Economiste, connaisseur des affaires ivoiriennes, Brahim Rachidi, ex-député USFP, nous livre son point de vue sur la situation de tension qui prévaut depuis quelques mois en Côte d'Ivoire. Entretien. ALM : On a l'impression que les Marocains de la Côte d'Ivoire, pays en proie aux troubles, sont livrés à eux-mêmes. Qu'en pensez-vous ? Brahim Rachidi : Il est vrai que la situation dans ce pays ami est préoccupante. Les commerces de nos concitoyens à Abidjan et à Bouaké, ainsi que ceux des autres communautés, furent soumis à des actes de pillage dans les premiers jours qui ont suivi l'éclatement du désordre. D'où le sentiment d'inquiétude généralisé qui s'est emparé aussi bien des Ivoiriens que des étrangers. Cependant, les Marocains sont très bien vus par la population locale et entretiennent de bonnes relations empreintes de respect mutuel. À votre avis, la situation qui prévaut dans ce pays n'exige-t-elle pas des autorités marocaines de faciliter le rapatriement de ses ressortissants qui le souhaitent ? S.M. le Roi Mohammed VI, qui a reçu récemment le ministre ivoirien de l'Économie et des Finances, a soulevé la situation des Marocains de la Côte d'ivoire. Par ailleurs, l'ambassadeur du Royaume en poste à Abidjan a pris les dispositions nécessaires pour assurer la sécurité de nos concitoyens même s'il est difficile de protéger les gens et les biens en cas de mouvement de foule. Cela dit, il y a des gens qui veulent revenir au pays mais, faute de moyens, ils sont coincés sur place. Normalement, l'État a obligation de mettre tout en œuvre pour faciliter leur rapatriement. Comment voyez-vous l'évolution de la situation en Côte d'Ivoire ? Les accords de Marcoussis représentent à coup sûr une bonne médiation pour sortir de la crise. Sauf qu'on a péché par excès d'optimisme en n'expliquant pas suffisamment le contenu des accords en question. Certaines erreurs tactiques furent aussi commises en ne privilégiant pas la primauté de la Constitution ivoirienne. Et puis, il ne fallait pas distribuer les postes de responsabilité dans la foulée qui plus est à partir d'un pays extérieur qu'est la France. En un mot, les accords de Marcoussis ont souffert d'un déficit de méthodologie. D'où leur dénonciation par une bonne partie de la population. Le Maroc peut-il jouer un rôle dans le règlement de la crise ivoirienne? Les relations politiques entre le Maroc et la Côte d'ivoire sont excellentes. Le Souverain ne ménagera aucun effort pour contribuer à la réconciliation nationale si toutefois les responsables ivoiriens le souhaitent. Il faut tout entreprendre pour sauver la Côte d'ivoire. Ce pays doit en effet retrouver rapidement sa sérénité car de sa stabilité dépend celle de l'ensemble de l'Afrique de l'ouest.