Dans la nuit de dimanche à lundi, près d'un demi-millier d'immigrants subsahariens ont pris d'assaut la barrière métallique qui sépare le Maroc de Melilia. D'autres ont été arrêtés près de Larache. Pendant ce temps-là, l'UE presse notre pays pour y créer des centres d'accueil. Leur histoire est horriblement banale. Chaque jour, plusieurs personnes cherchent à fuir la misère de leur pays et s'embraquent dans une aventure périlleuse pour rejoindre la rive nord de la Méditerranée. Eu égard à sa proximité de l'Europe, le Maroc est devenu une plate-forme pour ceux qui rêvent de se refaire une vie au nord de la Méditerranée. Chaque semaine apporte son lot d'arrestations ou de vies humaines fauchées en mer. Car ceux qui cherchent à rejoindre l'Europe prennent tous les risques. Peu importe l'état de la barque, peu importe les compétences du navigateur, peu importe le temps qu'il fait, rien ne peut tempérer leur détermination à atteindre les côtes européennes. Les candidats à l'immigration clandestine sont de différentes nationalités. Il y a, bien entendu, des Marocains, et cinquante d'entre eux ont été arrêtés vendredi au large d'Al Hoceima par une unité de la marine royale. Mais il y a surtout les Subsahariens. De janvier à juillet 2004, environ 3 090 candidats à l'immigration ont été arrêtés dans la seule d'El Ayoun. Ils tentaient de rejoindre les Iles Canaries. Et ce chiffre ne tient pas compte des Subsahariens qui tentent de rejoindre les côtes espagnoles à partir du nord du Maroc. Rien que lundi, les éléments de la Gendarmerie royale et des Forces auxiliaires ont arrêté 12 ressortissants subsahariens, après le ratissage de la forêt Al-Ansar, près de Larache. Leurs nationalités sont encore inconnues, mais il s'agit de huit hommes et quatre femmes dont une était accompagnée d'un nourrisson. Ce n'est pas la première fois qu'une forêt est transformée en abri par les Subsahariens. La forêt du mont Gourougou (12km de Nador) est devenue un lieu mythique dans l'espace de représentation de ceux qui rêvent d'un monde meilleur. Cet endroit ressemblerait, selon certains, à la Cour des miracles. On y trouve plusieurs nationalités, chacune représentée par un chef. De nombreux petits métiers y fleuriraient. Et plusieurs mois peuvent s'écouler entre l'arrivé à cet endroit et l'hypothétique départ vers la rive nord de la Méditerranée. Mais la patience des immigrants subsahariens n'est pas sans limites. Près d'un demi-millier d'entre eux ont pris d'assaut la barrière métallique qui sépare le Maroc de Melilia, dans la nuit de dimanche à lundi. Ils ont tenté de déborder par leur nombre la Garde civile espagnole. Ces clandestins, estimés entre 400 et 500, se sont organisés comme une armée antique pour prendre d'assaut la double barrière métallique haute de trois mètres qui encercle la ville de Melilia. Munis d'échelles en bois de fabrication artisanale, les immigrants ont malmené la barrière. Ils n'ont pu être arrêtés par la cinquantaine d'agents de la Garde civile espagnole qui a demandé l'aide de la gendarmerie royale. Et si la tentative d'assaut a échoué, une quarantaine de personnes a réussi à entrer dans Melilia. Ce coup de folie des immigrants montre leur détermination à atteindre coûte que coûte l'espace européen. L'UE n'entend pas les laisser faire. Elle veut les maintenir en terre africaine. A cet égard, l'UE négocie avec le Maroc la création de campements pour l'accueil des clandestins subsahariens. Il s'agit de trois à cinq camps qui accueilleraient également les demandeurs d'asile subsahariens en attendant la suite qui sera donnée à leur dossier. En d'autres termes, en plus des immigrants clandestins, les demandeurs d'asile seront rapatriés de l'espace communautaire vers notre pays. Le président du gouvernement autonome des Iles Canaries, Adan Martin, se réjouit déjà de cette initiative qui risque de donner une bien mauvaise réputation à notre pays. A quoi ressemblerait un campement pour les Subsahariens ? Dans quelles conditions y seraient détenus les immigrants ? D'ailleurs, cette solution n'arrange que ceux qui veulent éloigner les Subsahariens. Elle n'empêchera pas ces derniers, femmes ou hommes de continuer à braver tous les dangers et à mourir d'une façon quasi banale.