Jeudi, des délégués d'ONG et de l'ONU se sont déclarés «choqués» par l'atrocité des massacres dans le camp de Jénine et ont appelé à une aide humanitaire massive. Une enquête va démarrer, selon la commission de l'UE. En se rendant sur place jeudi, l'envoyé spécial de l'ONU Terje Roed-Larsen ne s'attendait visiblement pas à un tel spectacle : «c'est totalement détruit, c'est comme si un tremblement de terre avait touché» le camp. Accompagné de ses délégués et de membres de la Croix-Rouge, Terje Roed-Larsen a pu visiter Jénine peu après que les forces israéliennes l'aient partiellement évacuée. «C'est absolument inacceptable, d'une horreur qui dépasse l'entendement», a-t-il alors déclaré, revenant sur la «puanteur de la mort en de nombreux endroits». «Nous avons des experts qui sont habitués aux guerres et aux tremblements de terre et ils disent qu'ils n'ont jamais rien vu de tel». Le coordonnateur spécial au Proche-Orient a aussi qualifié de «totalement inacceptable», le refus d'Ariel Sharon de laisser entrer les secours après la fin des combats, le 11 avril. «C'est moralement dégoûtant» a-t-il ajouté avant de raconter avoir vu «deux frères qui sortaient leur père des ruines. «La puanteur de la mort était horrible». Un écœurement qu'Amnesty International avait déjà exprimé la veille. «C'est l'une des pires scènes de dévastation que j'ai jamais vues», avait alors souligné un délégué de l'ONG, Javier Zuniga. «Il est presque impossible de concevoir comment ce qui était autrefois une ville ressemble maintenant à un paysage lunaire». Un autre membre d'Amnesty, le professeur Derrick Ponder, avait quant à lui pu avoir accès à l'hôpital de Jénine pour pratiquer des autopsies sur des cadavres et déterminer les causes de leur mort. Les Israéliens partis, les réfugiés ont également pu sortir de chez eux. Aidés par les sauveteurs, ils se sont mis à creuser et à déblayer les amas de pierre pour tenter de sortir les survivants toujours prisonniers sous leurs habitations écroulées. «Nous avons trouvé cinq personnes, qui ont été conduites à l'hôpital de Jénine en très mauvais état», a ainsi déclaré un habitant du camp, Naïm Aouaïs, jeudi matin. «Il y avait deux garçons, une femme et deux hommes», a-t-il ajouté, en précisant qu'ils semblaient souffrir de brûlures et d'autres blessures. «J'ai entendu beaucoup de personnes appeler à l'aide, mais nous ne pouvons rien faire pour elle, car nous n'avons pas d'équipement», a-t-il poursuivi. Combien d'hommes et de femmes se trouvent ainsi sous les décombres depuis au moins une semaine? Combien sont morts faute de secours ? Qu'en ait-il des soupçons de massacres qui pèsent sur l'Etat hébreu ? Le départ annoncé -le énième- des soldats devrait permettre d'apporter certaines réponses. Mais reste la question des charniers, qui restera en suspend tant qu'Israël n'autorisera pas l'envoi d'une délégation internationale. Même si un porte-parole de la commission européenne a estimé jeudi qu'une enquête «devrait démarrer immédiatement». L'Etat sioniste a par ailleurs encore assuré jeudi que l'armée israélienne se retirerait totalement, d'ici dimanche, de Jénine et de Naplouse, et partiellement de Ramallah. Lors qu'il a fait cette déclaration, le ministre israélien de la défense Ben Eliezer a aussi déclaré : «il faudra régler le problème des assassins de Rehavam Zeevi (le ministre du tourisme tué en octobre) réfugiés dans la Mouqataa», le QG de Yasser Arafat. Et celui «des palestiniens armés» retranchés dans la basilique de la Nativité, à Beit Lahm. Concernant le siège de l'église, il était d'ailleurs question d'une rencontre jeudi entre des représentants palestiniens et israéliens, dans la salle de conférence de la ville, appelée «le Centre pour la Paix». Un espace qui n'a jusqu'à présent presque jamais servi.