Elisabeth Albérola lance un cri de cœur dans l'espoir de récupérer son bien. Elle explique pourquoi elle a engagé un procès au nom d'une société disparue et décrit la nature des objets disparus auxquels elle accorde une grande valeur sentimentale. ALM : Pourquoi n'avez-vous pas de titre foncier de la propriété dont vous défendez la possession ? Elisabeth Albérola : Mon beau-père, Emilio Albérola, avait acheté cette propriété en 1953 aux frères Raoux. Il a construit une entreprise de fabrication de cordes et de fils: Sicoma. Mon beau-père appartient à une famille, installée au Maroc depuis 1904. Je ne sais pas exactement pourquoi ce terrain n'a pas été enregistré. Sans doute une omission du notaire qui est parti trop vite en France. Mais nous avons toujours été là-bas et je ne sais pourquoi l'on a rasé toute trace de notre présence sur ce terrain. Votre famille a occupé cette propriété jusqu'à quelle date ? Les membres de ma famille y ont toujours été. A mon mariage en 1958, je les ai connus là-bas. Après, ils sont rentrés en Espagne et en France, à la fin des années soixante-dix. Moi, j'ai quitté le Maroc en 1980 pour enseigner au lycée français de Barcelone. Mais je revenais toujours à cette propriété où j'avais un immense jardin et des arbres. C'est là que je veux finir mes jours. Il y avait trois maisons dans la propriété. Qui les occupait ? J'avais loué l'une des maisons à un Marocain très gentil, un commandant aux FAR, M. Bouamama. L'autre était occupée par un Français, Laurent Benoît. Ils les ont quittées : mes adversaires sont trop puissants et savent bien faire. Savez-vous ce que m'a répondu l'un d'eux quand je l'ai supplié de me laisser mon jardin et mes arbres «la France ne manque pas d'hospices pour des personnes dans mon cas». Il a démoli sans gêne soixante arbres. Avez-vous récupéré vos affaires? Je n'ai rien récupéré du tout. Il y avait des postes de télévision, des paraboles, des meubles. Mais ce qui m'importe le plus, ce sont les photos, les tableaux, et les objets auxquels j'accorde une grande valeur affective. Vous allez les récupérer… Mais qui me rendra mon jardin saccagé et mes arbres, mes pauvres arbres, tous déracinés ? Ils ont tout rasé. Et dire qu'ils ont réussi à faire leur coup grâce à la complicité de Hassan, le gardien! Un garçon gentil, mais qui fumait beaucoup. Il ne veut plus me répondre au téléphone. Je lui ai pourtant rapporté des cadeaux. Je lui pardonne tout, s'il reconnaît qu'il n'est pas habilité pour représenter la société Sicoma. Pourquoi, si Sicoma n'existe plus depuis des années, vous avez engagé un procès au nom d'une société disparue? Je ne sais pas pourquoi l'avocat a agi de la sorte. Je l'ignore. Peut-être parce qu'on parlait toujours de Sicoma. Mais vous savez, même si le procès était contre moi, ces gens auraient trouvé la parade pour me gagner. Ils sont forts. Vous êtes consciente que vous avez perdu le procès en Instance et en appel. La justice s'est prononcée contre vous… C'est pour cela que j'ai l'espoir que Sa Majesté le Roi Mohammed VI voudra donner ses Hautes instructions pour que l'on se saisisse de mon dossier. Oui, je n'ai pas de papiers, mais je suis là-bas depuis 1958. J'aime ce pays où j'ai enseigné pendant longtemps. Tous mes projets d'avenir sont liés à mon jardin.