Libérés après 16 et 17 ans passés dans les geôles de Tindouf, Badri Miloud et Lahmadi Ahmed rentrent enfin au pays, malades et démunis. Une situation qui rappelle celles de 410 autres détenus marocains, toujours en captivité. La nouvelle est annoncée, tambour battant, comme étant un acte de générosité du polisario. Elle n'est en fait qu'une nouvelle manifestation d'une situation aussi anachronique que condamnable. Celle des centaines de prisonniers marocains, qui continuent de souffrir dans les geôles de Tindouf. Il s'agit de la libération, samedi dernier, sur intervention du Comité international de la Croix Rouge (CICR), de deux nouveaux prisonniers marocains détenus pendant des années dans les camps de Tindouf. Rapatriés au Maroc par le même CICR après une détention qui n'a que trop duré, 16 et 17 ans, Lahmadi Ahmed et Badri Miloud, ont été libérés à la suite de l'aggravation de leur état de santé et pour «des raisons humanitaires», se vante le polisario, dont la voix est généreusement portée par l'agence algérienne d'information, APS. Immédiatement pris en charge par une équipe médicale spécialisée, ils ont ensuite été transportés dans une unité hospitalière où ils subissent actuellement les examens nécessaires et bénéficient de soins appropriés et intenses. Et pour cause, Badri Miloud, selon Abdellah Lamani, lui-même ancien détenu dans les camps de Tindouf et qui dit bien les connaître, est atteint depuis plus d'une dizaine d'années de la tuberculose. Les tortures, la sous-nutrition et les conditions atroces de détention, le maintenaient depuis des années entre la vie et la mort. Aujourd'hui libre, enfin, Badri Miloud n'a pour famille que sa mère et une sœur, toutes les deux âgées. Quant à Lahmadi Ahmed, il serait, toujours selon Lamani, atteint d'un cancer à la prostate. Une situation qui n'a pas manqué de susciter l'indignation du Maroc. « Tout en accueillant avec soulagement le rapatriement urgent de ces deux ressortissants, le Royaume du Maroc, peut-on lire dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, déplore vivement que leurs détenteurs aient attendu l'aggravation de leur état de santé pour enfin, accepter de les libérer». L'Etat de santé des deux anciens prisonnier, âgés 57 et 48 ans, repose avec acuité la situation humanitaire dans les camps de Tindouf. Si plus d'un millier de prisonniers marocains ont d'ores et déjà été libérés, d'autres, au nombre de 410, croupissent toujours dans les camps de la honte, en infraction pure et simple des règles les plus élémentaires du droit international humanitaire et au mépris des appels répétés du secrétaire général de l'ONU et du Conseil de sécurité et sur le sol d'un Etat algérien qui, pourtant fait partie des conventions de Genève. Dans un communiqué publié à cette occasion, préoccupé par la dégradation de l'état de santé des détenus marocains à Tindouf, le CICR, dont les délégués se rendent deux fois par an auprès de ces détenus, lance un énième appel pour leur libération. Un appel auxquel le polisario sonne occupé. Occupé à instrumentaliser politiquement et à marchander, par des libérations partielles et selon des procédés méprisables, des vies humaines.