L'informel est souvent vu par certains technocrates bien pensants, bardés de diplômes et rêvant du marché idéal, comme un mal. Un terrible manque à gagner pour le fisc, une tragédie pour le Trésor, et une plaie béante pour tout le pays et qu'il faut éradiquer au plus vite au nom des accords signés ici et là et sur la foi de la sacrosainte loi sur la concurrence. L'informel est souvent vu par certains technocrates bien pensants, bardés de diplômes et rêvant du marché idéal, comme un mal. Un terrible manque à gagner pour le fisc, une tragédie pour le Trésor, et une plaie béante pour tout le pays et qu'il faut éradiquer au plus vite au nom des accords signés ici et là et sur la foi de la sacrosainte loi sur la concurrence. Certains entrepreneurs, quand ils ne fustigent pas ouvertement les importations chinoises et le Péril Jaune dans son ensemble, nouveau bouc émissaire, se rabattent sur Derb Ghallef, bastion de l'informel. Dans le mot informel, on met tout :fraude, évasion fiscale, trafic de drogue, blanchiment d'argent, etc. Mais aussi, piratage, travail au noir, écoulement en douce de certains produits issus des entreprises formelles. Le Centre marocain de Conjoncture nous invite à fdistingués entre l'économie souterraine et l'économie informelle. Entre la volonté délibérée de vouloir contourner les règles de la cité et l'impossibilité de s'y conformer, il doit bien y avoir une différence. Comment peut-on lancer une stratégie commune pour deux choses si distinctes ? Mais, même vidé de la sous-facturation et de la contrebande, l'informel n'en reste pas moins important dans l'économie marocaine. Une étude réalisée en 1999-2000 par la Direction des Statistiques montre que cette économie non organisée représente environ 166 milliards de dirhams, l'agriculture non comprise. Pensez que le PIB du Maroc est de l'ordre de 400 milliards de DH ! Bref, le poids de l'informel est énorme, avec une prédilection pour le secteur du commerce, de l'industrie, de l'artisanat et enfin de la construction. Ce sont plus d'un million d'entreprises dont l'intégration dans le circuit organisé représente de substantielles rentrées pour le Fisc qui prône depuis longtemps une politique basée sur l'élargissement de la surface imposable et non l'augmentation des taxes. Reste à savoir quel discours adopter vis à vis de ces entreprises dont l'image d'exempté fiscal vole facilement après constat sur le terrain. Y'aura-t-il des lignes de micro-crédits en masse affectées à la reconversion du parallèle vers l'organisé ? Bien des ministres ont été tentés par une approche chirurgicale de la question, une méthode musclée, avant de se raviser à chaque fois. La moindre ballade dans un souk suffit de se rendre compte de la complexité du phénomène. Car aujourd'hui encore, une grande partie de la sécurisation alimentaire des couches populaires et moyennes passe par l'informel qui, pour rien arranger aux plans des tenants de la méthode musclée, absorbe, d'après l'ENSI, 39% de l'emploi non agricole, soit 20% du total. Dans des pays similaires comme la Tunisie et même la Turquie, des études sont parvenues aux mêmes conclusions. Reste maintenant à adopter une approche, à mettre en place des mécanismes incitatifs pour permettre aux entreprises qui ont les moyens de se formaliser. Et à rappeler à l'ordre certains qui manifestement ont choisi d'évoluer dans le parallèle. Faire feu de tout bois dans le traitement de ce dossier est d'autant plus à éviter que l'informel est un grand employeur et donc un amortisseur des crises sociales.