Pas d'accord en vue sur le Sahara, a indiqué Kofi Annan dans le rapport, présenté vendredi au Conseil de sécurité. Le secrétaire général de l'ONU a demandé la prorogation de six mois du mandat de la Minurso, tout en désignant l'Algérie comme un acteur dans le conflit. L'escalade sur le Sahara marocain ne profite pas à la paix. Le constat a été établi par Kofi Annan dans son rapport sur la situation au Sahara, présenté vendredi au Conseil de sécurité. «Lorsque j'ai présenté mon précédent rapport, en avril 2004, il n'y avait pas d'accord entre les parties sur le Plan de paix pour l'autodétermination du peuple du Sahara occidental. Un tel accord semble plus lointain aujourd'hui. Il n'existe pas non plus d'accord quant aux mesures qui pourraient être prises pour surmonter l'impasse actuelle». C'est clair et net, même si l'expression «peuple du Sahara» est très peu conforme à la réalité du terrain. Elle n'est pas toutefois aussi connotée que cette pseudo-entité de «peuple sahraoui», créée par l'Algérie. Les raisons de l'impasse, Kofi Annan les explique par les divergences des parties en conflit. La position du Maroc est sans ambiguïté : il est «prêt à négocier un statut d'autonomie mutuellement acceptable qui permettrait à la population du Territoire d'administrer ses propres affaires, dans le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Royaume», indique le secrétaire général de l'ONU. Celle de l'autre camp est bien connue : application du plan de James Baker. La nouveauté du rapport réside toutefois dans le fait qu'il souligne, comme une chose allant de soi, la responsabilité d'Alger dans le conflit. A ce sujet, les propos de Kofi Annan marquent un tournant des Nations Unies dans l'appréhension des parties en conflit. L'Algérie a perdu son statut d'observateur pour revêtir celui d'acteur. Kofi Annan précise en effet que «le front polisario maintient son appui au Plan de paix, la position de l'Algérie reste également inchangée». Le secrétaire général de l'ONU ajoute : «ceux-ci (c'est-à-dire l'Algérie et le polisario) sont tous deux opposés à l'examen d'un aspect quelconque du Plan de paix, à moins que le Maroc n'accepte de le soutenir». L'énergie qu'Alger investit dans le dossier du Sahara s'est révélée à double tranchant. Son implication totale dans le conflit, l'impressionnante mobilisation de sa diplomatie pour contrarier l'intégrité territoriale du Maroc prouve, même si Alger s'en défend, que son attitude n'est pas celle d'un pays attachée à une prétendue position de principe. En la citant comme un acteur dans le conflit, Kofi Annan prouve que le mémorandum, adressé par le Maroc aux Nations Unies, n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. Kofi Annan déplore au demeurant «la récente escalade dans les diatribes publiques émanant des parties et de la région et leur demande instamment de faire preuve de la plus grande retenue». Par ailleurs, le rapport comporte un autre élément inédit. Le secrétaire général de l'ONU y fait part de sa préoccupation devant les réseaux de passeurs d'émigrés clandestins qui prospèrent dans la partie du territoire algérien où campe le polisario. Le secrétaire général de l'ONU ajoute que c'est le polisario qui l'a informé de l'existence de deux groupes de clandestins originaires du Pakistan et du Bangladesh. «Les deux groupes ont affirmé qu'ils avaient été abandonnés dans le désert par leurs guides, lesquels leur avaient promis le passage en Europe». La mention par le polisario de ces clandestins intervient après l'arrestation, au mois de septembre, par les autorités mauritaniennes de125 candidats à l'émigration clandestine. Ils s'apprêtaient à s'introduire au territoire marocain à bord de véhicules appartenant à des bandes du polisario. Le risque que le polisario ne transforme la région en plate-forme de tous les trafics est réel. Et la communauté internationale devrait davantage s'en préoccuper. Kofi Annan a également rappelé qu'il reste encore «412 prisonniers, dont certains sont détenus depuis plus de 20 ans». Il a lancé un nouvel appel au polisario pour qu'il libère tous les prisonniers de guerre marocains. Il a conclu son rapport par la recommandation de proroger le mandat de la Minurso pour une nouvelle période de six mois, jusqu'au 30 avril 2005.