Les indicateurs économiques sont très mitigés en termes de recettes, d'investissements et de rythme de croissance. Les conséquences d'une guerre probable se feront sentir notamment dans le secteur du tourisme et sur la facture énergétique. La seule nouvelle optimiste est la perspective d'une bonne saison agricole. «Situation économique du Maroc et réformes au sein du ministère des Finances et de la privatisation». Tels sont les deux thèmes développés par le ministre des Finances et de la privatisation, Fathallah Oualalou, lors de la conférence de presse organisée mardi dernier au sein de ce département. Un rendez-vous annuel où le ministre n'a pas manqué, au premier abord, d'exprimer ses condoléances aux représentants de la presse marocaine, suite au décès des deux figures journalistiques nationales : Mimoun Habrich, «un compagnon de route» et Assou Massou, l'ancien directeur de la publication de la Vie économique. L'intervention du ministre se voulait par ailleurs rassurante, chiffres à l'appui. Il en ressort qu'après une année 2001, où le pays avait réalisé des performances économiques «satisfaisantes », l'année 2003 sera celle de la consolidation. Une croissance de 4,5%, un excédent de compte courant de la balance des paiement de près de 3% du PIB et un déficit des finances publiques, hors privatisation, ramené à 4.7% et une inflation maintenue à un niveau inférieur à 3% ont été enregistrés en 2002. Succédant à une année 2001 «exceptionnelle» en performances économiques, «on peut considérer que notre pays dispose d'un cadre macro-économique sain qui le prédispose à accélérer le rythme de la croissance», s'est félicité M. Oualalou. Selon lui, cette évolution découle principalement des recettes fiscales. Les recettes ordinaires, hors produit de la privatisation, ont enregistré une hausse par rapport à l'exercice précédent de 3 % et une plus-value par rapport aux prévisions de la loi de finances de près de 800 millions de DH. Cette «performance» est à mettre également sur le compte de la réduction du déficit commercial qui s'est établi à 42,9 milliards de DH contre 44,1 milliards en 2001 et du maintien des transferts des MRE, établi à plus de 35 milliards, avec une régression ne dépassant pas 4,5% par rapport à l'année record 2001. «Ce qui est positif également, c'est la valeur ajoutée non-agricole. On va vers une autonomisation de l'économie marocaine par rapport à l'agriculture, la locomotive étant l'émergence de nouveaux secteurs comme le BTP, avec une consommation du ciment qui est en hausse de 6.8%, et le secteur manufacturier -Métallurgie de base, matériel électrique…- ainsi que l'augmentation de la demande du marché national», précise le ministre. Quant aux échanges extérieurs, l'analyse du ministre est allée dans le sens d'une augmentation des exportations de 5,3%, notamment dans les produits manufacturés comme les composantes électroniques et le fils de câbles pour l'électricité qui contribuent pour 44% dans cette augmentation. Un rythme d'accroissement jugé deux fois plus élevé que celui des importations, qui concernent essentiellement les biens d'équipement, produits bruts et les demi-produits, dont la progression n'est que de 2,5%. Concernant l'investissement public, le ministre a affirmé que «le gouvernement a tenu ses engagements». Les dépenses d'investissement se sont chiffrées à 20,3 milliards de DH, en augmentation de 1,6 milliard par rapport aux prévisions du budget 2002. La situation des charges ressources du Trésor dégage un déficit budgétaire de 19,2 milliards de DH comparativement aux 24 milliards prévus dans la loi de finances 2002. Les données provisoires au titre de l'exercice 2002 font apparaître une baisse de stock de la dette totale rapporté au PIB à près de 70% contre 75 en 2001. Facteurs de cette détente : «la poursuite de la gestion active de la dette extérieure et a modernisation de la dette intérieure». Le mot d'ordre est donc celui de la satisfaction. Même si la donne risque de changer pour cette année. D'après M. Oualalou, deux éléments peuvent modifier les prévisions figurant dans la loi de finance 2003. Il s'agit, d'une part de la bonne pluviométrie qui augure d'une croissance de 5,5% du PIB et une hausse de 12,3% de la valeur ajoutée du secteur primaire qui pourrait atteindre 24 milliards de DH. D'autre part, il y a le risque de guerre contre l'Irak qui entraînera fatalement une hausse des prix de pétrole et par là une hausse de la facture énergétique, un ralentissement des exportations et, cela va de soi, un recul des recettes touristiques. Il reste à prier que guerre il n'y aura pas, selon les propos du ministre. Le ministre a également fait état de dix chantiers en cours de réalisation ou en préparation. Il s'agit du programme d'ajustement des télécoms, notamment la poste, la réforme du secteur financier, de l'habitat et de l'administration. Ils concernent aussi l'ajustement des secteurs de la santé et de l'eau, la poursuite des privatisations et la modernisation de la législation du travail. Sans oublier l'accélération de la mise à niveau de l'économie. Des programmes qui sont financés en grande partie par des instances internationales, dont la Commission européenne. Dans le volet des privatisations en cours, le ministre a déclaré que celle de la Régie des tabacs est attendue pour le deuxième trimestre 2003. Celle de la Royal Air Maroc et l'ouverture supplémentaire du capital Maroc Telecom n'ont pu avoir lieu à cause de la conjoncture internationale jugée défavorable. Quant à l'éventualité d'un retrait de Vivendi Universal du capital de Maroc Telecom, M. Oualaou s'est contenté de dire que l'opérateur historique était une affaire trop gagnante pour être cédé et qu'il n'existait aucun rapport entre le malaise que traverse le groupe français et ses activités au Maroc. Ce qui aura par excellence marqué cette conférence reste le ton on ne peut optimiste adopté par le ministre, même si plus d'une réalité économique du pays ne s'y prête pas et même si les réformes de certains secteurs se font toujours attendre alors que les échéances à venir ne pardonnent pas. Venant d'un ministre qui a déclaré que «time is money», cet optimisme est d'autant plus étonnant.