Le Groupe Banques Populaires passe à l'acte. Il retire ses produits d'assurance gérés par la CNIA reprise récemment par le groupe Saham et ferme son réseau de distribution face à l'assureur. La banque ne veut pas traiter avec un assureur qu'elle juge peu rassurant. La réaction du Groupe Banques Populaires à la reprise de l'assureur CNIA par le groupe Saham, présidé par My Hafid Elalamy, ne s'est pas faite attendre. De sources sûres, le groupe BP cherche un nouveau partenaire dans le domaine des assurances, tournant ainsi le dos à son partenaire de toujours CNIA Assurances, compagnie d'assurances couvrant l'ensemble des risques des particuliers et des entreprises. Auparavant, dès la publication de l'information de vente de la CNIA, la position de Nourredine Omary, président du Comité directeur du Groupe Banques populaires, était claire et sans ambiguïté: «Je suis libre de mes mouvements. Rien ne m'empêche de retirer mon portefeuille et d'aller le placer ailleurs, selon les affinités de notre groupe». Ainsi, la première institution bancaire nationale s'est aussitôt mise à la recherche d'un partenaire à sa taille. Cette décision est assurément dictée par le bon sens. La BP a même nourri le projet de monter sa propre compagnie. Les tractations entre le groupe et le ministère des Finances n'ont toujours pas abouti. Le ministère penchait plutôt vers le scénario de reprise de la compagnie d'assurances Transport, la célèbre CAT. Mais, le portefeuille hérité de la liquidation des cinq compagnies publiques n'est pas facile à gérer. L'institution bancaire, sous la pression des fusions dans son secteur, ne peut s'associer qu'à un leader. Les regards ne peuvent, selon cette logique, que se tourner vers Axa Assurances. Cette « partie noble » de l'assurance cherche un associé, suite à l'acquisition de son partenaire, le groupe ONA, de Wafa Assuarances, en marge de la fusion Wafabank et BCM. D'ailleurs, le marché financier national se fait l'écho d'un rôle d'intermédiaire, dans le langage financier : chevalier blanc, joué par le très controversé My Hafid Elalamy, président du groupe Saham. En tout cas, les professionnels de l'assurance voient d'un mauvais oeil le retour de My Hafid Elalamy dans leur monde qui est en pleine consolidation. «En matière d'assurance, la prévoyance est à tous les niveaux. Il n'y a plus de place pour les personnes physiques, encore moins aux structures financières dont les origines des fonds ne sont pas clairement déterminées. Nous ne voulons pas d'un assureur non rassurant», tient à préciser, sous couvert d'anonymat, un membre du bureau de la Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurances (FMSAR). C'est dire que la méfiance à l'égard du groupe présidé par My Hafid Elalamy, homme d'ombre, dont l'approche a fait couler beaucoup d'encre est grande. Les affaires financières Diwan et Agma sont là pour le rappeler. « En plus, je vois mal une structure de 700 millions de DH de chiffre d'affaires acquérir 67% d'une compagnie valorisée à 1 milliard de DH, soit au bas mot 670 millions de DH! Pis, qu'en est-il des garanties et des nantissements exigibles en matière d'assurance?», s'interroge le membre de la FMSAR. En effet, cette transaction encore soumise à l'approbation des autorités de tutelle, contient plusieurs zones d'ombre. Rien n'a filtré sur les garanties, censées rassurées sur le poids et la forme financière du groupe acquéreur de la CNIA. Dans un communiqué, non détaillé, le groupe Saham a mis en avant ses alliances avec des leaders mondiaux, tels que Bertelsmann et Allianz. Saham est plus connu dans les centres d'appels ( Phone Assistance), et opère aussi dans l'assistance (Isaaf Mondial Assistance). Dans la distribution, le groupe compte trois franchises : Bigdil, Best Mountain et Sergent Major. La dernière sortie remarquée du groupe, qui s'est d'ailleurs traduite par un échec, a porté sur le domaine des technologies de l'information en acquérant Cap'Info et Orsys. En attendant plus de visibilité, la reprise de CNIA Assurances par My Hafid Elalamy prive la compagnie de la majeure partie de son portefeuille. Son chiffre d'affaires perdrait ainsi 60 à 70% de ses réalisations. Par le passé, le partenariat BCP/CNIA constituait une des réussites dans le domaine de la bancassurance. La série des produits "Addamane" et Addamane Chaâbi sont une référence en la matière. À lui seul, ce dernier produit (de retraite pure distribue depuis son lancement en 1986 des taux de rendement performants (6% en 2002)), totalisait en 2003 plus de 176.000 adhérents pour un chiffre d'affaires dépassant 200 millions de DH, contre un actif global GPM de 1,5 milliard de DH. Par conséquent, la rupture entre la BCP et CNIA ne peut qu'être lourde de conséquences. La compagnie, privée du réseau BCP, se réduirait à une coquille vide.