Les Espagnols des deux présides occupés par l'Espagne crient à la conspiration marocaine concernant la reconnaissance de l'arabe et du tamazight en tant que langues officielles. Les réunions et les contacts se multiplient ces jours-ci à Sebta et Melilla entre les différents représentants de la communauté marocaine. Et pour cause, le sujet est important: constitutionaliser la langue arabe à Sebta, ainsi que l'arabe et le tamazight à Melilla. Les assemblées des deux villes ouvriront, dans les prochains jours (en principe vers la mi-décembre), un grand débat auquel participeront des représentants de la société civile des deux villes occupées. A cette occasion, une proposition de réforme de la Constitution sera soulevée au Parlement espagnol. En fait, les Marocains de Sebta et de Melilla veulent jouir, au même titre que les autres communautés vivant en Espagne, de leurs droits linguistiques et culturels. "Ce n'est pas une remise en cause de l'occupation des deux villes", tient à souligner Mohamed Hamed Ali, secrétaire général du parti "Union des Musulmans de Sebta" et président de l'association "Communauté musulmane de Sebta". Et d'ajouter : que "Nous voulons que les Marocains de Sebta et de Melilla sachent qui ils sont véritablement et surtout qu'ils ne sont pas des intrus dans la ville comme le soutiennent certains". En effet, les Marocains de Sebta, par exemple, ont une présence culturelle et historique indiscutable. "Notre culture est arabo-musulmane et nous ne devons pas l'occulter", poursuit Mohamed Hamed Ali. A travers les débats et les audiences qui seront organisés prochainement, les Marocains peuvent transmettre leurs inquiétudes et leurs revendications aux législateurs espagnols. D'ailleurs, bon nombre d'opposants à cette initiative ont essayé d'écarter les représentant de la Plate-Forme pour la Normalisation linguistique à Sebta et Melilla (PNLSM). Celle-ci, dont Mohamed Hamed Ali est un membre fondateur, est à l'origine de cette initiative. En fait, la Pnlsm subit les foudres des ultras de Sebta et Melilla depuis que l'initiative a été rendue publique, en août 2004 (voir ALM numéro 702 du 9-8-2004). Et pour cause, si cette reconnaissance est accordée, tous les documents administratifs, les pancartes et autres enseignes publiques à Sebta et Melilla devraient être rédigés, en plus du castillan, en arabe et en lettres tifinaghs. La spécificité culturelle et identitaire des Marocains de ces deux villes sera reconnue par la loi. De quoi irriter bon nombre d'Espagnols. Déjà, une proposition allant dans ce sens a été déposée par sept partis nationalistes espagnols ERC, PNV, CIU, CHA, EA, Nafarroa-Bai y BNG. Ces partis exigent que dans le cadre de la réforme constitutionnelle des statuts de Sebta et Melilla, les langues, arabe et tamazight, soient considérées comme co-officielles, au même titre que le castillan. Cette position a été très mal accueillie dans les deux villes occupées. Les présidents des deux communautés, Juan Vivas (Melilla) et Juan José Imbroda (Sebta), tous les deux membres du PP, l'ont considérée comme illégale. D'ailleurs, Imbroda a accusé le Maroc d'être derrière cette "conspiration". Est-il vrai que le pouvoir marocain a un quelconque rapport avec cette initiative? Non: Mohamed Hamed Ali est catégorique. "A chaque fois qu'une mesure ne colle pas avec les intérêts des colons à Sebta et Melilla, ils se mettent à crier à la conspiration marocaine". Pour sa part, le PSOE a une position ambiguë, qu'il s'agisse du niveau national ou local. Ainsi, à l'échelle nationale, le parti estime que tous les représentants de la société civile de Sebta et de Melilla ont le droit de s'exprimer sur cette question. En revanche, les socialistes de Sebta et de Melilla se disent prêts à accepter le tamazight mais rejettent catégoriquement l'usage de la langue arabe dans les deux villes.