Au-delà de son aspect professionnel, la mère SOS est une femme dévouée au service des enfants abandonnés. Fatiha, Zohra et Fatima, chacune ayant un parcours différent, ont en commun cette volonté de s'occuper des enfants abandonnés. Samedi 3 août à 8h 30 mn du matin. Les enfants de Charîi Fatiha, mère SOS au village d'enfants Dar Bouâzza, sont déjà réveillés et s'apprêtent à accueillir un beau jour ensoleillé. Ils sont trois filles et six garçons, d'âges différents, qui vivent ensemble dans une maison où amour, affection et solidarité sont les maîtres-mots. Leur mère Fatiha, non biologique, s'occupe d'eux depuis plus de cinq ans. Veuve et âgée de 48 ans, elle a opté pour le métier de mère SOS par amour pour les enfants. « J'ai beaucoup souffert suite à la mort de ma petite fille de sept mois. La vie n'avait aucun sens pour moi. La perte de mon mari m'a davantage affectée. Ma famille m'a conseillée de me remarier et de reconstruire un nouveau foyer. Mais, j'ai refusé. J'aimais mon mari et j'ai passé de beaux jours auprès de lui. Je préfère garder en mémoire ces beaux souvenirs. », confie Fatiha Charîi. Et d'ajouter : « C'est mon amour pour les enfants qui m'a poussée à choisir le métier de mère SOS. Ma vie a repris un nouvel envol depuis que je suis au village d'enfants.». Cette mère mène avec ses neuf enfants une vie normale, avec ses hauts et ses bas, comme n'importe quelle famille. Elle tente dans la mesure du possible de leur offrir protection, affection et éducation. En effet, le rôle de la mère SOS est crucial pour l'épanouissement des enfants qui lui sont confiés : elle est leur référence, leur repère et le refuge d'amour et de tendresse. Par ailleurs, la mère SOS est l'un des éléments fondateurs du concept familial du village d'enfants SOS. La pédagogie de ces villages repose sur quatre principes fondamentaux, à savoir la mère, les frères et soeurs, la maison et le village. « Le premier contact avec les enfants était très difficile aussi bien pour moi que pour eux. J'étais étrangère pour eux. Puis, petit à petit, au fil des jours, les liens se tissent et deviennent de plus en plus solides. », affirme la mère SOS C.Fatiha. « Nous vivons ensemble au quotidien. Nous partageons ensemble les joies, les soucis et les rêves de la vie. Je me suis engagée à accompagner ces enfants dans leur parcours et les soutenir jusqu'à ce qu'ils deviennent capables de s'assumer seuls. », ajoute-t-elle, l'air on ne peut plus fier. Cette ferme volonté d'engagement est également partagée par Zohra Ahbeez, mère SOS dans le même village d'enfants. Célibataire âgée de 43 ans et licenciée en littérature arabe, elle forme depuis plus de cinq ans avec huit enfants une famille SOS. « Mon objectif est d'aider ces enfants orphelins ou abandonnés par leurs parents pour des raisons sociales à grandir tout en s'épanouissant. C'est de l'euphorie de dire que je vais remplacer leur maman biologique. Une chose est indiscutable : les parents sont irremplaçables. J'essaie avec l'aide des éducateurs, des psychologues et des responsables de leur offrir les conditions nécessaires pour leur développement équilibré. J'essaie de les soutenir affectueusement, de leur apprendre à s'assumer et à être autonomes. Au fil des jours, j'ai créé des liens profonds avec ces enfants. », confie-t-elle. « Certes, on commet des erreurs. Personne n'est parfait. La patience, l'amour de ce métier et le sentiment de militantisme sont très importants pour pouvoir continuer.», ajoute-t-elle. Et ce n'est pas Fathi Fatima qui dira le contraire. Célibataire et âgée de 37 ans, elle s'est lancée dans «cette aventure» après la première année d'université (littérature française), qui n'était pas concluante. «Au début, j'ai postulé pour ce poste suite à une annonce dans un journal. Je cherchais un travail pour subvenir à mes besoins », explique-t-elle avec sincérité. « Plus tard, une sorte de complicité avec les enfants s'est installée. Je m'attachais de plus en plus à ces enfants qui sont devenus les miens par affection. Impossible de rester indifférent face à l'innocence qu'ils dégagent. De plus, les moments partagés ensemble ne font que consolider ces liens. Alors, j'ai décidé de rester mère SOS à jamais. », ajoute-t-elle avec détermination. Au village d'enfants Dar Bouâzza, les mères SOS sont en nombre de onze. Chacune forme une famille SOS avec huit ou neuf enfants d'âges différents, qui sont élevés comme frères et sœurs. Elle s'occupe de leurs besoins, fait le ménage et ses propres courses. Elle reçoit chaque mois un budget d'environ 4000 dirhams (14 dirhams par jour pour chaque enfant et 18 dirhams par jour pour la maman) pour les besoins de la famille en matière d'alimentation, d'hygiène et d'habillement. Comme n'importe quel métier, la mère SOS reçoit un salaire mensuel, au minimum 2000 dirhams. Elle bénéficie chaque année d'une augmentation de salaire de 3% et d'une prime de gratification. Elle a droit à un jour de congé par semaine et d'un mois de congé par an. Lorsqu'elle s'absente, c'est la tante qui la seconde. La tante a un rôle complémentaire à celui de la mère SOS. Elle travaille dans toutes les familles et les enfants la connaissent bien. Elle a également un rôle affectif et éducatif auprès d'eux. Outre la tante, les mères SOS sont soutenues dans leurs tâches par des psychologues, des éducateurs et des orthophonistes. Le directeur du village a un double rôle : l'administration et l'importante tâche du père. Pour devenir une mère SOS, quelques critères sont requis. La personne doit être âgée entre 30 et 40 ans et être en bonne santé. Elle devrait également être libre de tout engagement familial (célibataire, veuve ou divorcée). Un niveau d'étude minimum baccalauréat est également exigé. Après sélection, elle suit une formation de quelques mois. Elle ne devient mère SOS proprement dite qu'après deux ans de travail. La formation continue est indispensable. En effet, les mères SOS bénéficient durant toute l'année d'une formation leur permettant de mener au mieux leurs missions.