Rabat et Madrid ont validé, lundi à Rabat, l'accord sur l'îlot Leïla, tel que formulé par les USA. Les deux parties ont convenu également de reprendre les négociations en septembre à Madrid. De nombreux dossiers seront à l'ordre du jour pour dissiper la tension entre les deux pays et engager leurs relations sur de nouvelles bases. Les entretiens entre les ministres des affaires étrangères marocain, Mohamed Benaissa, et son homologue espagnole Ana Palacio, ont pris fin en début d'après-midi à Rabat. Ces discussions, qui ont duré trois heures, ont été ponctuées par la publication d'un communiqué commun. Dans ce communiqué, les deux parties confirment formellement l'accord conclu sous l'égide de Washington sur l'île Leïla. Les Etats-unis, en la personne du secrétaire Collin Powell, avaient entrepris une médiation qui a permis de dénouer la crise en en rétablissant et en maintenant la situation qui prévalait sur l'îlot avant le mois de juillet. Dans la déclaration commune les deux ministres, qui étaient accompagnés de leurs proches collaborateurs, il ressort que les deux parties ont décidé de négocier sur la base du document élaboré par Collin Powell. Il y est fait mention aussi de la tenue d'une autre rencontre à Madrid au cours du mois de septembre pour discuter de tous les contentieux qui opposent les deux pays. La courte durée du séjour de la ministre espagnole, qui a eu juste le temps de prendre un déjeuner avec M Mohamed Benaïssa, démontre que tout a été programmé pour parapher l'accord sur l'île Leïla sans aller plus loin. Ana Palacio est arrivée à Rabat à 11 heures du matin ce lundi pour rejoindre directement le ministère d'où elle est repartie pour l'aéroport après la fin des discussions. C'est dire que cette rencontre était essentiellement consacrée à la finalisation des aspects techniques de l'accord après le retrait de la force d'occupation espagnole. Selon certains observateurs, qui étaient présents à cette rencontre, les discussions étaient assez tendues notamment du côté marocain dont le droit a été bafoué par les Espagnols . D'ailleurs, tout un chacun a senti cette tension quand le ministre marocain, Mohamed Benaïssa, ne s'est déplacé pas à l'aéroport pour accueillir son homologue espagnole. Il a délégué un fonctionnaire de son département pour l'accueillir à son arrivée et l'accompagner après la fin des discussions. Finalement, le Maroc a été conforté dans sa position puisque les forces d'occupation espagnoles ont quitté l'îlot sans préalable écrit, comme Aznar s'entêtait à le demander. Le Maroc, qui a privilégié le dialogue et la concertation avec ses amis, notamment les Américains, sort mieux grandi que l'Espagne de cette crise. L'armada militaire déployée par le gouvernement espagnol s'est finalement retournée contre lui par l'absurdité d'une intervention sur un rocher. D'abord parce que cet îlot se trouve dans les eaux territoriales marocains que l'Espagne a violées. Deuxièmement et comme l'a si bien écrit le quotidien anglais The independante : L'Espagne se retire de l'île après avoir perdu la guerre de la diplomatie... tout cet épisode absurde a prouvé être un embarras pour Madrid et pour l'UE, qui ont eu à recourir au secrétaire d'Etat , Collin Powell, pour résoudre cette pagaille diplomatique». L'embarras espagnol est tel que beaucoup de leurs compatriotes journalistes, écrivains et députés, n'ont pas hésité à condamner le subconscient colonialiste d'Aznar et ses compères. Ce dernier, qui voulait redorer un blason terni dans la politique intérieure de son pays, a tenté de la faire aux dépens de la souveraineté marocaine. Mais le chef du gouvernement espagnol a réussi tout sauf à soigner son image. Il a énormément nui à la réputation de son pays, comme l'a déclaré son compatriote Maria, résidente à Sebta : «Je n'aurais jamais imaginé que l'Espagne, au XXI siècle, puisse réoccuper à la faveur d'une opération militaire spectaculaire un bout de territoire totalement inconnu». Non seulement sa force a été débouté par la diplomatie, mais il a réussi à renflouer tous les contentieux historiques qui opposent son pays au Maroc. Tous les médias du monde ont déduit que l'invasion de l'îlot Leïla n'était qu'un prétexte pour voiler le véritable contentieux de la colonisation de Sebta et de Melilla. L'envoyé spécial du quotidien belge « le Soir» résume tout ce qui a été écrit sur les présides marocains Sebta et Melilla en les décrivant comme «des villes représentatives de la hargne que cet anachronisme colonial espagnol met depuis un demi-millénaire à ne pas vouloir s'extirper des côtes africaines, telle une écharde plantée dans l'orteil du monde arabe.» Le chef du gouvernement devrait regretter certainement son acte absurde pour s'être ingénié à faire l'unanimité autour de lui. Aznar et ses affidés ont encore le temps de rectifier le tir d'une attitude hostile, colonialiste, absurde et opposée à tout ce qui est marocain. Ils ne devraient pas rater l'occasion de la rencontre prévue à Madrid entre les deux parties pour ouvrir tous les dossiers et en discuter sans le moindre préalable. Il y va de la stabilité du Maroc, de l'Espagne et de toute la zone du Detroit de Gibraltar. Voire, la résolution des contentieux existant aujourd'hui est à même de faire de l'Espagne et du Maroc des passerelles incontournables pour la coopération nord-sud.