Brahim Rachidi, militant socialiste, universitaire et ancien député donne son point de vue concernant les raisons de la crise qui secoue son parti, l'USFP. ALM : Tout le monde parle d'une crise grave au sein de l'USFP. Qu'en pensez-vous ? Brahim Rachidi : La crise au sein de l'USFP ne date pas d'aujourd'hui. La crise était déjà latente avant le VIème congrès et s'est révélée au grand jour depuis lors. Nous n'avons jamais eu l'occasion d'entreprendre une clarification idéologique et d'adopter des choix politiques et économiques clairs. Nous étions contre la privatisation, mais c'est le gouvernement Youssoufi et Fathallah Oualalou qui a adopté la prorogation des projets de loi sur la privatisation. Aujourd'hui, on est tenté de dire : qu'avons nous fait pour le citoyen depuis l'avènement du gouvernement d'alternance en 1998 ? Les Marocains ont l'impression qu'il n'y a pas eu de changement notable quant à leur vécu quotidien. Les élections communales ont montré l'existence de graves divisions au sein de l'USFP. Comment expliquez-vous cela ? L'absence de débat au sein du parti a encouragé la formation de clans. Depuis le VIème congrès, l'USFP n'a pas su se métamorphoser et s'adapter aux contraintes politiques et économiques imposées par la mondialisation. Des militants ont quitté ce parti. Nous, nous avons protesté contre les agissements de certaines personnes, mais nous restons toujours au sein de l'USFP. Nous avons quitté le congrès, mais pas le parti. La Jeunesse s'est dispersée et le syndicat s'est scindé en deux. Ces faits justifient-ils la débâcle à laquelle nous avons assisté ? Les pseudo-congrès régionaux de Casablanca ont donné naissance à des appareils inefficaces et pléthoriques. Sans le mode de scrutin de liste à la proportionnelle, beaucoup d'apparatchiks du parti ne seraient pas élus aux élections législatives du 27 septembre 2002. En outre, ce mode a permis aux apparatchiks de prendre les places de choix pour se faire élire. Il en résulte une marginalisation , voire une exclusion de plusieurs militants et notamment de ceux qui avaient quitté le VIème congrès. C'est pour cela que l'USFP a déjà vu sa position s'affaiblir suite aux résultats du 27 septembre 2002. Et qu'en est-il de Casablanca ? La débâcle de Casablanca s'explique , en partie, par l'inefficacité du secrétariat de la ville , cet organisme sans légitimité organisationnelle, qui a montré son incapacité à résoudre les problèmes de Casablanca. Le choix des candidats s'est effectué sur des bases subjectives favorisant le népotisme et le clientélisme et les ténors de l'USFP, comme Mohamed Karam, étaient, dès le départ, éliminés de la course. Finalement, le PJD qui n'a présenté que huit listes a eu seize sièges, alors que l'USFP, qui a présenté 16 listes, s'est contentée de 17 sièges. A ces failles s'ajoutent l'absence de direction clairvoyante et d'accords pré-électoraux. Quel regard portiez-vous sur l'avenir des courants au sein de l'USFP ? Je suis pour les courants basés sur des projets de société et une vision de la vie économique et sociale, non sur l'obédience et la subordination à telle ou telle personne.