Les Etats-Unis s'engagent à diffuser des preuves sur l'armement de l'Irak. La Russie durcit le ton à l'égard de Bagdad et envisage un changement d'alliances. Saddam Hussein critique le rapport Blix et promet la défaite aux Américains. L'Administration américaine envisage d'envoyer le secrétaire d'Etat Colin Powell, la semaine prochaine, aux Nations unies afin d'y exposer des preuves gardées secrètes de la possession par Bagdad d'armes de destruction massive. «Nous sommes en train d'étudier les possibilités d'une réunion du Conseil de sécurité la semaine prochaine au cours de laquelle le secrétaire d'Etat interviendrait», a annoncé un haut responsable américain sous couvert de l'anonymat. La présentation de ces preuves vise, à l'évidence, à convaincre un monde sceptique de la nécessité d'une guerre contre l'Irak. Bien que George Bush ait affirmé dans son discours sur l'état de l'Union que son administration allait divulguer ces preuves, de nombreux milieux continuent d'afficher des doutes, même si cette divulgation risque de changer les esprits. Le sénateur démocrate du Massachusetts, Edward Kennedy, a réagi en estimant que le président américain «ne s'est pas montré très convaincant sur l'imminence de la menace irakienne et sur le fait que la guerre était la seule alternative». Kennedy a donc logiquement annoncé sa décision de présenter une résolution exigeant que George Bush présente «des preuves convaincantes d'une menace imminente» avant que le Congrès n'autoriser l'envoi de troupes en Irak. George Bush n'a pas précisé la forme que prendrait la divulgation de ces informations jusqu'alors secrètes par Colin Powell. Mais, il devrait présenter des informations et des éléments provenant du renseignement sur les programmes illégaux d'armement de l'Irak, ses tentatives pour cacher ces armes aux inspecteurs et ses liens avec les groupes terroristes, y compris des membres d'Al-Qaïda. Parallèlement à ces manœuvres destinées à convaincre une opinion américaine et internationale réticente, le président américain a accéléré le calendrier d'une possible intervention militaire, en demandant une réunion du Conseil de sécurité dans une semaine pour exhiber ses preuves. Bagdad met au défi Washington de prouver ses accusations et menace d'attaquer le Koweït en cas de guerre. La Russie s'est rapprochée des Etats-Unis dans ce dossier irakien. Le président Vladimir Poutine a déclaré que si l'Irak «commence à gêner le travail des inspecteurs en désarmement de l'ONU, la Russie pourra modifier sa position et se mettre d'accord avec les Etats-Unis pour élaborer de nouvelles décisions, plus dures, au Conseil de sécurité». En Europe et dans le monde arabo-musulman, des voix se sont élevées pour demander plus de temps aux inspecteurs onusiens dans l'espoir d'éviter une guerre dont ils redoutent les conséquences. Les inspecteurs ont demandé à interroger en privé 16 savants et chercheurs irakiens. Mais, aucun entretien privé n'a pu avoir lieu, a confirmé le porte-parole de l'ONU. En attendant, Bagdad a dénoncé hier «le rapport déséquilibré et inéquitable» des chefs des inspecteurs en ne tenant pas compte de la coopération dont l'Irak a fait preuve depuis la reprise des inspections. Multipliant les réunions avec ses officiers, alors que les Etats-Unis amassent des dizaines de milliers de soldats aux portes de l'Irak, Saddam Hussein a de nouveau promis l'apocalypse à l'armée américaine en cas de guerre. Le président irakien a aussi incité son armée à combattre jusqu'à la mort en s'inspirant des opérations suicides menées par les Palestiniens. Enfin, selon des responsables américains, la Turquie a donné son accord de principe pour que quelque 20.000 soldats américains transitent par son territoire pour pénétrer dans le Nord de l'Irak. Selon cet accord, Ankara accepte aussi que 5.000 autres soldats américains soient stationnés en Turquie pour fournir un soutien logistique à ces troupes terrestres.