La gestion du délégataire des services de distribution d'électricité, d'eau potable et d'assainissement liquide de la wilaya de Rabat-Salé, la Redal, est décriée. On reproche surtout à cet opérateur son excès d'externalisation. Dérapage est désormais un terme fréquemment utilisé pour qualifier l'activité du délégataire des services de distribution d'électricité, d'eau potable et d'assainissement liquide de la wilaya de Rabat-Salé, la Redal. Les factures exorbitantes de ces derniers mois ont donné lieu à un mouvement de contestation sans précédent. Plusieurs cas de dérapages injustifiés des consommations ont été dénoncés. Il suffit d'être tenace pour obtenir gain de cause. D'ailleurs, de plus en plus de clients ont pu bénéficier de la révision desdites factures, suite aux réclamations répétées ! C'est dire que des failles existent au point que le délégataire se sent dans l'obligation de réparer ses manquements. Il faut rappeler que depuis 2004, le délégataire est en droit, selon les termes du contrat, d'opérer l'augmentation des tarifs, mais soumise à la réalisation des investissements. En l'absence d'informations dans ce sens, les interprétations ne peuvent qu'être multiples. Plus grave encore, les représentants des communes et communautés composant l'autorité délégante ne cachent plus leur mécontentement quant au dérapage en matière de gestion. Le manque de contrôle effectif dérange. Alors que l'autorité délégante dispose à l'égard du délégataire d'un pouvoir de contrôle économique, financier et technique de la gestion des services délégués, aucune information n'est adressée aux élus locaux. Pis, la Redal semble avoir placé ses états de synthèses et bilans financiers sous embargo. Saisi officiellement par ALM, le directeur général de Redal, Guillaume Gilles, n'a pas donné suite à notre demande alors que ce genre d'information est à caractère public. Même attitude de la part du service permanent qui exerce, au nom et pour le compte de l'autorité délégante, le contrôle de la gestion et de l'exploitation des services délégués. Nos multiples contacts n'ont pas franchi le seuil du secrétariat du chargé du service ! Dans le détail, les élus dénoncent le mode de gestion actuel, passant la rentabilité maximale au premier ordre au lieu d'un service public de qualité. L'approche adoptée par Redal dans ce sens porte sur l'externalisation du maximum des activités vers, essentiellement, les filiales récemment créées. Tout y passe : de la facturation, au gros-œuvre ou encore le dépannage, l'ensemble des métiers de base bascule vers des entités externes. L'intérêt d'une telle gestion est de pouvoir bénéficier des salaires bas de la sous-traitance. De cette manière, le personnel Redal est mis devant le fait accompli. Soit il opte pour le transfert vers les filiales ou alors, il négocie tout simplement son départ. Il va sans dire que les éléments indésirables sont plus proches de la porte de sortie que d'une promotion. De cette manière, la masse salariale, de l'ordre de 55% de la structure du compte d'exploitation (contre 20% pour les dotations d'exploitation, 15% pour les charges externes et 10% pour divers), s'en trouverait réduite comme peau de chagrin. Ainsi, le management Redal a opté pour l'action directe sur ce poste budgétivore afin d'améliorer son taux de rentabilité. Ce procédé, bien connu des financiers, fait partie d'une technique communément appelée « window dressing ». Mais plus grave, au moment où Redal s'est engagé à apurer les passifs de 901 millions de DH, curieusement, d'anciennes créances, de 139 millions DH plus exactement, se retrouvent encore dans le bilan du délégataire. Cette dette devait faire partie du passif global. La faire ressortir à nouveau, fausse assurément la donne comptable et biaise les engagements pris ! Autre dérapage, que nous aurions aimé vérifier avec la direction générale si elle avait accepté de répondre à nos questions, le taux élevé d'encadrement des étrangers membres de la filiale Vivendi Environnement. Selon les termes du contrat, afin d'encourager le transfert managerial vers les compétences locales, le personnel permanent détaché par Vivendi Environnement ne dépassera pas 8% de l'effectif des cadres marocains jusqu'à la dixième année, puis seulement 5% au-delà, en plus de renforcer le programme de formation en direction des collaborateurs nationaux. Selon les dires de certains cadres de Redal, ces taux et autres engagements ne sont nullement respectés. Cette situation, si elle continue, est de nature à fragiliser les ressources humaines et l'expertise accumulée jusqu'à maintenant. Au terme de la concession, celle-ci risquerait d'être vidée de ses compétences humaines. « Il faut se rendre à l'évidence, nous vivons une situation de monopole dans la gestion déléguée. La mainmise des sous-traitants est de plus en plus grande. L'effet dilutif de la filialisation, doublée d'extermination outrancière vide l'institution de son expertise », déclare l'un d'eux sous couvert d'anonymat. Face à cette situation, Driss Sentissi, président du Conseil de la ville de Salé, et membre du comité de suivi et de contrôle de Redal, estime que des confusions peuvent survenir. Toute hausse des tarifs ne peut être consentie qu'après validation des élus et du Premier ministre. « Pour le reste des critiques, nous sommes prédisposés à remplir nos engagements d'élus. Personne ne nous a saisis officiellement. Chez moi à Salé, j'ai mis sur pied un service 100% dédié aux réclamations. Nos compétences peuvent être mises au service de nos concitoyens, il suffit qu'ils nous le demandent », tient à ajouter le président du conseil de Salé.