Comment des intellectuels comme Najib Akesbi, Mohamed Sassi, et autres membres de Fidélité à la démocratie sont passés de la critique constructive à la destruction puis à l'abandon ? Esquisse de réponse. Ce samedi, les membres de l'association «Fidélité à la démocratie» devront déclarer leur divorce définitif avec l'Union socialiste des forces populaires (USFP), consacrant ainsi un état de fait qui règne depuis la dernière phase des préparatifs au sixième congrès national de ce parti, tenu à Casablanca du 29 mars au 1er avril 2001. Bien entendu, pour les observateurs qui ont suivi de près l'itinéraire de ce groupe, il était attendu que les rapports avec le parti aboutissent à la séparation. En dépit de leur activisme et leur savoir-faire verbal, les amis du trio Mohamed Sassi, Najib Akesbi et Khalid Soufiani, s'acheminaient vers l'impasse. Théoriquement, la présence d'universitaires et d'intellectuels au sein de ce groupe devrait les aider à mettre sur pied une stratégie payante sur le long terme, mais rien de cela ne s'est concrétisé. Mohamed Sassi et Najib akesbi sont des universitaires, le premier enseigne les sciences juridiques, le second est à l'Institut Hassan II des études agronomiques et vétérinaires. D'un autre côté, Khalid Soufiani est avocat alors que Mohamed Hafid, l'ancien secrétaire général de la Jeunesse Ittihadia, prépare une thèse de doctorat en littérature arabe. A ces derniers s'ajoutent d'autres cadres comme Dr. Taieb Hamdi et l'universitaire Outhman Achqara, qui a publié récemment un livre sur le mouvement ittihadi. Cependant, sans insulter l'avenir, il y a lieu d'annoncer que d'ores et déjà, le combat de ce groupe ressemble à celui de ce chevalier de l'Arioste qui continuait à se battre sans savoir qu'il était mort. Sur le plan de la contribution théorique au débat politique, ses membres n'ont apporté rien de neuf ou de consistant. Si on exclut certaines positions factuelles qui vont à l'encontre de la ligne du parti - chose tout à fait normale dans un grand parti comme l'USFP - on ne trouve pas chez eux des traces réelles d'une divergence idéologique avec la direction du parti. Toute la polémique est centrée sur l'action politique et la participation au dernier référendum et surtout au gouvernement de l'alternance. Sur le premier point, ils estiment que «la position à l'égard de la Constitution de 1996 a créé une tendance rétrograde au sein du parti, qui méprise la culture juridique positive (allusion faite à l'article 19 de la Constitution), laquelle est la base de la légitimité». Pour ce qui est du second point, la plate-forme «Fidélité à la démocratie» avance que l'option de participation au gouvernement ne diffère en rien des «offres traditionnelles présentées dans le passé». Bref, depuis sa genèse ce groupe n'a brillé que par sa production de contre-positions. En revanche, sur le terrain, il a tenté de constituer un véritable lobby de perturbation . Au lieu de faire face à la montée de ses adversaires, islamistes et nihilistes de tous bords, la Jeunesse Ittihadia s'est spécialisée, durant les mandats de Sassi et Hafid, dans la « lutte» contre la direction. Ainsi, d'une organisation de jeunesse, les derniers secrétaires généraux de la JI ont fait un « Etat dans l'Etat » avec ses normes et ses propres règles, soutenus dans tout cela de membres appartenant à différents horizons et instances du parti. A un moment donné, ils se comportaient comme des chefs d'organisations autonomes et indépendantes. Dans les années quatre-vingt-dix, ils sont allés jusqu'à tenir des pourparlers avec les séparatistes. Leur organe de presse est devenu au fil des ans un vrai porte-parole de l'opposition radicale. Mais en étant improductifs sur le terrain, ils se sont mis au pied du mur. Leur approche concernant le quota, du bas de l'échelle jusqu'à la plus haute instance du parti était inacceptable, parce que non seulement elle participerait à la perturbation de la vision du parti, mais pis encore, elle fera régner l'anarchie ; et ce alors que l'USFP aspirait à plus de modération et d'homogénéité politique. Des tâches qui ne concordent guère avec l'esprit contestataire de «Fidélité à la démocratie».