La défaite du candidat démocrate plonge l'opinion publique internationale dans la consternation et ouvre la voie à un homme avec lequel la planète a déjà connu le pire. "Félicitations, monsieur le président". C'est en ces termes que le démocrate John Kerry a mis fin à la bataille juridique qui avait commencé quelques heures auparavant entre les camps des deux candidats à la présidence américaine sur le décompte des voix à l'Etat de l'Ohio. Alors que les juristes des deux parties commençaient à se réunir pour définir leurs stratégies respectives, le candidat démocrate a appelé la Maison-Blanche pour féliciter son adversaire et l'informer qu'il reconnaissait sa défaite. L'appel est intervenu à un moment où des dizaines de milliers de votes restaient encore à décompter dans les Etats de l'Ohio, l'Iowa et du Nouveau-Mexique. Des voix qui n'ont encore été attribuées à aucun candidat. De son côté, Bush a qualifié Kerry d'"honorable adversaire" et a indiqué que son retrait est un geste "très élégant". Il lui a aussi dit qu'il peut être fier de sa campagne électorale. L'appel de Kerry s'est produit vers 11 du matin heure locale (16 heures GMT), et ce juste quelques heures après l'annonce par les démocrates que la bataille par les voix des électeurs de l'Etat de l'Ohio considéré comme l'Etat-clé pour gagner la présidentielle allait être longue. Peu de temps après avoir appelé son adversaire, John Kerry a comparu pour reconnaître publiquement sa défaite. Dans son allocution, le sénateur a insisté sur la nécessité de "fermer les blessures profondes qu'a laissées la campagne", fermant ainsi la parenthèse de sa candidature à la présidence des Etats-Unis. De son côté, le président réélu, George W. Bush, s'est adressé aux Américains, juste quelques minutes après avoir reçu l'appel de Kerry. Dans son intervention, il a qualifié sa victoire électorale d'"historique". "Les électeurs ont voté à un niveau record et accordé une victoire historique", a-t-il dit dans un discours devant des centaines de militants de son parti qui ont participé à sa campagne électorale. Il a tenu aussi à rendre un hommage public à son adversaire, avant d'appeler les Américains à l'unité. "Aujourd'hui, je veux m'adresser à tous ceux qui ont voté pour mon adversaire pour leur dire que, pour rendre ce pays plus fort et meilleur, j'aurai besoin de votre soutien et je travaillerai à le gagner. Je ferai tout ce que je pourrai pour mériter votre confiance", a-t-il dit avant d'ajouter qu'"un nouveau mandat est une nouvelle occasion d'unir toute la nation. Nous avons un pays, une constitution et un avenir qui nous lient". Le discours de Bush a été l'occasion aussi pour le président réélu pour adresser quelques messages à la communauté internationale à propos de sa politique étrangère. À ce propos, il a insisté sur sa détermination à poursuivre sa lutte contre les terroristes et leurs actions en Irak et en Afghanistan. "Avec de bons alliés à nos côtés, nous combattrons le terrorisme avec toutes les ressources de notre puissance pour que nos enfants puissent vivre libres et en paix", a-t-il dit. Mais, il a saisi l'occasion pour promettre aux Américains le retour prochain des troupes américaines déployées dans ces deux pays. "Nos soldats ont fait justice aux ennemis et fait honneur à l'Amérique", a-t-il dit avant d'ajouter : "Notre nation s'est défendue et a rendu service à la cause de la liberté des hommes…comme nous avons déjà fait le travail le plus dur, nous entrons dans une ère d'espoir". Insistant toujours sur la volonté de démocratiser le monde, il a réitéré sa conviction que l'Irak et l'Afghanistan seront démocratisés grâce aux Etats-Unis. "Nous aiderons les démocraties émergentes en Irak et en Afghanistan pour qu'elles se renforcent et défendent leur liberté", a-t-il dit, avant d'ajouter que ce n'est qu'après avoir accompli cette mission que "les hommes et les femmes qui servent sous les drapeaux pourront rentrer avec les honneurs qu'ils ont mérités". Ainsi, George W. Bush sort victorieux pour la deuxième fois consécutive d'une élection présidentielle dont l'annonce des résultats a été retardée à cause de la contestation des résultats par le camp démocrate. Rappelons que, lors des élections de novembre 2000, il a fallu attendre 36 jours avant que sa victoire contre l'ex-vice-président démocrate, Al Gore, ne soit imposée par une décision judiciaire. Aujourd'hui, le même scénario allait se reproduire si Kerry n'avait pas décidé, à la dernière minute, de renoncer et d'admettre la victoire de son adversaire. Georges W. Bush devient donc président des Etats-Unis, après avoir obtenu presque 3.5 millions de voix de plus que le candidat démocrate lors d'élections qui ont connu une participation inédite dans l'histoire de la démocratie américaine. Grâce à ces élections, le président élu a gagné un renforcement de la représentation du parti républicain au sein du Sénat. Enfin, la question que le monde entier se pose aujourd'hui est de savoir si la politique étrangère du président Bush pourrait changer durant son deuxième mandat. En tout cas, bien que certains observateurs affirment que le président américain devrait tenter d'apaiser la tension entre les Etats-Unis et les pays de l'Union européenne, la plupart des analystes restent très pessimistes et considèrent que, durant les quatre ans à venir, l'administration républicaine tentera d'imposer davantage son hégémonie sur le monde, ce qui risque de faire apparaître de nouveaux foyers de tension dans le monde.