Les victimes de la société émiratie Al Najat ont manifesté mardi à Rabat. Nombre d'entre elles ont essayé de prendre le train gratuitement à partir de la gare Rabat-ville. Elles ont désormais conscience de leur force et ont adressé dans ce sens un communiqué au ton menaçant au gouvernement. «Les instructions du directeur de l'ONCF sont précises. Il y aura une réduction du 1/3 sur le prix des billets. Ceux qui espèrent faire le voyage gratuitement feraient mieux de passer la nuit chez leur famille ou aller à la gare routière acheter un billet à 10 DH», dit un monsieur en costume et cravate à une centaine de victimes des emplois fictifs de Al Najat rassemblées, mardi à 19 h, à la gare Rabat-ville. Cette déclaration a été suivie d'un mouvement de grogne des personnes qui sont venues manifester devant le Parlement pour dénoncer l'escroquerie maquillée par l'Anapec. Elles étaient encerclées par des éléments des forces de l'ordre. Le monsieur en costume et cravate leur a signifié qu'ils ne pourront pas occuper plus longtemps les locaux de la gare. Les manifestants ont été obligés de prendre des bus pour rentrer chez eux. Et c'est ainsi que le problème des emplois fictifs de Al-Najat commence à dépasser l'Anapec pour importuner d'autres secteurs. L'ONCF n'a rien promis à personne, et cet office a subi un grand préjudice, parce que les manifestants bloquaient les voies d'accès aux voies. Ils risquent de s'en prendre à tout ce qui relève à leurs yeux des pouvoirs publics. «Nous nous sentons floués par le gouvernement, nous userons de tout pour qu'on nous restitue ce qu'on nous avait promis», dit sans hésiter Mustapha Essaoudi, une victime de Al-Najat. Forte des représentants de 90 villes du Royaume qui sont venus lui témoigner leur soutien, la commission de coordination nationale des victimes d'Al Najat a rédigé un communiqué où elle informe de ses doléances. Deux articles sont à retenir. Le premier consiste à refuser l'indemnisation proposée par le gouvernement, soit les 900 DH de la visite médicale et les frais de transport. La commission réclame soit l'emploi « immédiat » de toutes victimes, soit la restitution de la totalité des 13 mois que comprend le contrat fictif. C'est-à-dire 6000 DH x 13. Ce qui fait la coquette somme de 72 000 DH par personne. On voit mal l'Etat payer près de 80 000 DH à près de 80 000 personnes. Le deuxième article est lourd de menaces. «Nous sommes déterminés à adopter toutes les formes de militantisme afin d'arracher notre droit légitime et juste», précise-t-il. Abdelhamid Touiri, membre de la précitée commission, désigne deux responsables du gouvernement qui n'ont pas prévenu les victimes de l'arnaque : le ministre de l'emploi et le Premier ministre en sa qualité de président du conseil d'administration de l'ANAPEC. Les victimes réclament aussi dans leur communiqué une enquête urgente pour arrêter ceux qui ont profité de l'opération en la couvrant. L'affaire des emplois fictifs prend désormais une ampleur inquiétante. Les victimes s'organisent. Elles sont conscientes de leur force et des craintes qu'elles inspirent aux autorités.