11 articles du projet de loi déclarés incompatibles avec la loi suprême du pays L'entrée en vigueur de la loi organique portant sur les exceptions d'inconstitutionnalité des lois devra attendre. Et pour cause. La Cour constitutionnelle vient de rejeter le texte. Dans les détails, les sages de la Cour ont estimé que 11 articles contenus dans la loi organique adoptée il y a quelques semaines par le Parlement avec ses deux Chambres sont incompatibles avec la Constitution de 2011. «La Cour déclare que l'article 2 dans son deuxième alinéa, l'article 5 (notamment en ce qui concerne la condition législative ainsi que les droits et libertés, l'article 6, le deuxième alinéa de l'article 7, l'article 8, l'article 13 avec l'absence d'une procédure mettant en œuvre les décisions de la Cour constitutionnelle et enfin les articles 10, 11, 12, 14 et 21 sont tous incompatibles avec la Constitution», lit-on dans la décision de la Cour. De même, cette dernière a également formulé des remarques concernant plusieurs dispositions contenues notamment dans les articles 1, 3, 10, 23, 26 et 27. L'entrée en vigueur de cette loi organique est donc suspendue. Car le gouvernement devra amender les articles pointés du doigt par les magistrats de la Cour constitutionnelle. Il faut dire que le projet de loi organique 15-86 fixant les conditions et modalités d'application de l'article 133 de la Constitution, relatif à l'exception d'inconstitutionnalité, était très attendu puisqu'il offre un droit inédit pour les citoyens marocains. Ces derniers pourraient en effet soulever à l'occasion d'un procès en justice l'inconstitutionnalité de toute disposition législative qu'ils jugent attentatoire aux droits et libertés garantis par la Constitution. En août 2017, la Chambre des représentants avait définitivement adopté le texte en question en deuxième lecture. Mais l'entrée en vigueur des dispositions devrait attendre le visa de la Cour constitutionnelle qui statue obligatoirement sur toutes les lois organiques avant leur entrée en vigueur et ce, en dépit de l'adoption des parlementaires. Pour rappel, le texte en question stipule que «la Cour constitutionnelle est compétente de trancher n'importe quel recours portant sur l'inconstitutionnalité d'une loi, soulevé lors de l'examen d'une affaire, si une des parties en litige estime que la loi qui sera appliquée lors du procès porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution». La loi organique accorde ainsi aux parties en litige, ainsi qu'à leur défense, le droit de soulever, au cours d'un procès, une exception d'inconstitutionnalité par écrit. La juridiction se charge, ensuite, de transmettre le recours pour inconstitutionnalité à la Cour constitutionnelle. A noter que le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) avait réalisé un mémorandum relatif à l'exception d'inconstitutionnalité. Le Conseil avait notamment recommandé que les recours soient «présentés dans un écrit distinct, motivé et signé par un avocat inscrit au tableau de l'un des barreaux du Maroc». Objectifs La loi organique 15-86 fixant les conditions et modalités d'application de l'article 133 de la Constitution, relatif à l'exception d'inconstitutionnalité, vise à enrichir le système législatif national et remédier aux lacunes de l'arsenal juridique en vigueur qui pourrait être entaché d'inconstitutionnalité. En vue d'assurer un équilibre entre le droit du recours pour non constitutionnalité des lois et l'efficacité judiciaire, le législateur a fixé les conditions de recevabilité de l'action, notamment le respect des délais impartis pour statuer en matière de recours pour non constitutionnalité d'une loi. Par ailleurs, la loi identifie les différentes parties compétentes pour connaître d'une exception d'inconstitutionnalité tout en fixant les conséquences de la décision de la Cour constitutionnelle sur l'inconstitutionnalité d'une loi. Avant l'invalidation prononcée par la Cour, la nouvelle loi devrait entrer en vigueur une année à partir de la date de sa publication au Bulletin officiel.