«La liqueur d'aloès» est le nouveau roman de Jocelyne Laâbi. Sorti aux éditions Marsam, cet ouvrage est le récit d'une vie et d'une souffrance causée par la séparation avec l'être aimé. Jocelyne Lâabi, l'épouse de l'écrivain marocain Abdelatif Lâabi, vient de publier un roman auquel elle tenait tant. La «liqueur d'aloés» vient de paraître aux éditions Marsam. C'est un roman de 215 pages qui retrace une histoire vécue, celle de Jocelyne. L'auteur commence par faire le récit de sa vie de jeune fille à Lyon avant de prendre la route pour le Maroc. Son père était mécanicien et un ami, lui proposa de travailler avec lui dans un magasin de réparation et de vente de pneus au Maroc. C'est ainsi, que la famille de Jocelyne voyage vers ce pays et s'installe à Meknès. Le récit est raconté à la troisième personne du singulier. Elle c'est Jocelyne, et dans les premiers passages du récit, le lecteur est emporté dans le monde de cette fille de 7 ans. Un monde qui relève du fantastique. Ici, on note l'habitude de l'auteur à écrire des contes pour enfants. Le style littéraire de La «liqueur d'aloés» ressemble beaucoup à celui des contes fantastiques. Toute la période de l'enfance de Jocelyne est racontée à la troisième personne du singulier. Le temps passe et la petite fille est devenue grande. En 1964, elle épouse Abdelatif Laâbi, un mariage qui aura lieu malgré le désaccord de ses parents. De ce fait, elle bravera tous les préjugés de l'époque. Sa vie prendra un autre tournant, lorsque Abdelatif Laâbi sera incarcéré en 1972. Commence pour elle une période de dur combat, et de souffrance. Cependant, La «liqueur d'aloés» n'est ni une autobiographie, ni un témoignage des années de détention qu'elle vécut à travers son mari. En fait, La «liqueur d'aloés» est plus qu'un récit, l'auteur ne se contente pas de raconter les faits tels qu'ils sont. Jocelyne Laâbi n'espère pas jouer le rôle de la victime pour être réhabilitée. Il s'agit en réalité de créer un autre style de l'écriture carcérale. Elle ne fut pas détenue de manière directe mais elle a vécu l'incarcération à travers son mari. En effet La «liqueur d'aloés» nous rapproche d'une certaine période dans l'histoire du Maroc. Ceci se passe dans les années 70. Une époque marquée par des détentions et des incarcérations politiques. L'auteur-narrateur raconte diverses situations vécues pendant sa séparation avec son mari lors de son incarcération en 1972. A cette même époque, une période de dur combat commence pour Jocelyne. Elle fut séparée de l'être aimée, mais ne voulait en aucun cas doubler sa peine en désespérant et en baissant les bras. Ce qui la consolait, c'est qu'elle n'était pas seule dans cette situation d'attente et de souffrance. D'autres femmes épouses de militants étaient à ses côtés. Elle raconte des après-midi, que ces femmes passaient ensemble en discutant et en essayant d'apaiser leur colère et leur haine contre des faits qu'ils savaient injustes. Des moments de solitude s'en suivaient. Mais pour faire face à cette solitude, Jocelyne s'occupait en écrivant des lettres à son mari. Ces mêmes lettres sont également publiées dans ce roman en guise d'illustration et d'argumentation. Dans ces lettres, l'auteur raconte son quotidien en détail à son mari. Elle souhaite l'avertir de tout ce qui se passe dans sa vie. Elle décrit tout, du plus banal au plus intéressant. « Hier, j'ai emmené tout mon monde à Ifrane. Nous sommes allés jusqu'à Michlifen. Il y avait beaucoup de neige ». C'est une façon d'impliquer son mari et de l'informer de tout ce qui se passe comme s'il n'était guère en prison. Une fois de retour à la vie normale, il ne sera guère dépaysé. «Liqueur d'Aloès» est une première pour le parcours littéraire de Jocelyne Laâbi. Première dans la mesure où l'auteur a habitué ses lecteurs à des contes pour enfants. Ce récit dévoile une autre facette de l'écrivain,celle de pouvoir s'adresser à un lectorat plus averti. Jocelyne Laâbi a souhaité lever le voile sur les tourments qu'elle a vécus en compagnie de ses trois enfants, Hind Yacine et Qods. Une façon de faire entendre sa voix et d'éclairer le lecteur sur une période de l'histoire du Maroc vécue autrement. Autrement, car c'est un regard étranger « envers un pays qu'elle a réussi de haute lutte à faire sien ».