Gabon. Brice Oligui Nguema candidat à la présidence    La Sierra Léone annonce sa première Fashion Week    Le Projet « Culture Mali 2025 » lancé    Albares: La position de Madrid sur le Sahara est partagée par les pays de l'UE    Bourse de Casablanca : ouverture en bonne mine    Peine de mort en Iran. Un mercredi noir    LdC/8es : Real Madrid-Atlético Madrid, le derby alléchant à l'affiche ce mardi    MAS : Le coach allemand Stepić signe son contrat et définit son staff technique    Real Madrid : Brahim Diaz élu joueur du mois de février    Fès : Le festival des musiques sacrées sous le signe des « Renaissances »    Maroc : le déficit commercial augmente de 13,3% à fin janvier    Donald Trump confirme l'application mardi de taxes douanières contre Ottawa, Mexico et Pékin    Les températures attendues ce mardi 4 mars 2025    Fès-Meknès: Plus d'un milliard de DH pour la création d'un pôle des sciences de santé    Après l'annulation de l'Aïd, les éleveurs face aux mesures d'accompagnement    Le Maroc et l'Albanie soulignent l'importance de la coopération parlementaire dans la défense des intérêts communs    Figuig : Les habitants et la Coalition s'opposent à la "privatisation" de la gestion de l'eau    Les couleurs du ciel du mardi 4 mars    Allemagne : Une voiture fonce dans la foule et tue une personne à Mannheim    Parution : Abdeljalil Lahjomri repeint le passé pour mieux écrire l'avenir    Prix du Livre Sheikh Zayed : Trois œuvres marocaines en finale    Célébration et valorisation du métier de guide touristique à Ouarzazate    Maroc : A l'approche de l'aïd, le gouvernement questionné sur le soutien aux éleveurs    Exclusif / Tennis / Pour le prochain Grand Prix Hassan II : L'Italien Lorenzo Musetti en chef de file !    Le ministre des Affaires étrangères espagnol : Le Maroc est un partenaire fiable pour relever de grands défis, et notre partenariat avec lui est stratégique    Une quarantaine de pays réaffirment à Genève leur soutien à la souveraineté du Maroc sur son Sahara    L'Espagnol Cox affiche une forte progression de en 2024 grâce à ses activités au Maroc    Pour accompagner sa production marocaine, le Chinois Sentury Tire inaugure un siège nord-américain XXL    Moroccan activist Fouad Abdelmoumni sentenced to 6 months for Macron visit remarks    Ramadan : Moulay El Hassan et Lalla Khadija ont lancé la campagne de solidarité    Alerta meteorológica: nevadas y fuertes lluvias en varias provincias de Marruecos    Affaire Hicham Jerando : le Parquet livre les tenants et aboutissants    Armement : Les FAR réceptionnent les premiers hélicoptères Apache venus des Etats-Unis    Le Maroc cherche à acquérir deux sous-marins modernes au milieu d'une concurrence franco-allemande    Maroc : Fitch Solutions prévoit une croissance de 5%    Ramadan-Télé : Les chaînes nationales dominent le prime time    Cercles vicieux, plumes audacieuses : Serghini et Labied au corps à corps    Tennis. Le Maroc brille en Afrique    Plus de 45 000 participants au Marathon de Tel-Aviv, présence marocaine remarquée    Olivier. Des rendements en hausse avec Al Moutmir    Entre le Maroc et la Belgique, Chemsdine Talbi a fait son choix    Ramadan : Retour du débat de la «Pause Naturelle» dans le football pro    Université Al-Qods : L'Agence Bayt Mal Al-Qods lance la Chaire des études marocaines    Paris va présenter à Alger une liste de « plusieurs centaines de personnes » aux profils « dangereux »    Zone euro : L'inflation baisse à 2,4% en février    Edito. En toute humilité…    Culture : Akhannouch inaugure le Musée de la reconstruction d'Agadir    Oscars : "Anora" meilleur film, et Adrien Brody meilleur acteur pour la deuxième fois    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



L'autobiographie en deuil
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 17 - 11 - 2003

L'écrivain marocain Mohamed Choukri est mort samedi en début d'après-midi à l'Hôpital militaire de Rabat, des suites d'une longue maladie. Son premier livre “Le pain nu“ a révolutionné les autobiographies écrites en arabe. Auteur subversif, Choukri était la dernière grande figure du Tanger mythique des écrivains.
«Ma seule façon d'exister en tant qu'homme consiste à écrire ». L'homme qui a tenu ces propos est biologiquement mort. Écrivain authentique, en ce sens où il n'établissait pas de frontière entre sa vie réelle et l'objet de sa littérature, Mohamed Choukri a marqué l'écriture autobiographique en langue arabe. Dans son premier livre “Le pain nu“ (1973), il a fait le pari de tout dire. Un pari fou, presque impossible à tenir en littérature. Parce que derrière toute confession, il y a l'espoir d'une absolution, et que les choses les moins avouables ne doivent pas rendre leur auteur antipathique aux lecteurs. Choukri a pourtant fait des révélations honteuses. Il n'a pas trempé le bout de son doigt dans les eaux de l'écriture : il a mis la main à la pâte. Quand il l'a sortie, il lui est resté un peu des eaux impures de la littérature entre ses doigts. Cet écrivain entier a compris au premier essai qu'il n'existe pas de littérature valable sans une bonne dose de soufre et de politiquement très incorrect. Autodidacte, il n'a appris à lire et à écrire qu'à l'âge de 21 ans.
Né à Béni Chiker (près de Nador) en 1935, Mohamed Choukri s'est rendu à Tanger, âgé à peine de 7 ans. Il y a découvert le monde qu'il a partagé sans complaisance avec ses lecteurs dans “Le pain nu“. L'autodidacte a été souvent considéré comme l'auteur d'un seul livre. « J'ai essayé de l'assassiner, à maintes reprises, en publiant d'autres écrits, mais il n'a pas voulu mourir. J'ai essayé de le tuer par des livres d'une meilleure qualité ! Et j'estime avoir écrit des livres supérieurs au “Pain nu“. “Le temps des erreurs“ et “Visages“ sont meilleurs, mais je n'ai pas réussi à l'enterrer !», avait-il déclaré dans un entretien à ALM. La renommée littéraire de ce livre, traduit en 37 langues, n'a de comparable que les soucis qu'il amènera à son auteur. Ce livre a été en effet interdit par le ministère de l'Intérieur en 1983. La version en arabe n'est autorisée de vente que depuis 2001. Le journal du PJD, “Attajdid“, s'est élevé en février 2003 contre la traduction en amazighe du bouquin. Raison : livre sulfureux et amoral. Ce à quoi avait répondu l'auteur : «ils ont leur idéologie et moi j'ai ma littérature. La littérature ne peut absolument pas se résoudre à la morale, autrement il va falloir brûler la moitié des livres de l'humanité. Je peux à peine imaginer notre monde sans Baudelaire, Lautréamont, Rimbaud ou Henry Miller».
Mohamed Choukri n'est pas seulement l'auteur du “Pain nu“. Il a écrit “Le temps des erreurs “, “Majnûn al-ward“, “Al-khayma“, “Al-sûq al-dâkhilî“, “Jean Genet fî Tanja“, “Tennessee Williams fî Tanja“ et d'autres écrits encore. Attaché très profondément à la littérature, l'intéressé avait développé un discours construit et savant sur sa pratique. Les amitiés qu'il a liées avec les plus grands l'ont sans doute réconforté dans la pratique de son art. Paul Bowles, Tennesse Williams, Jean Genet, William Burroughs, Allan Ginsberg, Brian Gysin étaient très proches de Mohamed Choukri.
Écrivain peu prodigue, Mohamed Choukri n'a rien écrit pendant 19 ans, de 1973 à 1992. Dégoûté par le refus des éditeurs et convaincu qu'un homme de lettres doit s'arrêter d'écrire quand il n'a rien à dire, il a noyé son chagrin dans les plaisirs de la chair, les bars et la boisson. Mohamed Choukri a raconté tout cela dans “Le temps des erreurs“, où il avait considéré que se dépenser dans la vie n'est rien, si cette dépense ne trouvait pas son aboutissement logique dans un livre. Homme d'une grande rigueur au niveau de la conversation, il faisait partie des écrivains qui ont fait le mythe du Tanger des hommes de lettres. Sa mort laissera orphelins ceux qui ont pris l'habitude de le voir au Ritz, au “Négresco“. Les conversations qu'il y tenait et qui ressemblaient à un salon littéraire, au sens noble et tonique de l'expression, seront désormais prolongées par le biais des livres. Un homme qui ne vit que pour écrire sa vie ne meurt jamais.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.