Face aux discours extrémistes, aux attentats d'inspiration obscurantistes et à l'invasion médiatique de certaines doctrines, le ministère des Habous et des Affaires islamiques réagit en adoptant un train de mesures destinées à reconquérir les espaces religieux. Depuis les attentats du 16 mai, le ministère des Habous et des Affaires islamiques a repris la place qu'il mérite en tant que locomotive du développement de la nation. En dépit des déclarations du ministre Ahmed Taoufiq sur l'existence d'un projet d'action bien avant les actes terroristes de Casablanca, il n'en demeure pas moins important de souligner que jamais la classe politique marocaine n'a été aussi sensible au discours religieux et au dispositif de l'Etat à cet effet, qu'elle ne l'est aujourd'hui, et jamais son projet n'a été aussi pris aux sérieux. Dans une réunion récente, le président de la Commission des finances, a interdit à une députée d'insérer des versets coraniques pour appuyer une de ses propositions. La religion appartient à tout le monde, a-t-il répliqué, avant de l'autoriser à rentrer dans le vif du sujet. Message reçu, le jeu devient de plus en plus serré pour ceux qui se sont habitués à faire usage de versets coraniques ou de hadiths pour rendre crédibles leurs propos. Lors des deux dernières réunions de la Commission des affaires islamiques de la Chambre des représentants, et en guise de réponse à ceux qui reprochaient à l'Etat l'absence d'une stratégie cohérente dans le domaine religieux, Ahmed Taoufiq a dévoilé les grandes lignes de son plan d'actions. Dans un premier temps, il a fait part de son projet dans les domaines des médias et de la Communication. Son plan médiatique contient cinq axes : le premier concerne la jeunesse, le second, les ouléma, le troisième a trait aux questions relatives au patrimoine soufi, le quatrième volet traite de la religion par rapport aux options démocratiques et modernistes et enfin il s'agit d'une émission sur la vie d'un savant ou un livre. Chacune de ses émissions devant commencer à partir de septembre prochain doit durer 52 minutes, selon les propos du ministre. A ce plan s'ajoute la création d'un site Internet et un numéro vert pour répondre aux questions des citoyens. Cela dit, dans une deuxième réponse, M. Taoufiq a fait part de l'application dans l'immédiat de plusieurs mesures, dont en premier lieu l'interdiction de l'usage des mosquées dans toute action de propagande partisane et la nécessité de mettre fin à la sédition ( fitna) doctrinale au sein des mosquées, comme c'est le cas pour les autres formes de sédition que connaisse l'ensemble des lieux publics. L'Etat doit veiller, à ce sujet, à la compatibilité du discours religieux dans les mosquées avec les options démocratiques et modernes du Maroc et les principes universels qui ne sont pas en contradiction avec les préceptes de la religion. Dans le même ordre, il est question de veiller à la modération du discours religieux et son adaptabilité avec les spécificités du Maroc, sans toucher à ses valeurs constantes. Dans ce cadre, il est également question de coordonner avec d'autres ministères pour apporter des réformes profondes sur l'enseignement de la religion. Il est également nécessaire de mobiliser la science théologique légale et les ouléma en faveur des grandes options du Maroc, et d'élever le niveau de formation des prédicateurs. Une véritable opération de «nettoyage» de la topographie des mosquées s'impose. Aussi, il est impératif de réglementer la promulgation de la «fatwa»; et ce, sachant que la charge de son approbation relève de la compétence du Commandeur des croyants. Car, l'Islam est de surcroît appelé à servir dans la lutte contre les autres doctrines pour combler un vide dans ce domaine. Enfin, pour réussir ce projet, une restructuration du champ religieux est nécessaire. La création d'une direction de gestion des mosquées s'inscrit dans l'ordre de cette stratégie.