Forces Citoyennes d'Abderrahim Lahjouji et Alliance des Libertés d'Ali Belhaj, deux formations qui ont suscité beaucoup d'interrogations et l'espoir de renouvellement de la classe et de la pratique politiques et qui sont aujourd'hui face à leurs responsabilités. Elles devront à la fois installer leurs structures, parfaire leur organisation et leurs candidats devront remporter des sièges au Parlement. Cette tâche s'avère extrêmement délicate pour ces nouveaux partis. Visite guidée. Le chemin de l'enfer est paré de bonnes intentions. C'est ce qu'on peut dire à propos des deux partis récemment créés, et qui parlent pratiquement le même langage, celui du libéralisme : Forces citoyennes d'un côté et Alliance des libertés de l'autre. Au fait, ils sont tous les deux du même côté… Si Abderrahim Lahjouji, président des Forces citoyennes, n'a cessé de ressasser son discours sur le libéralisme solidaire, Ali Belhaj, d'ADL, lui parle du libéralisme comme vecteur essentiel du développement. Sauf que pour l'une et l'autre formation, il y a un hic : quel est l'apport nouveau au champ politique ? y a-t-il un renouvellement du politique ? A voir les listes électorales présentées par les deux formations, on se rend à l'évidence. Il y a eu des nouvelles têtes avec le recyclage d'autres. On remarque au passage que même au niveau des programmes, les nouveautés ne sont pas vraiment perceptibles par rapport à ce qu'ont toujours défendu les autres formations politiques libérales ou de droite. La veille de l'annonce des listes Forces citoyennes, mercredi dernier, le président Lahjouji a essayé à sa manière, parfois provocatrice, de faire le distinguo entre les idéaux de son parti et le reste des composantes du spectre libéral marocain. FC est venu avec un discours nouveau, des idées nouvelles et une défense sans concession de la morale. «C'est le côté moral qui prime dans le choix de nos candidats», a-t-il lancé… Solidaire, FC l'est par conviction, semble dire M. Lahjouji. Lequel nous avait déclaré il y a peu de temps que son parti veut prôner «un libéralisme solidaire, qui adapte les meilleures recettes universelles du libéralisme au contexte marocain. Un libéralisme qui, tout en encourageant l'initiative privée, ne sacrifie pas pour autant les intérêts des travailleurs. Notre discours est un discours de franchise qui veut réhabiliter le politique aux yeux des citoyens et des électeurs. Nous sommes proches de toute autre formation politique qui partage avec nous ces valeurs et thèmes majeurs de l'action politique.» Certes, FC a puisé dans le réservoir des hommes d'affaires amis du président pour les têtes de listes. Mais est-ce suffisant pour renouveler un personnel politique recyclable à merci ? ce n'est pas si sûr que cela. Quant à Ali Belhaj, dont la formation est toujours dirigée par un comité provisoire, il considère que seul le libéralisme est à même de sortir le pays de l'impasse. Ce n'est pas une découverte certes, mais elle vaut ce qu'elle vaut venant d'un leader politique. ADL est une formation nouvelle avec de nouvelles idées. Selon Abdessamad Morchid, coordinateur national d'ADL, le renouvellement du personnel ne peut être total. «Cela dit, la proportion des nouveaux par rapport aux anciens est honnête. On a de bonnes raisons de croire qu'ADL a innové dans ce domaine», lance-t-il. Chose commune entre les deux formations : la faible représentativité des femmes. On a l'impression qu'ADL et FC reproduisent les mêmes stéréotypes à l'égard des femmes alors qu'en tant que formations libérales, jeunes, la femme doit occuper une place de choix. Ce n'est malheureusement pas le cas. Et c'est vraiment dommage. À l'heure des recompositions et des regroupements des forces politiques, le champ politique marocain continue sur sa culture de désintégration. Une chose est sûre : les deux formations libérales avaient tout à gagner en fondant une seule formation. Maintenant que ce n'est pas le cas, on voit mal quel critère prendra en compte un électeur qui vote pour un programme s'il a à choisir entre un ADL et un FC?