De plus en plus de jeunes marocains, armés de leurs diplômes d'ingénieurs et de leur maîtrise de langues étrangères, décident de partir travailler sous d'autres cieux, au grand daim d'un Maroc qui manque de compétences. Paradoxalement, c'est au moment où le pays a le plus besoin de ressources humaines qualifiées et où les opérateurs économiques déplorent le manque en compétences et en profils pointus, que plusieurs milliers de jeunes ingénieurs marocains n'ont d'yeux que pour des pays étrangers où ils pourraient s'épanouir professionnellement. De quoi enfoncer le clou d'un phénomène entamé dans les années 1960 : la fuite des cerveaux. Hautement qualifiés et maîtrisant, pour la plupart, deux langues étrangères, il s'agit de recrues de choix pour les laboratoires, les centres de recherches et les entreprises européennes et nord-américaines. Les principales destinations sont l'Allemagne, qui a lancé une campagne tambours battants pour recruter 10 000 informaticiens, dont une bonne partie de Marocains et le Canada, essentiellement le Québec. Quelque 60 000 marocains ont choisi de vivre sous les cieux certes plus maussades mais nettement plus prometteurs de ce pays. Plus de 40% de ces immigrés disposent d'une scolarité de niveau universitaire. Un bon nombre d'entre eux est constitués d'ingénieurs. Leur particularité est qu'ils ont été formés majoritairement au Maroc. Le Maroc est également pourvoyeur de compétences pour d'autres pays comme les Etats-Unis, pays dont 30% des détenteurs de PHD sont nés à l'étranger (Foreign-born), mais aussi la France, pays d'accueil mais tremplin par excellence pour d'autres destinations. Champ de prédilection de plus d'une structure et où le Maroc se place comme pays « producteur » de compétences, les NTI s'accaparent la part du lion de cette tendance. Les différents établissements de formation forment un peu plus de 2.500 lauréats dans les domaines liés aux NTI. Le chiffre n'est pas énorme. Il l'est moins quand on sait que pas tous ceux qui sont formés travaillent au Maroc; c'est qu'il y a péril en la demeure. Les besoins en ingénieurs informaticiens et en télécoms des pays du Nord, pour faire face à l'essor de la net économie, les poussent à puiser dans les ressources - déjà rares - des pays du Sud. Même si la tendance est à la baisse actuellement, le constat est toujours de mise. La question à se poser est relative au pourquoi de ces départs. 2% seulement des ingénieurs marocains s'investissent dans la création d'entreprises, alors qu'ils devraient être le fer de lance de l'innovation et de la création. Les obstacles que rencontrent les jeunes promoteurs ingénieurs dans leurs projets industriels peuvent être classés comme suit: le local, les études technique et financière, le coût élevé des équipements, la formation insuffisante en gestion, la réalisation de prototype. Autre donne, plus dramatique cette fois : 1 ingénieur sur 6 est en chômage au Maroc, pour inadéquation entre la formation et les besoins du marché du travail. Si à cela on oppose les offres on ne peut plus alléchantes que les ingénieurs reçoivent d'ailleurs (rémunérations supérieures, différentiel dans les taux de croissance, sécurité de l'emploi, milieu de recherche stimulent, subventions…), la réponse ne semble pas très difficile à trouver.