Le projet de loi sur le capital-risque est loin de fédérer l'ensemble de la profession. «L'ingérence» de l'autorité de tutelle, du CDVM ainsi qu'un risque de conflit de compétences sont décriés. Les professionnels n'envisagent pas de se mettre sous la tutelle d'une loi qui menace leurs intérêts. Attendu depuis la prolifération d'Organismes de Placement en Capital Risque (OPCR), communément appelés «capital-risqueurs», le projet de loi visant la professionnalisation du métier est loin de faire l'unanimité. Les professionnels concernés misent sur son passage devant le Parlement pour l'amender. Ils ne voient pas d'un bon oeil un certain nombre de mesures instaurées par la nouvelle loi. Ils brandissent même la menace de ne pas se maître sous la coupe de cette nouvelle loi, préférant de la sorte garder leurs statuts actuels, généralement sous la forme juridique de Sociétés Anonymes. En tête des oppositions, vient la désignation du CDVM comme autorité de contrôle…qui percevra, d'ailleurs, une rémunération annuelle d'un pour mille (1/1000) de la situation nette de l'OPCR. «Le CDVM a pour mission de protéger l'épargne investie en valeurs mobilières, par le contrôle de l'information fournie par les personnes morales faisant appel public à l'épargne. Or, cela n'est systématiquement pas notre cas», explique un capital-risqueur. Les manques de précisions concernant les incitations fiscales au bénéfice des sociétés de gestion et des PME faisant appel à un financement en capital-risque sont également décriés. Le manque de précisions relatives aux encouragements fiscaux devant accompagner l'accès à ce financement n'est pas de nature à favoriser le recours aux ressources du secteur. «À risque supérieur, doivent impérativement correspondre des avantages conséquents. C'est une règle d'usage de par le monde», déclare un autre responsable de fonds, avec une solide expérience à l'international. Toutefois, la mesure la plus controversée est l'ouverture de la levée des fonds aux sociétés de gestion, sous réserve qu'elles soient agréées par le CDVM. «L'article 19 du titre III n'instaure pas de distinction entre les OPCR à fonds privés et ceux qui ont fait appel à l'épargne publique. Ce manquement est, à mon avis, risqué et incompatible avec la vocation des deux métiers», précise notre interlocuteur. Pour lui, la tentation d'un gestionnaire, coiffant les deux fonctions (gestionnaire de fonds et capital-risqueur) de spéculer sur le marché serait grande. Un conflit d'intérêts pourrait se poser. «En plus de l'aspect rémunération, fixé généralement à 2,5% du montant du fonds grâce à son mandat alors qu'il ne prend pas de risque», ajout-il. Dans sa formulation actuelle, le projet de loi impose, généralement, des contraintes supplémentaires aux structures actuelles : une mise en conformité des statuts serait obligatoire, la désignation ou la création d'une société de gestion indispensable, de reporting réguliers au CDVM…en plus des frais d'exploitation qui vont augmenter par le paiement d'une commission. Cependant, s'il y a un point qui risque de rester en suspens, c'est bien la délimitation du champ d'activité. En effet, l'esprit de la loi vise à inciter les OPCR à investir plus de 50 % de leur situation nette dans le nom côté. Plus précisément, dans la PME au sens de la loi 5036 du 5-09-2002. «La définition même de PME au sens de l'article 1er du titre I de la loi restreint fortement l'éventail des cibles des OPCR», fait remarquer un analyste. Selon cette loi, est considérée comme PME, toute société totalisant un bilan inférieur à 50 millions de DH, avec un effectif inférieur à 200 personnes et un chiffre d'affaires de moins de 75 millions de DH. «Actuellement, la majorité des sociétés figurant au portefeuille des capital-risqueurs en place ne remplissent pas ces critères. Que se soit en nombre ou en volume, les deales à venir risquent de ne pas correspondre à ce mode de financement…À moins que cela ait été taillé sur mesure, comme se risquent à le signaler certains risque-tout !