Entretien avec Amine Tazi, directeur des Studios Atlas et CLA et du pôle cinéma chez Sanam Holding ALM : Si vous nous parliez d'abord du cinéma marocain, comment se porte-t-il ? Amine Tazi : Sur le plan personnel, comme spectateur je ne peux que me féliciter du développement de ces dernières années tant au niveau du nombre que de la qualité. Pour les studios, je suis aussi très content de voir que de plus en plus de productions nationales choisissent nos studios et Ouarzazate pour tourner plusieurs scènes de leurs projets. Et je remercie à cette occasion tous les professionnels qui nous ont fait confiance. J'en profite aussi pour annoncer que nous octroyons, en guise d'encouragement, des tarifs très avantageux aux productions marocaines, bien plus intéressants que ceux pratiqués usuellement. Qu'en est-il des tournages étrangers au Maroc ? Connaissent-ils toujours la même cadence ? Le Maroc, en général, et Ouarzazate en particulier, ont connu une baisse du nombre et des budgets des films étrangers ces deux dernières années et cela en comparaison avec l'année 2014 qui était très positive en termes de nombre, de budgets investis et de notoriété des films tournés. Mais nous restons confiants quant à l'attractivité du Maroc comme terre d'accueil des tournages étrangers surtout avec la mise en place effective de la disposition fiscale avantageuse octroyée aux productions étrangères. Cette mesure devenue indispensable viendra s'ajouter aux autres avantages qu'offre notre pays comme destination privilégiée pour les tournages étrangers. Quels sont vos nouveaux projets pour les studios, CLA et Atlas, que vous dirigez ? Pour des raisons de confidentialité, je ne pourrai pas dévoiler les projets en cours ou à venir. Mais, nous avons accueilli à ce jour des projets intéressants à l'instar d'une production indienne, un film marocain, une émission TV sur les voitures avec l'animateur vedette de l'émission Top Gear, Jeremy Clarkson, l'émission Master Chef de 2M, et un documentaire pour National Geographic. Le meilleur est à venir ! Comment se prépare le Maroc pour les prochains festivals, notamment le FIFM ? Les professionnels, avec le Centre cinématographique marocain, se préparent différemment en tenant compte de la particularité de chaque manifestation. Le CCM participe aux festivals de Cannes et de Berlin en installant un stand avec des outils de communication où les professionnels sont les bienvenus pour vendre leurs services et produits. Plusieurs rencontres entre Marocains et étrangers y ont été faites. C'est une initiative très louable de la part du CCM. Quant au FIFM (Festival international du film de Marrakech, ndlr), qui est un festival marocain à part, il constitue une belle occasion pour véhiculer une image positive de notre pays en tant que destination touristique et cinématographique de référence. De surcroît, la Fondation du FIFM organise chaque année, en partenariat avec l'ONMT et les professionnels du cinéma, une visite des cinéastes et journalistes à Ouarzazate. C'est une très bonne occasion pour ces derniers de palper les potentiels et avantages qu'offre la région aux producteurs de cinéma. Ce fantrip connaît de plus en plus de succès. Comment expliquez-vous la rareté des productions et coproductions au Maroc ? Je ne pourrais pas trop me prononcer sur ce sujet mais je peux seulement constater que les investisseurs et hommes d'affaires marocains ne s'intéressent pas trop à investir dans le cinéma à cause du peu de succès que connaissent les projets marocains et surtout à cause de leur méconnaissance du secteur. Qu'en est-il des fermetures des salles malgré la réalisation de plusieurs films ? La principale cause est bien entendu la piraterie. De plus, plusieurs salles de cinéma ont fermé car elles n'ont pas su accompagner l'évolution du comportement des spectateurs marocains. Les propriétaires n'ont pas investi pour mettre à jour leurs installations et équipements malgré les aides qui leur ont été octroyées. Pour conforter mes dires, il faut voir comment marchent certains multiplex et le nombre d'entrées pour les films marocains. Nous avons de plus en plus besoin de salles de cinéma de quartier et dans certaines villes et qui peuvent proposer plus d'un film à la fois avec un confort certain. Pour exemple, plusieurs grandes salles parisiennes se sont transformées en petites salles. Est-ce que les commissions chargées des subventions aux films lisent tous les scénarios de tous les films ? Toutes les commissions (fonds d'aides, autorisations de tournages, etc.) font de l'excellent travail et doivent être encouragées. Mais encore, il est nécessaire de les pourvoir de plus de moyens financiers et humains pour faire face à la demande de plus en plus croissante. Il faudrait aussi proposer des formations continues (langues étrangères, stages, master class, etc.) à certains membres de ces commissions pour les mettre au diapason des sujets traités, de l'évolution des scénarios et des attentes des spectateurs de plus en plus compliquées. Les réalisateurs seront-ils constamment obligés de chercher des subventions pour réaliser leurs œuvres? C'est un devoir de continuer à subventionner le 7ème art car c'est le moyen le plus approprié pour véhiculer la culture et les mœurs d'un pays comme le nôtre. Et dans ce sens, le CCM est l'organe étatique qui gère et distribue les subventions inscrites dans les lois de Finances votées par le Parlement. Maintenant, il est important que certains organes tels que les groupes privés et les fondations contribuent financièrement à certains projets. Leurs motivations pourraient être diverses : images, publicité, et gains. Comment contribuez-vous à l'évolution du secteur en tant que directeur du pôle cinéma chez Sanam Holding? Sanam Holding considère ce secteur aussi vital que les autres activités du groupe mais avec un peu plus d'affection vu que nos studios de cinéma participent d'une façon ou d'une autre au rayonnement de notre pays à l'international et aux bénéfices que peuvent tirer la population locale et toutes les forces vives quand un film choisit d'être produit à Ouarzazate.