Fondée en grande pompe, l'alliance des anciens partis de l'opposition, la Koutla démocratique, est aujourd'hui dans un coma profond. Les tiraillements entre l'Istiqlal et l'USFP signeront son acte de décès. Le pôle de la Koutla peut-il se targuer encore d'être en communion au sein d'une entité qui n'a pas cessé de s'effriter au fil des ans. À tel point que nombre d'observateurs politiques, voire les propres acteurs de cette coalition, l'ont depuis longtemps enterré dans leurs esprits. Il est vrai que le Bloc démocratique s'est déprécié avec l'avènement du gouvernement d'alternance. Mais il faut reconnaître que les divergences existaient bien avant sa constitution notamment entre les deux frères ennemis l'USFP et l'Istiqlal. La dualité historique entre les deux poids lourds de la Koutla n'a jamais cessé d'exister. Certes les leaders des deux partis essayaient tant bien que mal de voiler leur éternelle pomme de discorde en public. Mais au sein de leurs directions respectives et surtout dans leurs milieux militants, voire dans leur presse, la méfiance et la défiance étaient toujours de mise. À preuve, à chaque élection législative ou communale, chacun défendait sa maison quitte à piétiner, sans égard, ni retenue le jardin de l'autre. On croyait que la constitution de la Koutla allait tempérer les ardeurs des uns et des autres. Après l'euphorie de l'union avec toutes ses fastes, les anciens démons n'ont pas tardé de se réveiller. Les dirigeants de l'USFP et de l'Istiqlal auront du mal à accorder leurs violons tout comme leurs militants de base lors des élections de 1997. Sur le champ électoral la bataille faisait rage entre les deux ténors et les militants de chacun des deux partis s'en donnaient à cœur joie pour détruire les candidats de leurs alliés. Il fallait s'y attendre la composition du gouvernement d'alternance ne pouvait que pérenniser ces divergences ancestrales. Les dirigeants de l'Istiqlal qui ont toujours aspiré à diriger le gouvernement ont longtemps tergiversé avant d'accepter leur quota au gouvernement. Mais la politique du «soutien critique» adopté maladroitement par Abbas Fassi a ressuscité cette méfiance mutuelle entre les deux partis. Au début de l'alternance, cette attitude istiqlalien d'être au gouvernement sans en être solidaire, n'a pas vraiment prêté à conséquence. Mais dès que le leader istiqlalien , Abbas Fassi, a intégré le gouvernement en tant que ministre, les choses ont commencé à se corser. Ce dernier n'arrivant pas à concilier sa fonction de ministre avec son statut de chef de parti, a multiplié la confusion des genres. D'autant plus que la presse du parti notamment le quotidien «Al Alam» corroborait ses discours avec des commentaires de plus en plus critiques envers le gouvernement. La presse socialiste ne répliquait pas, jusqu'au jour ou l'éditorialiste Abdelkrim Ghallab a fustigé le gouvernement de tous les maux. Il s'en est pris directement à Abderrahmane Youssoufi en la taxant d'avoir fait trop de concessions au pouvoir. La réplique du quotidien «Al ittihad Ichtiraki» a été des plus virulentes en rappelant le passé politique d'Abdelkrim Ghallab. Depuis les attaques et les contre-attaques ont déculpé entre les deux parties jusqu'au jour ou Abbas Fassi a fait un show antigouvernemental à la télévision. Invité sur le plateau de l'émission «Fil Wajiha» le leader istiqlalien a accusé le gouvernement de ne pas communiquer avec le peuple et de manquer de référence islamique dans son discours. Ce faisant la Koutla est devenue une chimère à laquelle d'ailleurs ne croyaient que ceux qui l'utilisaient à des fins partisanes et politiciennes. Le voile a été dévoilé par l'Istiqlal, d'autant plus que de l'autre côté, le PPS est allé flirter avec le PSD et que l'OADP s'est fondue dans la gauche socialiste unifiée (GSU).