Opérationnelles depuis près de deux ans Un démarrage réussi Au moment où les nouvelles banques de la place dressent leurs premiers bilans opérationnels, les chiffres collectés par la banque centrale parlent d'un encours de 2,4 milliards de dirhams distribués et environ 50.000 comptes ouverts. Cela dénote l'intérêt que portent les Marocains à ce genre de produits bancaires et par conséquent la réussite de cette industrie en seulement quelques mois de son lancement. Ce succès revient en premier à la vision éclairée de la banque centrale de lancer d'un seul coup 8 acteurs. «Ceci pourrait sembler aberrant au départ mais a permis de créer une compétitivité saine au profit du consommateur et du secteur mais surtout cela a permis de créer un secteur qui a une présence significative laquelle permettrait d'avoir un impact sur les décisions et visions stratégiques du pays», explique dans ce sens Mohammed Maarouf. Elles sont en effet 5 banques et 3 fenêtres à avoir pris le défi de lancer cette activité. Pour un lancement, les nouveaux acteurs ont commencé par la commercialisation de la Mourabaha qui a connu un grand engouement, notamment sous sa déclinaison immobilière. Ce produit existe également pour le financement automobile et équipement et ce dans l'attente d'élargir la gamme de produits à de nouveaux instruments. Les professionnels du secteur s'accordent à dire que le Maroc est en train de construire sereinement et durablement ce secteur. «Nous sommes en train d'écrire les pages de cette finance au Maroc. Construire une nouvelle industrie ne se fait pas avec une seule main. Il fallait tout un écosystème à initier et embarqué avec nous pour relever ce défi», apprend-on dans ce sens de Abdessamad Issami. La réussite du challenge de la banque participative revient également au fait que les nouvelles entités sont adossées à des banques mères dont l'expertise est averée. Des groupes bancaires à grande notoriété nationale et continentale. On cite à cet effet BMCE Bank of Africa, Attijariwafa bank, la Banque centrale populaire, CIH, Groupe Crédit Agricole du Maroc, ou encore la Société Générale, la BMCI et Crédit du Maroc auxquelles la banque centrale a autorisé l'ouverture de fenêtres participatives. Cet adossement a doté les banques participatives d'une parfaite maîtrise du marché et d'un savoir-faire en termes des métiers supports gestions de risques et logistiques. Des produits bientôt homologués Concrètement seule Mourabaha est actuellement commercialisée par les banques participatives. D'autres produits viendront compléter cette gamme. Si la clientèle est impatiente de voir ces produits lancés, les opérateurs voient cette progressivité comme étant une pratique saine évitant «l'indigestion de ces produits». Il a donc fallu lancer les produits les plus usités par le grand public, entre autres la Mourabaha immobilière pour verrouiller les rouages de cette industrie. Les pronostics tablent sur deux bonnes années pour que la finance participative se dote des produits représentatifs pour chaque segment. C'est à ce moment-là que les banques de la place, priorisant avec le Charia Board et la banque centrale la conception des contrats de place, pourront plancher sur l'innovation individuelle qui leur permettra de se distinguer sur ce marché compétitif. En ce qui concerne les produits à venir, les professionnels s'attendent en premier lieur à l'homologation d'un produit qui permettra de libérer le potentiel de ces banques et avoir une offre beaucoup plus conséquente. On citera dans ce sens les contrats d'investissement qui permettront d'appuyer l'effort de la banque participative dans la collecte des ressources. Il s'agit des dépôts rémunérés « conformes » qui devraient donner un coup d'accélérateur à l'activité des banques participatives. «Nous ne disposons, à ce jour, que des dépôts à vue nécessaires à l'activité courante du client mais ce dernier a également besoin d'avoir des produits d'épargne», explique dans ce sens Fouad Harraz. «Wakala bil Istitmar» figure sur la liste des produits tant attendus par les acteurs pour soulager leur besoin en liquidité. Ce produit accordé par le Conseil supérieur des ouléma se veut un contrat qui permet à la banque conventionnelle de mettre à disposition de la banque participative un montant contre une rémunération qui est indexée sur le rendement de la banque participative. Les travaux sont également en cours pour définir les dipositions du produit «Ijara» qui répondra aux besoins des entreprises. Le document y afférent sera soumis les semaines à venir au CSO pour validation. Dans le pipe figurent également les produits participatifs tels que Moucharaka, Moudaraba et Istisnaa qui apporteront des solutions à la demande d'une clientèle spécifique, notamment les coopératives. Takaful, une urgence cruciale Ils sont tous unanimes sur ce point. Les professionnels de la finance participative attendent impatiemment l'entrée en vigueur de l'assurance Takaful dont l'impact sur les besoins de l'économie, des particuliers et des entreprises n'est plus à démontrer. L'instrument similaire à l'assurance conventionnelle tarde à prendre forme. Le gouverneur de Bank Al-Maghrib avait souligné en marge de la dernière réunion de son conseil d'administration que les choses se finalisent sans pour autant annoncer une date prévisionnelle de ce lancement. D'après les échos recueillis, le projet est en circulation chez les professionnels et sera incessamment présenté au Conseil de gouvernement. Ce flou autour de la promulgation de Takaful peut être expliqué par le challenge que pose la spécificité technique de ce produit ainsi que des exigences charia qui l'accompagnent. Il est question, en effet, d'un nouveau business model complètement différent de l'assurance conventionnelle. Bien que Takaful soit une urgence cruciale, les acteurs du marché participatif n'ont pas attendu son lancement pour commercialiser leurs produits. Ils sont allés à la recherche d'une solution concertée avec les clients dans le respect des engagements de la banque participative vis-à-vis des déposants. En prévision du risque et en l'absence de Takaful, les opérateurs ont fait signer à leurs clients des engagements de souscription à ce produit une fois mis en place. Rappelons que l'une des forces du secteur de la finance participative est l'élan de partage et de solidarité. En cas de difficultés, la banque accompagne son client dans la quête d'une solution qui ne lèse pas les deux parties. Ceci s'illustre par cette notion de « Mouassir » englobant une panoplie de dispositions permettant à la banque de revoir avec son client les modalités de paiement sans revoir les montants afin de les aligner par rapport à l'impact financier de cette personne. Ainsi, si un client est en difficulté la banque se met d'accord avec lui sur un plan de fonctionnement lui permettant de dépasser la période durant laquelle il ne sera pas amené à honorer ses engagements.