Cent jours après son élection à la tête du parti de l'Istiqlal, Hamid Chabat entend peser de tout son poids sur le chef de gouvernement pour imposer le remaniement ministériel. C'est le principal message de son mémorandum adressé le 3 janvier au chef de l'Exécutif comprenant une trentaine de pages et dans lequel il dresse un bilan critique détaillé de l'action gouvernementale. «Une année après l'investiture du gouvernement, le remaniement ministériel s'impose plus que jamais comme le moyen le plus adéquat pour améliorer le rendement de l'Exécutif et accélérer le rythme de son action», lit-on dans ce document. «Pour le parti de l'Istiqlal, il s'agit d'un moyen et non d'une fin en soi. C'est l'occasion appropriée pour insuffler une nouvelle dynamique et remédier aux dysfonctionnements et retards cumulés dans la gestion de nombre de dossiers et d'affaires», estime M. Chabat. Et ce remaniement «tant souhaité» par l'Istiqlal doit obéir à un nombre de conditions. Il est question de renforcer la représentativité féminine au sein du gouvernement pour la porter à au moins 20%. Ce remaniement doit également garantir la représentativité des provinces du Sud dans le gouvernement. Ce mémorandum recommande la réduction du nombre de portefeuilles ministériels, ainsi que la nécessité de ne pas scinder un ministère pour en confier la gestion à plus d'un ministre ou formation politique, de manière à clarifier les responsabilités et à s'inscrire en harmonie avec le principe constitutionnel de corrélation entre responsabilité et reddition des comptes. Par ailleurs, pour ce qui est des dysfonctionnements résultant d'une année d'exercice du gouvernement, le secrétaire général du PI pointe du doigt la dégradation du pouvoir d'achat, la montée des mouvements de protestation et de grèves sectorielles en l'absence de dialogue sérieux et la prise de certaines décisions impopulaires sous prétexte de remédier au déficit. Il est également question de l'affaiblissement de la classe moyenne par l'instauration de nouvelles taxes, la dégradation du climat des affaires… Hamid Chabat critique également la méthodologie adoptée dans la réforme de la Caisse de compensation qui n'implique pas les partis de la majorité, l'opposition et la société civile. Sur un plan purement politique, Hamid Chabat ne manque pas de critiquer directement l'attitude d'Abdelilah Benkirane lors de ses différentes sorties médiatiques. «L'opinion publique a plus tendance à voir en lui le chef d'un parti que le chef de l'Exécutif», a souligné M. Chabat. Dans ce sens, il a appelé au rejet du partisanisme qui a marqué la première année du gouvernement. Il l'appelle également à mettre fin à la confusion dans ce discours qualifié de paradoxal par rapport à l'action de son gouvernement. «Il s'agit d'un discours prônant une rupture avec les anciens gouvernements, alors que paradoxalement toutes les mesures de l'actuel gouvernement s'inscrivent dans la continuité des précédents. Il faut donc choisir. Sommes-nous face à une rupture véritable ou à une continuité ?». Pour ce qui est des priorités de l'Exécutif, le mémorandum souligne que ce sont celles convenues au sein de la coalition gouvernementale avec en premier lieu la réalisation de l'équilibre macroéconomique et le dossier relatif à l'emploi et l'appui aux entreprises. Entre autres priorités figurent l'aide au logement au profit des classes moyennes à la faveur d'un projet réaliste et réalisable, le parachèvement du programme «Villes sans bidonvilles», la couverture médicale et l'unification des efforts des départements gouvernementaux et des autres acteurs concernés pour la lutte contre la pauvreté. Pour ce qui est du fonctionnement de la majorité, le parti a estimé nécessaire de revoir la charte de la majorité, notamment son mode de fonctionnement en tant que majorité politique et cadre de référence dans la prise de décisions déterminantes en lien avec l'action gouvernementale dans les divers secteurs, avec en substance la tenue régulièrement des réunions de la Haute instance de la coalition. C'est ainsi que Hamid Chabat appelle à inscrire la question du remaniement ministériel dans la charte de la majorité tout en définissant les moyens d'y parvenir compte tenu de la procédure constitutionnelle en la matière.n