Entretien avec Mohamed Maarouf, directeur général de BTI Bank ALM : Quel bilan faites-vous un an et demi après le démarrage de votre activité ? Mohamed Maarouf : Le bilan de l'activité participative après presque 18 mois de lancement s'avère très positif. Suite à l'annonce de BAM, les banques participatives de la place ont atteint en janvier 2019 en financement Mourabaha presque 4,85 milliards de dirhams contre 4,58 milliards à fin décembre 2018, ce qui représente plus de 10% des financements octroyés sur la même période et sur la place bancaire en général. C'est dire que l'activité participative prend place petit à petit dans le marché marocain. Rappelons que l'écosystème participatif est encore limité par le retard de la mise en place de l'assurance Takaful. Le projet de loi amendant le code des assurances et introduisant Takaful venant d'être adopté à l'unanimité par la Chambre des représentants. Elle est ainsi prévue pour le troisième trimestre 2019. L'autre obstacle de taille réside dans l'offre de produits participatifs qui ne comprend pour le moment que la Mourabaha Immobilière, automobile et équipement. Globalement, les performances du marché participatif sont satisfaisantes, mais peuvent être boostées davantage avec l'avènement de nouvelles offres de produits conformes à la charia, que ce soit en financement, assurance ou en produits du marché des capitaux. Comment la clientèle a-t-elle accueilli l'offre des banques participatives ? Le client marocain, que ce soit le particulier ou même l'entreprise, était dans l'expectative d'une offre participative, et ce, depuis assez longtemps. Le lancement des banques participatives a, pour sa part, attisé l'envie du marché à essayer de nouveaux produits qui viennent compléter le toporama financier marocain. Après le lancement des offres de produits des banques et fenêtres participatives, certaines idées préconçues et pour la majorité erronées sur le produit participatif ont été corrigées, ce qui a permis une forte demande pour les financements particulièrement la Mourabaha Immobilière et automobile. Il est à noter que les banques participatives devaient présenter une offre répondant aux besoins des clients d'un point de vue Shariaa tout en préservant sa compétitivité financière ; car en effet le «coût» du financement reste un élément déterminant dans le choix de financement pour une majorité des clients. Aujourd'hui nous sommes en face d'une clientèle qui a pris goût et qui demande une diversification de produits. Nos clients sont dans l'attente de la Ijara, le Salam et l'Istisna'a. Nous sommes contents car les efforts de formation et d'information du client, en plus de l'adéquation de l'offre aux attentes des clients, ont fait que le marché est plus que prêt à recevoir les nouvelles solutions participatives. La culture est en mutation et ça nous réjouit. Qu'en est-il du développement du réseau de distribution et de la digitalisation des services de BTI Bank ? Quelle opportunité représente le digital pour les banques ? Aujourd'hui, les tendances mondiales sont orientées vers le digital et les canaux alternatifs. BTI Bank a fait le choix stratégique de continuer sur sa démarche d'expansion du réseau d'agence classiques et de proximité avec ses clients à travers une présence physique dans certaines régions du Royaume, mais nous comptons nous appuyer fortement sur le digital pour renforcer notre présence auprès de nos clients et prospects à travers l'omnicanal. L'idée est que le digital prenne le relais pour servir un plus grand nombre de clients, toucher de nouveaux segments, avec un élargissement des plages horaires de service et offrir une meilleure flexibilité dans la gestion de la relation. Le comportement de nos clients est en constante mutation, mais ce qu'ils demandent par-dessus tout c'est une agilité, une célérité et une qualité de service de la part de leur banque. Je crois que c'est une opportunité extraordinaire pour les banques participatives de la place, qui ont eu la chance de mettre en place des systèmes d'information nouveaux, de capitaliser sur le digital pour être à même de répondre à ces besoins. Il reste entendu que le contact physique avec le chargé de la relation demeure une attente constante de certaines catégories de clients, d'où la nécessité de garder également des agences physiques. Mais est- ce qu'il nécessaire d'aller vers des réseaux d'agences aussi étoffés que ceux des banques conventionnelles actuellement ? En tous cas ce n'est pas le choix qu'a fait BTI Bank. Quelles perspectives pour 2019 ? Nous sommes certains que la finance participative au Maroc progressera d'une manière positive dans les années à venir. Le marché marocain a prouvé son appétence pour les financements à travers la Mourabaha et d'autres nouveaux produits participatifs. Le potentiel est important et permettra de consolider notre position en tant que relais de financement complémentaire à l'offre conventionnelle. Mais il convient de signaler que plusieurs efforts devront encore être déployés afin d'élargir le champ de l'éducation et de l'information sur les nouveaux mécanismes participatifs. Des actions de communication devront également être mises en place pour promouvoir davantage nos solutions de financements. Le développement en continu de l'offre devra être préservé afin de pouvoir répondre aux différents besoins du marché actuel et futur. Dans ce sens, les parties prenantes dans le développement du marché participatif doivent être plus réactives pour accompagner la demande. Avec les dépôts d'investissement, la Takaful et le Salam, tous prévus pour 2019, une bouffée d'air sera injectée dans l'écosystème participatif. Quel est le chantier prioritaire pour compléter l'écosystème des finances participatives ? L'écosystème participatif au Maroc est en progression certes, mais son rythme reste à améliorer. Le lancement des financements participatifs, et particulièrement le financement Mourabaha, étaient attendus depuis longtemps par les Marocains. Néanmoins, pour les professionnels, et afin de pouvoir répondre au mieux à la demande des clients, l'assurance Takaful reste le chantier prioritaire suivie par les outils du marché interbancaire conforme à la chariaa. Bien entendu les dépôts d'investissement, la Ijara, la Salam et Istisna'a sont tous des produits à finaliser dans les plus brefs délais pour le plus grand plaisir de nos clients particuliers mais aussi entreprises. Par Leila Zerour et Leila Ouchagour