Le gouvernement compte sur la réforme du code de la procédure pénale pour changer la donne Sur un total d'une population carcérale de 86.233 détenus, pas moins de 44,5% sont en détention préventive, soit pratiquement la moitié de la population dans le milieu carcéral. «Les chiffres sont inquiétants». Les propos émanent de Mohamed Benabdelkader, ministre de la justice, au sujet de la détention préventive. Il faut dire que celle-ci commence à donner du fil à retordre à commencer par les responsables de première ligne eux-mêmes. La rationalisation du recours à ce procédé n'est plus une demande de la société civile mais une revendication de la part du parquet général «himself». Les chiffres sont édifiants. Sur un total d'une population carcérale de 86.233 détenus, pas moins de 44,5% sont en détention préventive, soit pratiquement la moitié de la population dans le milieu carcéral. Selon le ministre de la justice, le recours important à la détention préventive est dû à des facteurs judiciaires, sociaux et économiques. Face à cette situation, le gouvernement semble miser sur la réforme des textes juridiques encadrant le recours à cette option par les magistrats compétents. Parmi les pistes citées par les responsables, il y a notamment la mise en place d'alternatives à la détention préventive en plus de la fixation de nouvelles règles et normes encadrant ce procédé. Le ministre a annoncé dans ce sens la chantier de la révision de la politique pénale à commencer par le code de la procédure pénale. Parquet En attendant, les responsables judiciaires comptent prendre des mesures. Ainsi, la présidence du ministère public a appelé à invoquer la présomption d'innocence et le caractère exceptionnel de la détention provisoire, comme deux principes fondamentaux du Code de procédure pénale, et à ne pas ordonner le placement en détention qu'après la réunion des dispositions légales. Dans une circulaire sur la «situation de la détention préventive» adressée au premier avocat général près la Cour de cassation, aux procureurs généraux du Roi près les Cours d'appel et aux procureurs du Roi près les tribunaux de première instance, le président du ministère public a mis l'accent sur la nécessité de renforcer la coordination avec les premiers présidents et les présidents des tribunaux afin d'accélérer le rythme de règlement des affaires liées aux détenus, tout en prenant toutes les mesures susceptibles d'aider les tribunaux dans la préparation des affaires. La circulaire insiste aussi sur la coordination avec les directeurs des établissements pénitentiaires pour obtenir des données actualisées sur la situation des personnes placées en détention préventive, que ce soit celles liées aux affaires en cours, ou celles qui n'ont pas encore été soumises à la Cour de cassation, et sur la nécessité d'informer les premiers présidents et les présidents des tribunaux de la situation dans les prisons pour que ces derniers soient au courant de la situation de la détention provisoire au tribunal. Le document met également l'accent sur la limitation de la liste des affaires des détenus ayant fait l'objet de recours en appel et qui n'ont pas encore été soumises à la Cour de cassation, malgré l'écoulement du délai de plus de 10 jours à compter de l'expiration du délai légal de renvoi en appel, et sur l'établissement d'une liste des affaires des prévenus en pourvoi en cassation et qui n'ont pas été déférées devant la juridiction compétente en dépit de l'expiration du délai de 90 jours à compter de la date de l'émission du pourvoi, conformément aux dispositions de l'article 528 du Code de procédure pénale. Pandémie La circulaire du parquet a relevé que si l'évolution des taux de détention provisoire repose sur l'intervention de plusieurs éléments et déterminants judiciaires et non judiciaires, comme l'augmentation ou la diminution du taux de commission des crimes, ainsi que la hausse du nombre des personnes traduites devant la justice pour soupçons de crimes ou délits, la hausse enregistrée actuellement en nombre de prévenus est due principalement aux difficultés engendrées par la pandémie sur le déroulement des audiences, ce qui a manifestement affecté le rythme de règlement des affaires, abstraction faite du succès de l'expérience pionnière du pays dans l'adoption du procès à distance comme solution principale et mesure préventive afin d'endiguer la propagation du nouveau coronavirus parmi les détenus.