Après son interview exclusive à l'hebdomadaire «La Gazette du Maroc», le Général Khaled Nezzar a confirmé que l'Algérie n'a pas besoin d'un autre Etat à ses frontières. Du coup le Polisario et ses derniers commanditaires à Alger savent que l'affaire est entendue. Ils multiplient les attaques contre le Général, par voie de presse téléguidée. Le Polisario crie au complot et à la traîtrise. Le Maghreb, quant à lui, a besoin de paix. La société civile marocaine s'intéresse à l'affaire du Sahara. Emmené par Abdelali Benamour et Noureddine Ayouch, un groupe de personnalités, qui s'est donné pour nom “collectif Sahara-Maghreb“ a élaboré une plate-forme sur la question et entend organiser une conférence de presse les 18,19 et 20 avril 2003 à Casablanca sous le thème : “ construction maghrébine et résolution des conflits régionaux“. La démarche de ce collectif se veut une “contribution“ qui met en avant trois principes de base comme préalable à toute solution : la démocratie dans le sens universel du terme, la recherche des voies les plus appropriées pour le développement économique et social de la région et la résolution du conflit saharien dans une optique “gagnant-gagnant“. Les auteurs de ce projet ambitieux reprennent un certain nombre d'idées et d'arguments qui avaient été avancés par le Maroc pour sortir du conflit factice du Sahara. Globalement, les membres du collectif pensent que l'intégration maghrébine passe obligatoirement par le règlement de ce problème dans le sens de “ni vainqueur ni vaincu“. Défendue par le Maroc et appuyée par les puissances du conseil de sécurité, cette option consiste à doter le Sahara d'une autonomie dans le cadre de la souveraineté marocaine. Alger, qui a combattu ce compromis depuis qu'il a été proposé par Rabat, va-t-elle finalement revoir sa position ? En tout cas, l'interview accordé récemment par le général algérien à la retraite, Khaled Nezzar, à l'hebdomadaire “ La Gazette du Maroc“ laisserait croire à un changement dans l'approche algérienne du problème du Sahara. L'ex-ministre algérien de la Défense a expliqué que son pays n'a pas besoin d'un nouvel État à ses frontières. Voilà qui a le mérite d'être clair. Les propos du général sont intervenus juste après la visite de Jacques Chirac à Alger. Dans un discours devant les députés algériens, le président français a appelé à un rapprochement entre le Maroc et l'Algérie. “La construction d'une aire de prospérité partagée en Méditerranée prendra tout son sens et toute sa portée si progresse, dans le même temps l'intégration du Maghreb“, a-t-il déclaré, ajoutant que cela “suppose le renforcement du dialogue“ entre les deux parties qu'il a jugé “fondamental“ pour l'intégration maghrébine. Avec les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France soutient la solution d'autonomie des provinces sahariennes dans un cadre marocain. Or, les propos de Khaled Nezzar ne sont pas passés inaperçus en Algérie. Bien au contraire. Ils ont suscité une grosse polémique dans certains journaux locaux qui ont qualifié les déclarations de l'intéressé de “graves“. Cependant, aucune réaction officielle du pouvoir algérien à la sortie de M. Nezzar n'est venue clarifier la situation. Ce qui n'a fait qu'ajouter au désarroi des milieux hostiles à un règlement juste et équitable de la question du Sahara. Dans son édition du mercredi 12 mars, Le Soir d'Algérie est allé même jusqu'à affirmer que cette affaire “relève (…) de la sécurité nationale et qu'elle ne saurait de ce fait “être traitée avec légèreté“. Et l'auteur de l'article de se lancer dans une pseudo-analyse de la géostratégie régionale pour conclure que le Royaume cherche la “restauration“ de l'ancien “empire chérifien“ dans ses frontières “authentiques“. Le Maroc de nouveau accusé des pires intentions pour empêcher toute issue à une crise factice vieille de plus de 25 ans. Or, à la faveur du changement de la donne internationale (chute du mur de Berlin, mondialisation rampante, constitution des grands ensembles régionaux…), ce problème est devenu anachronique et contre-productif. C'est tout le développement du Maghreb qui s'en trouve compromis alors que les pays de la zone ont tout intérêt à se constituer en bloc homogène et solidaire face à l'Union européenne. Que de temps perdu, que d'espoirs crevés ! En un mot, l'Algérie n'a rien à gagner en continuant à maintenir contre toute logique la tension dans la région par son soutien à une “cause“ qui n'en a jamais été une. L'entêtement d'Alger à soutenir le Polisario après l'avoir fabriqué de toutes pièces n'a conduit qu'à une situation de blocage préjudiciable à tous. Les véritables enjeux sont ailleurs. Ils se situent dans la capacité des dirigeants des États maghrébins à se projeter dans l'avenir et à dépasser leurs querelles. Les propos de Khaled Nezzar, eux, relaient une certaine idée du Maghreb et sa place dans le monde.