L'UMT a réagi vivement au projet de loi relatif aux grèves. Elle a adressé un mémorandum, le 24 septembre, au Premier ministre pour l'informer de ses observations sur un texte qu'elle juge anticonstitutionnel et restrictif. Le sujet est épineux. Il arrache déjà des cris de douleur aux syndicalistes. Le projet de loi relatif au droit à la grève, élaboré par le gouvernement en février 2004, a été sèchement commenté par l'UMT dans un mémorandum adressé au Premier ministre, le 24 septembre. La déclaration de l'UMT reprend plusieurs articles du projet de loi et en dénonce tantôt le caractère imprécis, tantôt la teneur anticonstitutionnelle. L'UMT pointe d'abord du doigt la procédure qui a été suivie pour la rédaction unilatérale de ce projet de loi. Les partenaires sociaux n'ont pas été consultés pour l'élaboration d'un texte qui comporte «des obligations de procédure et un régime de sanctions qui criminalisent la grève». En effet, les articles 31 à 37 prévoient une série de peines allant des amendes au licenciement en cas de violation des nouvelles conditions pour l'exercice du droit de grève. Ces dispositions concernent le rassemblement en dehors du lieu de travail (article 11), un préavis d'au moins dix jours aux employeurs avant de décréter un avis de grève (article 13), l'interdiction de faire grève pendant un an sur des sujets ayant déjà fait l'objet de négociation avec l'employeur (article 19), l'interdiction d'occuper les locaux de travail pendant la durée de grève (article 23). «Projet gouvernemental qui rend impossible l'exercice du droit de grève», c'est ainsi que qualifie le mémorandum de l'UMT ces articles. Il fait en plus référence à la Constitution et aux principes de l'Organisation internationale du Travail (OIT) pour récuser les nouvelles dispositions du projet de loi. D'autres articles du projet sont dénoncés : ils laissent la voie ouverte à toutes les interprétations. A titre d'exemple, l'article 6 précise que le «contrat de travail pourrait être rompu en cas de faute grave commise par l'employé». Il cite parmi ces fautes graves : le vol, l'ivresse publique, l'injure manifeste, l'usage de toute sorte de violence contre un travailleur ou contre l'employeur et ses représentants. «Que vient faire la référence à l'ivresse publique ?», s'interroge le texte de l'UMT. «Que signifie “l'injure manifeste“ ? Qui l'apprécie ? Sur quelles bases ? ». Quant à la mention relative à «l'usage de toute violence», elle suscite l'ire des auteurs du mémorandum. «Un slogan ne sera-t-il pas considéré comme une violence ? Ou un piquet de grève dont l'usage est pourtant reconnu par la jurisprudence de l'OIT ?» Interrogé à ce sujet, un cadre à l'UMT explique que ce projet de loi vise à «goulotter» le droit de grève. «Un droit constitutionnel ne se goulotte pas», affirme-t-il. Une source gouvernementale affirme que le texte n'est pas figé et qu'il est ouvert à toutes les propositions. Elle ajoute que les observations de l'UMT, de même que celles d'autres centrales syndicales, seront prises en compte pour amender les articles du projet. La source indique que les conflits sociaux dégénérant en grèves ont des «effets négatifs sur la production, l'entreprise dans son ensemble et même sur le citoyen », rappelant qu'une situation sociale «saine» est nécessaire pour le progrès économique et la stabilité sociale. Elle rappelle aussi le discours prononcé par SM le Roi, le 30 juillet, où il avait accordé un grand intérêt à «la paix sociale». Le cadre de l'UMT cite aussi ce discours où le Souverain avait aussi parlé de «concertations et d'accords entre le gouvernement et les partenaires sociaux». En somme, les dissensions sont vives entre une importante centrale syndicale et le gouvernement. Mais elles ne sont pas insurmontables. Il reste à s'asseoir autour d'une table pour négocier un projet de loi qui mette l'économie à l'abri des blocages, tout en préservant aux employés leur droit à la grève.