Le champion du monde des échecs, Vladimir Kramnik, a gagné samedi un prix de 700.000 dollars offert par le roi Hamad de Bahrein, après avoir fait match nul avec un puissant logiciel allemand. Ce duel entre un homme et une machine ravive les craintes quant à un avenir proche. L'intelligence d'un homme confrontée à celle d'un logiciel. Ce n'est pas le scénario d'un film de science-fiction, mais le face-à-face réel du champion du monde d'échecs, Vladimir Kramnik, avec un puissant logiciel allemand, Deep Fritz. Ce duel entre l'homme et la machine n'est pas le premier du genre. En 1997, l'ancien champion du monde des échecs, Garry Kasparov, avait perdu lors du match qui l'avait opposé au super ordinateur d'IBM Deep Blue. Kasparov avait été complètement décontenancé par l'ordinateur. Une machine d'une redoutable régularité, qui n'obéit pas aux contingences de la vie, n'a ni soif ni faim, mais tourne comme une broyeuse pour mettre en bouillie le cerveau de l'homme. Cet ordinateur avait mis fin à plusieurs années d'invincibilité de Kasparov. Le Russe ne s'est jamais remis de cet échec qu'il a imputé à un vis-à-vis qui ne dégage pas le moindre signe de fatigue, ne peut être sujet à une quelconque défaillance. En somme, c'est l'inhumanité de la machine qui a eu le dessus sur l'intelligence de l'homme. En acceptant de refaire l'expérience de son mentor, Vladimir Kramnik savait à quels périls il s'exposait. Il savait que le revers d'une défaite pouvait être cinglant. Celui que l'on surnomme Iceman ou M. Iceberg en raison de son sang froid dans les situations les plus délicates semblait pourtant tout désigné pour ne pas perdre son flegme en face de l'implacabilité de la machine. Le programme qu'il a eu à affronter a la particularité de fonctionner sur un ordinateur équipé d'un maximum de huit processeurs tournant en parallèle, pour en augmenter la puissance de calcul. Kramnik a nettement pris le dessus sur son vis-à-vis au début de la rencontre. Il l'a dominé par une avance de trois points à un, après quatre parties. Mais Depp Fritz a remonté au score pour finalement égaliser. L'homme et la machine ont fait match nul. La machine semblait toutefois avoir mieux assimilé le schéma tactique de l'homme. Et si la rencontre avait duré plus longtemps, les chances de Kramnik auraient été minimes pour renverser la montée en puissance du logiciel. Ce qui donne déjà des frissons quant à ce que sera, dans l'avenir, la confrontation de deux intelligences, l'une humaine, l'autre artificielle. Aujourd'hui, ils s'affrontent sous l'apparence du ludique, demain peut-être pour le pouvoir.