Powell affirme que Washington bénéficierait du soutien d'au moins 12 pays s'il décidait de s'en prendre à Saddam Hussein en l'absence d'une nouvelle résolution de l'ONU. Bush, dont l'état de grâce se dissipe, mobilise une opinion de plus en plus réticente. Hans Blix, chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU, dira aujourd'hui au Conseil de sécurité que des questions clé restent sans réponse concernant le programme d'armement des destruction massive attribué par les Etats-Unis à l'Irak, rapportent des sources proches du dossier. De ce fait, il demanderait donc plus de temps pour boucler valablement les inspections et répondre objectivement aux questions du Conseil de sécurité. Cette position ne répond pas aux attentes des Etats-Unis impatientes de boucler rapidement la question irakienne, à travers une guerre meurtrière et rapide. Surtout que l'état de grâce dont bénéficiait George Bush depuis les attentats u 11 septembre 2001 se dissipe. Même remarque pour son allié principal Tony Blair : seuls 26 % des Britanniques sont convaincus par les explications de leur Premier ministre pour crédibiliser une guerre contre Saddam Hussein. Cette tendance pacifiste de l'opinion européenne est également confirmée par un sondage fait en France. Moins d'un Français sur dix souhaite que la France soit «solidaire » des Etats-Unis dans la crise irakienne. Mais, rien n'y fait pour dissuader l'Administration américaine : le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, a réaffirmé à Davos que son pays bénéficierait du soutien d'au moins 12 pays s'ils décidait de lancer une guerre contre Bagdad même sans l'accord du Conseil de Sécurité. Il a répondu évasivement à une offre de la ministre suisse des affaires étrangères proposant d'accueillir en Suisse des négociations de dernière minute entre les Etats-Unis et l'Irak. « Il y a un certain nombre de pays qui ont déjà indiqué qu'ils aimeraient avoir une nouvelle résolution, mais sans nouvelle résolution ils seront avec nous », a déclaré Powell avant d'ajouter : « Je ne peux pas vous donner de nom ni de nombre (…) mais nous ne serions pas seuls, cela est certain. Je pourrais vous en citer une douzaine de mémoire, et je pense qu'il y en aura d'autres». Concrètement, des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, qui ont un droit de veto, seule la Grande-Bretagne s'est solidarisée avec les Etats-Unis alors que la France, la Russie et, dans une moindre mesure, la Chine s'opposent fermement à toute guerre non décidé » par l'ONU. Paris et Moscou, et bien d'autres pays, souhaitent accorder davantage de temps aux inspecteurs des Nations unies. Mais Powell ne veut pas en entendre parler : « Plus de temps pour qu'il se passe quoi ? Pour que les inspecteurs fassent quoi ? Que saurons-nous dans deux ou trois mois face à la non-coopération des Irakiens à laquelle, il est presque certain, on se heurtera ? ». Pourtant les Américains ne suivent pas leur Exécutif dans ce raisonnement. D'après un récent sondage, 59 % des Américains estiment que les inspecteurs devraient bénéficier de « plusieurs mois » supplémentaires pour mener à bien leur mission. Bush va profiter de son discours sur l'état de l'Union demain pour préparer ses citoyens à l'éventualité d'une guerre. À Bagdad, deux scientifiques irakiens ont refusé, le week-end, d'être entendus par des experts onusiens en désarmement sans présence d'officiels, au moment où Saddam Hussein réunissait les plus hauts responsables du pays. Ce refus a entraîné le report de l'audience alors qu'un troisième a été entendu par les inspecteurs en présence d'un représentant du gouvernement. Sur le plan diplomatique, le président égyptien Hosni Moubarak, qui s'investit beaucoup ces derniers temps sur le dossier irakien, s'est le week-end aux Emirats arabes unis, première étape de sa tournée dans le Golfe. Par ailleurs, en cas d'attaque américaine, l'Irak a fait savoir qu'il se défendrait par tous les moyens en sa possession. À Londres, un premier convoi de boucliers humains, composé d'une cinquantaine de pacifistes est parti vers l'Irak, où ces volontaires se déploieront autour des sites susceptibles d'être bombardés en cas de guerre.