Selon la représentante de l'Unicef au Maroc lors d'un séminaire au CSEFRS L'accès au primaire des enfants en situation de handicap n'est que de 37,8%. Ce chiffre poignant est réitéré, lundi à Rabat, par la représentante de l'Unicef au Maroc, Giovanna Barberis, lors du séminaire international consacré au «droit à l'éducation inclusive : transition conceptuelle, transformation des pratiques et enjeux de l'évaluation». La représentante prend également appui sur les chiffres du dernier recensement de la population et l'habitat de 2014. Il en ressort, comme elle le précise, que 70% des personnes handicapées n'ont aucun niveau scolaire. «Seulement 4,6% ont fréquenté le préscolaire, 8,5% ont atteint le secondaire, et seulement 1,5% ont atteint le niveau supérieur», enchaîne Mme Barberis en se référant aux mêmes statistiques. Pour elle, ces enfants ont, pour un principe d'équité, le même droit d'aller à l'école, d'y rester et d'y bénéficier d'un enseignement de qualité. La représentante de l'Unicef au Maroc ne manque pas, par l'occasion, de mettre l'accent sur les barrières à l'accès des enfants en situation de handicap à l'école. Des entraves de taille Ces barrières consistent, selon Mme Barberis, en l'absence des connaissances sur les capacités des enfants en situation de handicap ainsi que les attitudes et les perceptions négatives à leur égard. Des méthodes pédagogiques et de l'environnement scolaire non adaptés aux besoins de chaque enfant et le manque de renforcement des capacités des enseignants et des cadres administratifs sont également des entraves à cet accès. Aussi, la difficulté de mettre en œuvre des mesures éducatives inclusives aux niveaux national et local est, selon ses dires, une barrière à la scolarisation de cette frange sociale. De son côté, le Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) est conscient de ces freins. D'où l'organisation de l'événement qui a plusieurs visées. Une évaluation du modèle d'éducation des enfants en situation de handicap «C'est en toute logique et en toute cohérence que nous avons chargé notre Instance nationale d'évaluation (INE) de réaliser une évaluation du modèle d'éducation des enfants en situation de handicap», précise Omar Azziman en ouverture de la rencontre. L'objectif étant, selon le président du CSERFS, de disposer d'un diagnostic fiable et de permettre l'identification des facteurs qui favorisent, et de ceux qui entravent, l'éducation de ces enfants. «Et c'est dans ce même esprit que le Conseil a confié à la commission permanente des curricula, des programmes et outils didactiques de mener une réflexion sur la question afin de nous permettre de tester et d'approfondir notre position et d'émettre un avis et des recommandations sur le sujet», enchaîne-t-il. M. Azziman, également conseiller royal, ne compte pas s'arrêter à ce niveau puisque pour lui, «au niveau des faits, de la pratique éducative et des mentalités nous sommes encore loin du compte». C'est pourquoi des actions colossales sont à entreprendre. Des efforts tous azimuts Ceux-ci sont, selon le président du CSEFRS, à faire pour une «prise de conscience collective du fait qu'on ne saurait réduire une personne humaine, quel que soit son âge, à ses carences ou à ces déficiences et que rien n'est plus injuste que cet essentialisme réducteur». Au sens de M. Azziman, un travail doit être également fait pour la diffusion des bons résultats obtenus par des enfants en situation de handicap là où l'accessibilité physique et pédagogique est convenablement assurée, là où l'encadrement pédagogique est approprié et là où les méthodes d'enseignement et d'apprentissage sont adaptées. De plus, des efforts doivent, selon ses dires, être fournis «en gardant présent à l'esprit que ce domaine est par excellence le domaine de la mobilisation, de la coordination organisée, de l'interaction et de la coopération ordonnées entre parents, éducateurs, experts, associations, collectivités territoriales et autorités publiques mais qu'il ne suffit pas de le constater parce qu'il faut encore l'organiser». Au-delà de tout effort, un travail sur les mentalités est nécessaire puisque les personnes en situation de handicap peuvent faire des miracles. L'apport du Conseil et son INE Outre cet événement, le travail du CSEFRS va se poursuivre. La commission permanente des curricula, des programmes et outils didactiques émettra, comme le précise Latifa Jbabdi, membre de cette commission, un avis à propos de la question. «Nous avons besoin de mentalités différentes. Le handicap est une différence humaine», poursuit Mme Jbabdi. A son tour, Charles Gardou, professeur à l'Université Lumière Lyon 2 en France, abonde quasiment dans le même sens. «Parler d'enfant en inclusion scolaire est une absurdité», estime-t-il. Pour lui, tout enfant a droit à l'excellence sans restrictions. Aussi, une école inclusive doit, au sens de l'expert, prendre le besoin de «reconnaissance ». Encore faut-il assurer un « accompagnement». Selon ses dires, une école inclusive doit transmettre des compétences et former des professionnels de haut niveau. Comme il l'indique par l'occasion, faire l'émancipation de chaque enfant est une priorité. «Nous sommes appelés non pas à un changement d'attitude mais d'altitude», poursuit-il. Pour sa part, Rahma Bourqia, directrice de l'INE, a décortiqué les volets de l'intitulé du séminaire. A propos de la transition conceptuelle, elle estime que celle-ci est à «penser». «Comment engager ce processus de la transformation des pratiques ?», s'interroge-t-elle à propos du deuxième volet de l'intitulé de l'événement. Quant à l'évaluation, elle doit, selon ses dires, «fonctionner comme une veille qui mesure et apprécie les efforts fournis des politiques publiques».