Selon Saïd El Khattabi, fils de l'émir du Rif Mohamed Ben Abdelkrim El Khattabi, il y a un manque de confiance entre les habitants du Rif et les autorités. ALM : Vous avez rencontré, mardi dernier, des membres de l'Instance Equité et Réconciliation (IER). Quel a été l'objet de cette réunion ? Saïd El Khattabi : Effectivement, nous avons eu quelques petites rencontres avec des responsables de l'Instance Equité et Réconciliation. La dernière a eu lieu, comme vous l'avez précisé, mardi dernier à Rabat. Nous avons eu l'occasion de discuter de l'idée du rapatriement du corps de l'émir Abdelkrim El Khattabi de l'Egypte, où il est actuellement enterré. Justement, quelle est votre position et celle de votre famille concernant le rapatriement du corps ? Ma position personnelle et celle de toute la famille de l'émir est tout à fait claire. Nous l'avons d'ailleurs exprimé aux membres de l'Instance Equité et Réconciliation lors de nos différentes rencontres. Nous estimons que le rapatriement du corps, dans le contexte actuel, serait prématuré. L'enterrement de l'émir Abdelkrim au Maroc est un acte éminemment symbolique pour la famille comme pour le peuple marocain. L'essentiel pour nous est ailleurs. Nous avons expliqué aux responsables de l'Instance Equité et Réconciliation que nous préférons d'abord le retour des idéaux que défendait l'émir Abdelkrim El Khattabi. La question du rapatriment viendra après. Comment peut-on, aujourd'hui, résumer ses idéaux ? L'émir Abdelkrim a combattu militairement l'occupation étrangère, mais il avait également des visions politiques, économiques, culturelles et sociales. L'unité du Maroc, sa stabilité et sa prospérité faisaient partie de ses objectifs. Quelle a été sa position concernant l'affaire du Sahara par exemple ? Ses idées sont très connues sur la question du Sahara. Il a toujours voulu une libération totale du Sahara avant même l'indépendance du reste du Maroc. Pour ce qui est des relations entre le Maroc et l'Algérie, je tiens à rappeler que l'émir était le président du Comité de libération nord-africain, qui était composé de Marocains, d'Algériens et de Tunisiens. Pour lui, la construction maghrébine était une nécessité. Nous sommes un seul et même peuple. Il faut donc oublier la haine et les rancœurs et commencer une nouvelle page. Concernant le Rif, que pensez-vous des derniers évènements de Tamasint, où des dizaines de manifestants ont été violemment dispersés par les forces de l'ordre? En effet, j'ai eu l'occasion de parler au gouverneur d'Al Hoceïma au sujet des évènements de Tamasint. On leur promis des choses, mais tout n'a pas été réalisé. J'ai même perçu un retour de pessimisme et de l'inquiétude chez les gens. La conclusion que je peux tirer, c'est qu'il y a un manque de confiance de part et d'autre. Les autorités ont du mal à faire confiance aux Rifains. C'est un long chemin, il faut certainement beaucoup de temps pour que cette confiance soit rétablie entre les deux parties. Mais il faut persévérer, car les grandes œuvres ont souvent des débuts difficiles. Vous organiserez, la semaine prochaine, une conférence de presse à Rabat. Pourquoi ? Je suis prêt à répondre à toutes les questions que les journalistes peuvent poser. Qu'il s'agisse de questions internes ou autres. Par exemple, concernant les relations entre les Etats du Maghreb, je pense sincèrement que l'histoire du Maghreb nécessite une réécriture. Vous pensez que l'accalmie est possible entre le Maroc et l'Algérie dans le futur proche ? Il est clair que le gouvernement algérien est pris dans un engrenage de surenchère à l'égard du Maroc. De son côté, le Maroc et spécialement les journaux, doivent faire preuve de sérénité. L'essentiel est que le bras de fer entre que le gouvernement algérien livre au Maroc ne déborde pas sur le peuple algérien.