Le directeur de la chaîne satellitaire Al-Jazira du Qatar, Mohamed Jassem Al-Ali, a été limogé à la suite d'accusations faisant état de sa collaboration avec les services de renseignements du président irakien déchu, Saddam Hussein. Les autorités conquérantes en Irak fouillent les archives des services secrets de l'ancien pouvoir. Ils sont une petite armée à déchiffrer, décoder, ordonner, recouper, répertorier, ranger. Tout est maintenu secret ! Mais cette découverte est si inespérée qu'elle a été rendue publique. Il s'agit de trois barbouzes, au service de Saddam Hussein, qui auraient infiltré la chaîne d'information satellitaire Al-Jazira. L'un d'eux n'est plus ni moins que le directeur général de cette chaîne. Mohamed Jassem Al-Ali a occupé ce poste depuis le lancement de la chaîne en 1996. L'information de la collaboration de journalistes d'Al-Jazira avec les services de renseignements du président irakien déchu a été déjà diffusée par l'hebdomadaire britannique «Sunday Times», dans son édition du 11 mai. Mais seuls les pseudonymes des collaborateurs ont été mentionnés. Le directeur de la chaîne aurait été surnommé Al-Jazira2. Ce dernier a nié l'existence d'un quelconque lien entre Al-Jazira et Saddam Hussein lors d'un entretien diffusé sur la chaîne anglaise, BBC, le mercredi 21 mai. Mais depuis cette date-là, les choses ont bien évolué. Le chef du Congrès national irakien (CNI) Ahmed Chalabi, soutenu par les Etats-Unis, a en effet accusé plusieurs journalistes d'Al-Jazira de collaborer avec des agences irakiennes. Il étayait ses accusations par des documents trouvés dans les archives de l'Etat à Bagdad. Et puis, le conseil d'administration de la chaîne établie au Qatar s'est réuni, lundi dernier, et a démis de ses fonctions Mohamed Jassem Al-Ali. Deux jours avant son limogeage, ce dernier semblait parfaitement informé de cette décision. Il ne répondait plus au téléphone, rapporte le quotidien «Achark Al Awsat» dans son édition du 28 mai. La décision de son limogeage a été confirmée par Djihad Ballout, porte-parole de la chaîne, à plusieurs agences de presse. Mais il nie catégoriquement le fait que cette décision ait été prise en raison des accointances de Mohamed Jassem Al-Ali avec les services secrets de Saddam Hussein. «Diverses raisons expliquent ces changements et le fait que Mohammed Djassem al-Ali reste au conseil montre bien que toutes ces rumeurs et allégations sur Al-Djazira ne sont pas prises au sérieux», explique-t-il à Reuters. Les autres employés de la chaîne qui ont osé commenter le limogeage de Mohammed Djassem al-Ali emboîtent le pas au porte-parole de la chaîne. Ils nient un quelconque lien entre l'ex-directeur et les «rumeurs» circulant à son compte. Comment peuvent-ils faire autrement ? C'est toute la crédibilité de la chaîne qui est mise en cause dans le cas où Mohamed Jassem Al-Ali s'avèrerait à la fois informateur et directeur de l'information. Le porte-parole de la chaîne a expliqué que le traitement fait par la chaîne de la guerre en Irak a été critiqué par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Ces deux pays n'ont pas apprécié que des images de leurs soldats tués ou capturés soient diffusées. Al-Jazira est devenue un instrument de pouvoir entre les mains d'un minuscule pays appelé Qatar. Ses journalistes traitent souvent l'information avec un sentiment exacerbé de panarabisme. Al-Jazira n'a pas été de surcroît toujours juste dans la couverture qu'elle fait des événements au Maroc. La cérémonie œcuménique, à la cathédrale de Rabat après les attentats du 11 septembre, y a été critiquée. La marche de plus d'un million de Marocains contre les attentats de Casablanca a été à peine mentionnée. Que les dirigeants de cette chaîne roulent pour un pays ou plusieurs, il ne fallait pas les accusations de Londres et de Washington pour s'en rendre compte.