Entretien avec avec Omar Sayarh, Avocat et associé gérant du cabinet Sayarh & Menjra Law Firm Omar Sayarh : Le projet de loi a pour principal objectif de mettre en place un cadre juridique appréhendant l'ensemble des aspects du crowdfunding. Il s'articule principalement autour de la définition des différents types de crowdfunding : equity, prêt, don, précommande, et des conditions applicables aux opérations de crowdfunding, notamment en termes de plafonds, ainsi que des conditions d'exercice du crowdfundeur et des plate-formes de crowdfunding. Cette loi sera-t-elle fondée sur l'autorisation et la sanction pour une réglementation et une protection des contributeurs et des investisseurs? Je crois que la réussite du crowdfunding est tributaire de l'existence de garde-fous œuvrant à la protection des investisseurs et des contributeurs. Le projet de loi prévoit dans cette perspective des mécanismes de tutelle par le biais desquels chaque autorité octroiera des autorisations aux détenteurs de plates-formes de crowdfunding relevant de son champ de compétence (Bank Al-Maghrib pour le crowdfunding en prêt, le Secrétariat général du gouvernement pour le crowdfunding en donation et l'Autorité marocaine du marché des capitaux pour le crowdfunding en equity). Par ailleurs, comme dans toute loi contenant des règles impératives ayant vocation à régir une situation juridique donnée, il sera nécessaire de prévoir des sanctions qu'encourraient les personnes qui contreviendraient à ses dispositions. Ce cadre juridique risque-t-il de poser des barrières aux plates-formes de crowdfunding afin qu'elles n'entrent pas en collision avec les sources classiques de financement, par exemple les banques ? Le crowdfunding consiste à financer un projet par le grand public en récoltant des fonds via des plates-formes spéciales sur Internet pendant une durée déterminée par le porteur de projet. C'est un mode de financement alternatif, et par définition ne concurrence pas les établissements bancaires car les porteurs de projets qui y ont recours ne sont souvent pas éligibles aux modes de financements classiques. Nous sommes d'ailleurs régulièrement approchés par un grand nombre de détenteurs de plates-formes et de porteurs de projets qui attendent impatiemment la réglementation du crowdfunding au Maroc avant de lancer leurs activités. D'ailleurs, certaines banques envisagent même de créer leurs propres platesformes de crowdfunding. Est-ce qu'un label pour le financement participatif a été envisagé dans ce cadre, afin de signaler les plates-formes conformes à la réglementation ? Ce qui est prévu par le projet de loi est l'obligation pour les détenteurs de plates-formes de crowdfunding d'adhérer à une association professionnelle qui devra être créée. Cette association aura pour fonction de fédérer les plates-formes et catalyser tous les efforts des différents intervenants dans l'écosystème du crowdfunding, tout en soutenant les autorités de tutelle dans la régulation du marché en se positionnant comme une force de proposition. Croyez-vous que cette loi contribuera au développement économique du Maroc? Je suis convaincu que le crowdfunding est un outil formidable au service des entrepreneurs et des investisseurs, qui a d'ailleurs permis la réalisation d'une multitude de projets remarquables à l'échelle mondiale, dont notamment la réalisation de routes au Mexique. J'estime ainsi que ce mode de financement a toute sa place au Maroc puisqu'il permettra la création de richesses et d'emplois en contribuant au développement et à la pérennisation de projets entrepreneuriaux. L'adoption de ce projet de loi, dont le fonctionnement se base sur les nouvelles technologies, ne pourra ainsi que renforcer la vocation du Maroc à devenir un hub numérique. Les Marocains ne pourront donc qu'être extrêmement fiers lorsque le Maroc sera l'un des premiers pays arabes et africains à adopter un cadre juridique régissant le crowdfunding. Propos recueillis par Soukaina Zoubir (Journaliste stagiaire)