123,6% du résultat net global.