Certes, le premier ministre-candidat Lionel Jospin s'est laissé aller à quelques maladresses en début de campagne, mais sa personnalité reste marquée par la rigueur et l'attachement aux principes. Dernier candidat à s'être lancé officiellement dans la course à la présidentielle, le chef de file du parti socialiste ne l'a pas moins commencée sur les chapeaux de roue. Il a même un temps fait preuve de basse franchise en qualifiant Jacques Chirac d'homme «vieilli» et «fatigué». Une semaine plus tard, il fait volte face en se déclarant «désolé». Laisser-aller volontaire ou maladresse ? Cette fois-ci, face aux indignations de la garde chiraquienne, le socialiste tente de se rattraper en opposant son «honnêteté» au «cynisme » de son rival… Ces provocations sont pourtant loin de ressembler à l'image de rigueur que véhicule depuis toujours Lionel Jospin, quitte à paraître trop rigide. Il a également, depuis son entrée politique, fait du respect des engagements, de la responsabilité, mais aussi de la simplicité et de la transparence, ses propres principes. «Je suis un dogmatique qui évolue, un austère qui se marre, un protestant athée » répond-t-il en 1999 à son entourage qui lui reproche même son manque d'intérêt vestimentaire. Après une période trotskiste - il adhère à l'Organisation Communiste Internationaliste (OCI) en 1964 Lionel Jospin sait par ailleurs rapidement se fondre dans la mouvance socialiste. Il en intègre la direction dès 1973, poussé dans cette voie par son mentor François Mitterrand. Dans les années 1980, il devient même premier secrétaire du PS mais prend progressivement ses distances vis à vis du président Mitterrand, qui lui préfère Laurent Fabius. Une blessure sur laquelle il ne revient d'ailleurs qu'à la fin de l'année 2000 en rappelant sa « fidélité mitterrandiste». Quand il prend la tête de Matignon, suite aux élections législatives anticipées de juin 1997, cet énarque doit à nouveau s'adapter. Adepte d'un « réalisme de gauche», il impose les 35 heures au patronat tout en privatisant plus que les gouvernements de droite ne l'avaient fait. A la tête d'une gauche «plurielle » qui intègre centristes, écologistes et communistes, Lionel Jospin joue alors constamment sur la notion d'équilibre, ou de « jeu collectif». Les médias parlent même à l'époque d'une «méthode Jospin». Une méthode qui connaît cependant ses avatars avec le départ de Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, poussé vers la sortie par la grogne des enseignants. Puis vient la démission de Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, en désaccord sur le dossier corse. Cinq ans après son entrée à Matignon, Lionel Jospin affirme cependant s'être « personnellement épanoui». Il se présente aujourd'hui à l'Elysée pour la seconde fois, après une défaite honorable en 1995.